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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
même série, le Service funèbre du fragment de la Bibliotcca Trivul-
ziana, on retrouve les mêmes lions écartelés de Hollande et de
Hainaut sur les écussons qui décorent le catafalque ; et, dans les cas
pareils, les écussons du catafalque indiquent toujours le propriétaire
du livre.
Etant donné qu’il s’agit d’un manuscrit que le duc Jean de
Berry possédait encore entre 1404 et 1413, l’idée s’impose de songer
au dernier prince de la maison de Bavière qui' ait été légitimement
comte de Hollande et de Hainaut, Guillaume IV, lequel avait suc-
cédé à son père en 1404, et mourut le 31 mai 1417, en ne laissant-
qu’une fille, la fameuse Jacqueline de Bavière, trop célèbre par ses
aventures conjugales.
Je sais bien que le comte Guillaume IV eut un frère puîné, Jean
de Bavière, évêque de Liège, que l’histoire a flétri du surnom de
Jean sans Pitié, mort à son tour le 5 janvier 1425, le dernier mâle
de sa race, et qui, au décès de son frère, éleva des prétentions à son
héritage. Je sais aussi qu’il était naturel d’être influencé, dans le cas
présent, par ce souvenir, que le terrible évêque de Liège a été le pre-
mier protecteur connu de Jean van Eyck. D’ailleurs, quand il s’agi-
rait de lui, à la rigueur, les conclusions de notre travail, tout en
étant légèrement modifiées, ne se trouveraient pas changées sur le
point capital. Nos miniatures, en effet, ne pourraient en aucun cas
descendre, comme date, plus bas que le moment de la mort de Jean
de Bavière, c’est-à-dire le commencement de 1425. Elles resteraient
donc toujours sensiblement antérieures à ce jour du 18 septembre
1426 qui fut le jour du trépas de Hubert van Eyck.
Mais j’estime qu’il y a lieu de penser bien plutôt au frère aîné de
l’évêque de Liège, au comte Guillaume IV.
En effet, avec l’évêque de Liège, on ne comprendrait pas quelle
est, dans la miniature que nous venons de décri re, cette jeune femme
qui vient à la rencontre du prince à cheval. S’il s’agit, au contraire,
de Guillaume IV, nous reconnaissons tout naturellement en elle la
tille chérie, l’héritière souhaitée du comte, Jacqueline de Bavière.
Il existe au musée de Copenhague un très curieux portrait de cette
Jacqueline de Bavière. Quoique, dans cette effigie, la fille de Guil-
laume IV paraisse avoir un âge sensiblement plus avancé, le portrait
de Copenhague n’a rien qui ne puisse cadrer avec la figurine de la
miniature k
l. Pour une reproduction du portrait en question, voir Ivaemmerer, op. cit.,
p. 47. Ajoutons, à titre d’indication dont on pourrait peut-être aussi tirer un
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même série, le Service funèbre du fragment de la Bibliotcca Trivul-
ziana, on retrouve les mêmes lions écartelés de Hollande et de
Hainaut sur les écussons qui décorent le catafalque ; et, dans les cas
pareils, les écussons du catafalque indiquent toujours le propriétaire
du livre.
Etant donné qu’il s’agit d’un manuscrit que le duc Jean de
Berry possédait encore entre 1404 et 1413, l’idée s’impose de songer
au dernier prince de la maison de Bavière qui' ait été légitimement
comte de Hollande et de Hainaut, Guillaume IV, lequel avait suc-
cédé à son père en 1404, et mourut le 31 mai 1417, en ne laissant-
qu’une fille, la fameuse Jacqueline de Bavière, trop célèbre par ses
aventures conjugales.
Je sais bien que le comte Guillaume IV eut un frère puîné, Jean
de Bavière, évêque de Liège, que l’histoire a flétri du surnom de
Jean sans Pitié, mort à son tour le 5 janvier 1425, le dernier mâle
de sa race, et qui, au décès de son frère, éleva des prétentions à son
héritage. Je sais aussi qu’il était naturel d’être influencé, dans le cas
présent, par ce souvenir, que le terrible évêque de Liège a été le pre-
mier protecteur connu de Jean van Eyck. D’ailleurs, quand il s’agi-
rait de lui, à la rigueur, les conclusions de notre travail, tout en
étant légèrement modifiées, ne se trouveraient pas changées sur le
point capital. Nos miniatures, en effet, ne pourraient en aucun cas
descendre, comme date, plus bas que le moment de la mort de Jean
de Bavière, c’est-à-dire le commencement de 1425. Elles resteraient
donc toujours sensiblement antérieures à ce jour du 18 septembre
1426 qui fut le jour du trépas de Hubert van Eyck.
Mais j’estime qu’il y a lieu de penser bien plutôt au frère aîné de
l’évêque de Liège, au comte Guillaume IV.
En effet, avec l’évêque de Liège, on ne comprendrait pas quelle
est, dans la miniature que nous venons de décri re, cette jeune femme
qui vient à la rencontre du prince à cheval. S’il s’agit, au contraire,
de Guillaume IV, nous reconnaissons tout naturellement en elle la
tille chérie, l’héritière souhaitée du comte, Jacqueline de Bavière.
Il existe au musée de Copenhague un très curieux portrait de cette
Jacqueline de Bavière. Quoique, dans cette effigie, la fille de Guil-
laume IV paraisse avoir un âge sensiblement plus avancé, le portrait
de Copenhague n’a rien qui ne puisse cadrer avec la figurine de la
miniature k
l. Pour une reproduction du portrait en question, voir Ivaemmerer, op. cit.,
p. 47. Ajoutons, à titre d’indication dont on pourrait peut-être aussi tirer un