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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 9.1893

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Nr. 6
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Bouchot, Henri: Les Salons de 1893, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24662#0485

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LES SALONS DE 1893.

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vrais sont rarement ceux que l’élite désigne et chauffe. Prenons un
exemple aux Champs-Elysées. M. Buland, un fort aimable chroniqueur
de scènes modestes, a peint des ouvriers souscrivant à un emprunt.
Ce n’est en réalité ni plus relevé, ni plus sot que Van Ostade montrant
des ivrognes, ou Gérard Dow idéalisant une hydropique. En outre
l’œuvre est de facture congruante et d’un bel esprit d’observation. Or
les moins éduqués courent à ce sujet et laissent la nymphe d’Henner
dormir son sommeil. Qui est dans le vrai, ou de celui qui va
d’instinct, ou de ceux qui ayant appris une leçon la viennent réciter
en manifestant une extase?

Voilà deux publics au moins, comme il y a deux salons. Encore ne
fais-je point état des Alcestes qui, tout instruits qu’ils soient, préfè-
rent par contradiction les « si Paris m’avait donné ! » à l’Or du Rhin
de AVagner. Ces gens chagrins choisiront toujours une toile de Jules
Breton, un paysage de Zuber de préférence aux supérieures théocraties
de Fantin-Latour. Il se faut donc résoudre à écrire pour les uns et pour
les autres, non pour les peintres assurément, sans froissement, dans
le calme, ce qui n’est point si aisé, quand on ne comprend guère.

L’Histoire. — On aime encore l’Histoire aux Champs-Elysées, on
y revient volontiers; l’usage s’en garde pour des raisons d’Etat.
Entendez que l’Etat a le plus facile débit de ces résurrections, surtout
lorqsu’on les sait tailler à ses goûts; d’où quelque phlétore de
patriotismes vibrants. Destinées par avance aux musées de province,
ces œuvres ont loisir de s’étendre en large; elles sont pour l’instant
orientées de préférence dans le sens des droits de l’homme et du citoyen.
Elles plaisent au simple monde par une convention d’idées compa-
rable à celle du théâtre. Les gens de distinction et de délicatesse n’y
trouvent leur compte que si l’auteur y jette une archéologie sérieuse
ou de fort modernes écritures. Mais l’auteur fait assez rarement l’une
et l’autre de ces choses; d’abord parce qu’on ne lui en sait aucun
gré, ensuite parce que lui-même peut bien ne pas savoir tout.
M. J.-P. Laurens , qui est un des premiers, ne connaissait pas
Saint Jean Chrysostôme. Ni vous ni moi ne lui en voudrons, mais
comme il a évité aussi « l’écriture artiste » on lui reproche son Jean
Bouche-d’Or. Il paraît que le fameux homéliste s’aperçoit dans les
manuscrits grecs, barbu et plutôt jeune, au lieu que celui de
M. Laurens est pelé comme une rave. S’il n’y avait que des simples,
l’aventure passerait toute seule, mais il y a l’élite, et l’élite trouve à
gloser. Il était même à prévoir qu’elle gloserait.
 
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