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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 10.1893

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Nr.1
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Leprieur, Paul: Correspondance d'Angleterre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24663#0089

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

exercée toute sa vie l’activité de M. Burne-Jones, dans une sphère d’idées pures et
élevées, de sentiments chastes et tendres. On peut dégager de celle revue rapide
la place importante que tient la couleur en ses préoccupations de peintre. Elle est
de parti pris comme son dessin, parfois même trop audacieuse pour nos yeux
français, mais toujours expressive ou pittoresque. Quand il l’élimine ou la réduit,
c’est volontairement.

Des œuvres purement décoratives, un petit nombre seulement avait trouvé
place à l’exposition. La plus remarquable de beaucoup est un grand carton à
l’aquarelle pour mosaïque, tout récemment exécuté en vue de l’arc triomphal d’une
église américaine de Rome, l’église Saint-Paul, et pour donner suite à un revête-
ment semblable de l’abside, dont il a été parlé antérieurement dans la Gazette. Le
motif en est tout à fait ingénieusement trouvé pour parler de loin aux yeux, en
même temps que pour toucher les cœurs, avec ce grand Christ accueillant et doux,
se détachant au centre, comme en croix, mais sans blessure, sur l’arbre de vie,
et à ses côtés, emblèmes de l’humanité souffrante, debout et humbles, adorant,
l'homme au regard trisle et lassé ardemment tourné vers lui, la femme au front
penché portant dans scs bras ou ayant près d’elle un enfant. Une gerbe d'épis sym-
bolise pour l’un le travail, un lys pour l’autre la chasteté. On peut prédire d’avance
à cette belle et originale composition, d’effet simple et grave, le plus légitime
succès, quand elle aura été transportée sur mosaïque par la maison Salviali.
Deux cartons de verrières pour la cathédrale de Salisbury et pour une église de
Boston (.Angeli taudantes et Y Education de Salomon) rappelaient plutôt ses innom-
brables travaux en ce genre qu’ils n’en pouvaient donner idée. Signalons enfin le
grand piano à queue, dont la Gazette a reproduit l’an dernier une des peintures;
un essai de cassone un peu lourd, où est figuré en relief peint et doré le Jardin des
Hespérides; un petit coffret, pour mariage sans doute, autre imitation et souvenir
de l'art italien, dont les sujets sont inspirés du mythe de Pandore; un charmant
éventail, délicieusement inventé et peint, sur le Triomphe de l’Amour; et, avec la
suite complète des dessins pour le Virgile, une ou deux illustrations de manuscrits
ou de livres. Quelques portraits, — dont celui de sa fille, Mrs Mackail, est le plus
célèbre et le meilleur, — qu’il traite en idéaliste, à peu près comme Puvis de
Chavanncs, quand il se mêle d’en faire, synthétisant, simplifiant, dégageant
l’essence de l’être et de la vie, et un assez grand nombre de dessins, croquis, têtes
d’étude, quelques-uns infiniment curieux, raffinés et subtils, sur fond rouge ou
brun, en tons d’or, complétaient cet ensemble merveilleux voué au noble et délicat
rêveur, qui est une des gloires de l’art anglais contemporain, et permettant de
mesurer la constance de l’effort à la beauté du résultat.

Tandis que les « esthétisants » vénéraient M. Burne-Jones à la New Gallery,
les amateurs d’art ancien rendaient leurs hommages à Signorelli au Burlington
Fine Arts club. Étrange et singulière idée, qui ne pouvait naître et grandir que
dans un pays où l’amour de la science prend vite un caractère de ferveur senti-
mentale, presque de mysticisme, que celle de consacrer une exposition spéciale
au vieux maître ombrien. Rare partout ailleurs qu’en Italie, et en Italie même, en
dehors des fresques ou des tableaux d’autel, visible seulement dans quelques
galeries, Signorelli est à peine représenté dans les autres musées d’Europe; à plus
forte raison, dans les collections particulières, est-il à peu près introuvable,
 
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