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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 10.1893

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Leprieur, Paul: Correspondance d'Angleterre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24663#0090

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CORRESPONDANCE D’ANGLETERRE.

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j’entends en spécimens authentiques, peintures ou dessins; et il fallait une assez
forte dose d’enthousiasme, de foi aveugle ou de présomption patriotique pour
espérer, avec les seules ressources de l’Angleterre, réunir de lui autre chose que
des bribes insuffisamment dignes d’honorer ce grand nom. Il est vrai que sur
vingt-cinq tableaux réputés de Signorelli en Grande-Bretagne, le Comité n’en a
pas recueilli moins de dix-sept ; et encore, sur les huit manquants, trois sont à la
National Gallery : il peut donc être satisfait de sa tâche, et le déclarait en tête
du catalogue non sans une certaine fierté.

Le butin toutefois, examiné en détail et passé au crible d’une sévère critique,
perdait beaucoup de sa valeur. C’est l’intérêt de ces expositions d’œuvres qui
s’éclairent les unes les autres, que de permettre de revenir sur d’anciens juge-
ments. Or, malgré l’autorité de Crowe et Cavalcaselle qui se sont portés garants
pour quelques-unes, vues peut-être un peu vite ou légèrement, il faut avouer que
la plupart des peintures exposées décelaient plutôt la main d’élèves, de copistes,
d’imitateurs, quels qu'ils soient, que la main même du maître. On en trouverait
bien deux ou trois dans le nombre qui sont à peine «. signorellesques ». Sans
doute, son idéal a beaucoup varié, et de la fermeté ou de la sécheresse ombrienne
à la grâce florentine, de Pinturicchio à Botticelli ou à Lippi, ses contemporains et
ses émules, il a souvent compliqué, emmêlé, troublé de bien des éléments divers
ses propres instincts de force et de grandeur. Mais, si inégal qu’il ait été et qu’on
le dise, si vieux qu’il ait vécu, il n’a jamais pu s’abaisser jusqu’à certains barbouil-
lages. Laissons aux manœuvres ce qui leur revient.

Un des plus importants morceaux de l’exposition était Y Histoire de Coriolan
rencontrant sa mère et sa femme aux portes de Rome, fresque transportée sur
toile, prêtée par M. Ludwig Mond, et qui, avec quatre autres fragments du même
genre, conservés soit à la Nalional Gallery, soit à la galerie communale de Sienne,
sont tout ce qui reste aujourd’hui de la décoration du palais Pétrucci, à Sienne,
exécutée vers 1498 ou 1506 par Luca Signorelli, Pinturicchio et leurs élèves.
Malheureusement le transfert sur toile de quelques-unes de ces fresques les a fort
endommagées. C’est le cas pour celle-ci, où l’on retrouve, d’ailleurs, identique-
ment les mêmes tons pâles et déteints mêlés de dorures vives, le même manié-
risme un peu âpre de figures et de mouvements, que dans le Triomphe de la Chasteté
de Signorelli, à la National Gallery, qui a même origine. Toutes deux portent cetle
étrange signature, LVCAS COR1T1VS, et, que l’exécution en soit de Signorelli ou
de son élève Girolamo Genga, ainsi que l'a supposé Morelli, il est certain que le
dessin, la composition de l'une et de l’autre paraissent bien du maître lui-même.

Deux petits panneaux appartenant à sir Francis Cook sont les seuls peut-être
qui avaient une véritable saveur signorellesquc, qui représentaient, du moins, au
mieux de ses tendances d’anatomie sèche et nerveuse, de réalisme concentré et
ferme, l’énergique précurseur de Michel-Ange. Études préparatoires, ou, comme
le veut le catalogue de Burlington, fragments d’un Baptême du Christ aujourd’hui
perdu, ils nous montrent quelques-uns des comparses qui ne manquent à aucun
des tableaux de Signorelli ou de son école sur ce sujet : figures de jeunes hommes
se déshabillant ou allant vers l’eau. Le motif est connu et a été souvent exploité.
Mais, ce que Signorelli y sait mettre et dont on retrouve ici l’écho, c’est une
certaine allure d’aisance héroïque dans la nudité. La passion d'Uccello pour la per-
spective, il l’eut pour l’anatomie, et en toute occasion aima à faire étalage de
— 6e période. 11

X.
 
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