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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 29.1903

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https://doi.org/10.11588/diglit.24811#0090

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

d’œuvre ; il ne voulait pas une sorte d’histoire par les héros qui donnât, avec
l’impression de sommets isolés, l’illusion de miracles intermittents. Préoccupé
de répondre au besoin de vérité qui caractérise notre temps, de se conformer aux
méthodes éprouvées de la science, il entendait, en rétablissant les intermédiaires,
faire sentir la continuité de la vie, dont chaque progrès réel, original, libre en un
sens, le plus souvent est préparé par un effort antérieur qu'il continue, qu’il
achève, dont il semble donner le sens véritable. Mais, dans un espace avarement
mesuré, comment réunir un nombre d’œuvres suffisant, sans sacrifier l’art à la
science? Il fallut adopter « un compromis entre l’exposition historique et le grou-
pement des chefs-d’œuvre ».

En faisant appel aux musées de province, en remettant en lumière certains
artistes méconnus, M. Roger Marx non seulement faisait acte de justice, prouvait
que l’école française a plus de richesses qu’on ne le soupçonne, donnait aux
curieux d’art l'occasion de surprises et de découvertes joyeuses, mais encore il
justifiait et confirmait la pensée qui avait présidé à ses choix. Il montrait que
l’art, pas plus que la nature, ne se modifie brusquement, que les choses commen-
cent bien avant qu’on ne s’en aperçoive, que les artistes acclamés presque tou-
jours ont des précurseurs oubliés. N’est-ce pas l’intérêt et le sens des expositions
rétrospectives que « de découvrir les anneaux inaperçus de la chaîne, de montrer
comment tout se lie, tout se tient et tout s’explique? » Ici, entendons bien la
pensée de l’auteur; il ne nie pas l’originalité, il l’étend, il la multiplie, si j’ose
dire, il la découvre où on ne la voit pas; il en discerne des degrés et des nuances
qui rapprochent les extrêmes apparents. Plus encore que dans la vie, dans l'art
qui en est la forme la plus haute, l'invention est au principe de toute beauté
nouvelle, mais annoncée, préparée, reliée à l’effort collectif, dont elle n'est
qu'un moment heureux.

Rapprochées, les œuvres s’éclairent l’une l’autre : des analogies inattendues
se découvrent. Les prétendus révolutionnaires qui à leur heure ont indigné les
Académies, gardiennes de la paix esthétique, rentrent dans la tradition, y pren-
nent leur place. Les jeunes gens sont avertis que la vraie originalité n’est jamais
artifice, déguisement, grimace, que toujours elle est l’expression libre, mais sin-
cère, d’une personnalité qui dans sa richesse et sa fécondité porte le trésor des
acquisitions antérieures.

Dans le livre où il résume les observations et la philosophie qui ont présidé
à son organisation de la Cenlenuale, M. Roger Marx ne se lasse pas de montrer les
parentés, les réconciliations, les synthèses heureuses, les antécédents ignorés
des formes d’art qu’on résume dans un nom par besoin de simplifier. Le ro-
mantisme peut être pressenti dès le xvine siècle; le naturalisme commence dans
les portraits de l’homme qu'on donne pour le représentant attitré de l’art aca-
démique, d’Ingres, de ce « caractériste » passionné, dont Je portrait de Mme de
Senonnes, admirable entre tous, pose le problème troublant de l'ame charmante
et singulière qui a mêlé et accordé les contraires dans la construction de la forme
visible qu'elle s’est donnée. Ingres et Delacroix, qne leurs partisans opposent,
sont réconciliés dans Th. Chassérian et, par l’influence de Chassériau, se
retrouvent unis dans Puvis de Chavannes. L'impressionnisme, qui renouvelle le
paysage par l’amour et l’intelligence de la lumière, et dans ce besoin même
d'intensité trouve la technique nouvelle qui pour exalter le ton le divise, n’est
 
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