LES DÉBUTS DES VAN EYCIv
11
déjà cité par M. Weale, puis sur le Calvaire et le Jugement dernier
du musée de l’Ermitage, à PétersbourgL
La haute compétence de leurs auteurs donne une grande auto-
rité à ces suppositions. Mais, en somme, la part était encore trop
largement faite aux pures hypothèses, et bien des points, on pour-
rait dire presque tous, offraient prise à la discussion. Ainsi le tableau
cité dans le testament de 1413 n’a jamais été identifié. Pour le Saint
Antoine de Copenhague, pour le Calvaire et le Jugement dernier
de Pétersbourg, l’époque réelle de leur exécution demeure contestée.
Quant à la date approximative de 1410 pour les Trois Marie au
Sépulcre, elle ne repose, en réalité, que sur une question de senti-
ment et d’appréciation personnelle. Or, sur un pareil terrain, il est
loisible à chacun d’avoir son jugement individuel et de ne pas
penser comme le voisin. Tout ce qui peut être établi relativement à
l’histoire du tableau des Trois Maine, c’est qu’il a appartenu à un
certain moment à Philippe de Commines, fin amateur d'art, qui y a
fait ajouter ses armoiries en surcharge, dans l’angle inférieur de
droite. Ceci n’apporte assurément aucune lumière sur le point de
savoir si la peinture est plus ancienne que 1426.
Pour enlever aux théories proposées leur caractère hypothétique,
pour leur donner enfin une base solide, il faudrait trouver un mo-
nument d’art se rattachant indiscutablement, par son style et toutes
ses particularités, au même groupe que les tableaux dans lesquels
on a proposé de reconnaître des œuvres remontant à la période de
début des van Eyck, et qui possédât par lui-même ce précieux
élément, vainement cherché jusqu’ici, d’une date précise.
Ce monument d’art, je crois avoir eu la bonne fortune de le dé-
couvrir.
En 1884, dans ses articles si remarqués de la Gazette des Beaux-
Arts sur Les Livres d'heures du duc de Berry2, l’illustre érudit
M. Léopold Delisle avait révélé l’existence à la bibliothèque de
l’Université, devenue depuis Bibliothèque nationale de Turin, d’un
manuscrit venant du duc de Berry, que lui avaient signalé M. Paul
Meyer, directeur de l’Ecole des Chartes et le regretté M. Castan,
et auquel il attacha le nom désormais consacré d’Heures de Turin.
Dès 1887, j’eus occasion d’aller voir le manuscrit du duc de Berry
à la Bibliothèque de Turin, où je fus reçu avec cette courtoisie qui
y est de tradition et que j’ai retrouvée depuis, plus parfaite encore,
U Kaemmerer, op. eit., p. 42 et 43.
2. Gazette des Beaux-Arts, 2e pér., t. XXIX, p. 97, 281 et 391.
i
11
déjà cité par M. Weale, puis sur le Calvaire et le Jugement dernier
du musée de l’Ermitage, à PétersbourgL
La haute compétence de leurs auteurs donne une grande auto-
rité à ces suppositions. Mais, en somme, la part était encore trop
largement faite aux pures hypothèses, et bien des points, on pour-
rait dire presque tous, offraient prise à la discussion. Ainsi le tableau
cité dans le testament de 1413 n’a jamais été identifié. Pour le Saint
Antoine de Copenhague, pour le Calvaire et le Jugement dernier
de Pétersbourg, l’époque réelle de leur exécution demeure contestée.
Quant à la date approximative de 1410 pour les Trois Marie au
Sépulcre, elle ne repose, en réalité, que sur une question de senti-
ment et d’appréciation personnelle. Or, sur un pareil terrain, il est
loisible à chacun d’avoir son jugement individuel et de ne pas
penser comme le voisin. Tout ce qui peut être établi relativement à
l’histoire du tableau des Trois Maine, c’est qu’il a appartenu à un
certain moment à Philippe de Commines, fin amateur d'art, qui y a
fait ajouter ses armoiries en surcharge, dans l’angle inférieur de
droite. Ceci n’apporte assurément aucune lumière sur le point de
savoir si la peinture est plus ancienne que 1426.
Pour enlever aux théories proposées leur caractère hypothétique,
pour leur donner enfin une base solide, il faudrait trouver un mo-
nument d’art se rattachant indiscutablement, par son style et toutes
ses particularités, au même groupe que les tableaux dans lesquels
on a proposé de reconnaître des œuvres remontant à la période de
début des van Eyck, et qui possédât par lui-même ce précieux
élément, vainement cherché jusqu’ici, d’une date précise.
Ce monument d’art, je crois avoir eu la bonne fortune de le dé-
couvrir.
En 1884, dans ses articles si remarqués de la Gazette des Beaux-
Arts sur Les Livres d'heures du duc de Berry2, l’illustre érudit
M. Léopold Delisle avait révélé l’existence à la bibliothèque de
l’Université, devenue depuis Bibliothèque nationale de Turin, d’un
manuscrit venant du duc de Berry, que lui avaient signalé M. Paul
Meyer, directeur de l’Ecole des Chartes et le regretté M. Castan,
et auquel il attacha le nom désormais consacré d’Heures de Turin.
Dès 1887, j’eus occasion d’aller voir le manuscrit du duc de Berry
à la Bibliothèque de Turin, où je fus reçu avec cette courtoisie qui
y est de tradition et que j’ai retrouvée depuis, plus parfaite encore,
U Kaemmerer, op. eit., p. 42 et 43.
2. Gazette des Beaux-Arts, 2e pér., t. XXIX, p. 97, 281 et 391.
i