DOI Heft:
Nr. 3
DOI Artikel:Gruyer, Gustave: La collection Bonnart au Musée de Bayonne
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.24811#0216
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
encore, et la Porte d’Espagne permet d’aborder, en franchissant des
fossés remplis d’eau, les glacis gazonnés et les allées ombreuses qui
les avoisinent. Telles sont les curiosités que présentait jusqu’ici
la ville de Bayonne. Désormais, ce qui constituera son principal
attrait, c’est la précieuse collection d’œuvres d'art dont M. Léon
Bonnat vient de la mettre en possession.
M. Bonnat est né à Bayonne, et il a passé son enfance sur le
radieux coteau de Saint-Etienne, en face d’un incomparable pano-
rama, subissant, malgré son jeune âge, la fascination de l’éclatante
lumière des régions méridionales. En se montrant si libéral envers
sa ville natale, en se dépouillant ainsi de son vivant, il a, tout à la
fois, obéi à sa tendresse pour son pays et voulu, avec une rare
délicatesse de sentiments, acquitter une dette de reconnaissance.
C’est, en effet, grâce à la libéralité du conseil municipal, qui lui
alloua une pension pendant neuf ans, qu’il put continuer, à Paris
d’abord, à Borne ensuite, ses études de peintre. Il les avait commen-
cées à Madrid, où des revers de fortune avaient forcé sa famille à
s’expatrier, et où la vue des chefs-d’œuvre du musée avait éveillé
sa vocation d’artiste. Le modeste étudiant est devenu une des
gloires de l’école française. Aujourd’hui, il paie les intérêts de sa
pension. Personne ne sera tenté de trouver que ces intérêts sont
trop minimes. Le cadeau fait par M. Bonnat est un cadeau princier.
Il occupe tout le premier étage d’un monument que la ville a fait
construire exprès pour lui, en y réservant le second étage pour les
anciennes collections municipales, et c’est le nom de Musée Bonnat
qui est inscrit au front de l’édifice.
11 faut avoir visité le délicieux hôtel de la rue Bassano, qui fait
tant d’honneur à l'architecte M. Bernier, et que Chapu, Pu vis de
Chavanncs et Falguière ont contribué à embellir, pour savoir qu'à
côté du peintre il y a en M. Bonnat un collectionneur aussi pas-
sionné qu’éclairé. Que de choses exquises scs amis ont appréciées
chez lui ! Mais se doutaient-ils que le nombre en était assez grand
pour former ailleurs un musée, sans que l’atelier et les pièces con-
tiguës parussent appauvris? Ils n’en regretteront pas moins de ne
plus admirer à leur place ordinaire les objets transportés à Bayonne.
Toutefois, ils auront la consolation de les savoir grandement honorés
et de se dire qu’ils pourront encore les voir dans un beau pays, à
deux pas de Biarritz, de Saint-Jean-de-Luz, de Fontarabie, du Pas-
de-Roland, de Saint-Jean-Pied-de-Port et de tant d’autres endroits
attrayants.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
encore, et la Porte d’Espagne permet d’aborder, en franchissant des
fossés remplis d’eau, les glacis gazonnés et les allées ombreuses qui
les avoisinent. Telles sont les curiosités que présentait jusqu’ici
la ville de Bayonne. Désormais, ce qui constituera son principal
attrait, c’est la précieuse collection d’œuvres d'art dont M. Léon
Bonnat vient de la mettre en possession.
M. Bonnat est né à Bayonne, et il a passé son enfance sur le
radieux coteau de Saint-Etienne, en face d’un incomparable pano-
rama, subissant, malgré son jeune âge, la fascination de l’éclatante
lumière des régions méridionales. En se montrant si libéral envers
sa ville natale, en se dépouillant ainsi de son vivant, il a, tout à la
fois, obéi à sa tendresse pour son pays et voulu, avec une rare
délicatesse de sentiments, acquitter une dette de reconnaissance.
C’est, en effet, grâce à la libéralité du conseil municipal, qui lui
alloua une pension pendant neuf ans, qu’il put continuer, à Paris
d’abord, à Borne ensuite, ses études de peintre. Il les avait commen-
cées à Madrid, où des revers de fortune avaient forcé sa famille à
s’expatrier, et où la vue des chefs-d’œuvre du musée avait éveillé
sa vocation d’artiste. Le modeste étudiant est devenu une des
gloires de l’école française. Aujourd’hui, il paie les intérêts de sa
pension. Personne ne sera tenté de trouver que ces intérêts sont
trop minimes. Le cadeau fait par M. Bonnat est un cadeau princier.
Il occupe tout le premier étage d’un monument que la ville a fait
construire exprès pour lui, en y réservant le second étage pour les
anciennes collections municipales, et c’est le nom de Musée Bonnat
qui est inscrit au front de l’édifice.
11 faut avoir visité le délicieux hôtel de la rue Bassano, qui fait
tant d’honneur à l'architecte M. Bernier, et que Chapu, Pu vis de
Chavanncs et Falguière ont contribué à embellir, pour savoir qu'à
côté du peintre il y a en M. Bonnat un collectionneur aussi pas-
sionné qu’éclairé. Que de choses exquises scs amis ont appréciées
chez lui ! Mais se doutaient-ils que le nombre en était assez grand
pour former ailleurs un musée, sans que l’atelier et les pièces con-
tiguës parussent appauvris? Ils n’en regretteront pas moins de ne
plus admirer à leur place ordinaire les objets transportés à Bayonne.
Toutefois, ils auront la consolation de les savoir grandement honorés
et de se dire qu’ils pourront encore les voir dans un beau pays, à
deux pas de Biarritz, de Saint-Jean-de-Luz, de Fontarabie, du Pas-
de-Roland, de Saint-Jean-Pied-de-Port et de tant d’autres endroits
attrayants.