GAZETTE DES BEAUX-ARTS
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Que de délicatesse dans le dessin du front, du nez, de la bouche et
du menton! Quelle souplesse et quelle suavité dans le modelé!
Quelle candeur exquise dans l’expression! Un cadre ravissant fait
merveilleusement valoir ce délicieux dessin. Ce cadre se termine
par un fronton à l’intérieur duquel est peinte en demi-figure, au
milieu d’un ciel bleu parsemé d’étoiles d’or, sainte Véronique mon-
trant la tête du Christ imprimée sur son voile.
Si les dessins des écoles flamandes et hollandaises sont en petit
nombre, quelques-uns se recommandent du moins par leur excel-
lence. Tel est le portrait, si plein de caractère, d'Antoine Cornelissen
par van Dyck, portrait que l’auteur lui-même a reproduit dans
une de ses gravures à l’eau-forte. Tel est aussi le dessin où Rem-
brandt a représenté un homme priant devant un crucifix auprès
d’un malade couché dans un grand lit à rideaux. Tel est enfin un
magistral Portrait cl'homnie exécuté par Durer en loi8.
Parmi les dessins de l’école française figure un des plus beaux
paysages de Claude Lorrain, exécuté à la plume et lavé de bistre. On
le croirait d’hier, tant il est bien conservé. Rien de plus grandiose
et de plus lumineux. On a devant les yeux des arbres imposants,
une rivière, une vaste étendue de terrains mouvementés, un ciel
animé par les nuages et où s’ébattent des oiseaux. Que de poésie
répandue sur cette feuille de papier ! La poésie abonde aussi dans
un grand paysage au fusain, inspiré à Corot par une nature très
simple. Tout autre est l’aspect d’un paysage à la sépia, avec quel-
ques rehauts de blanc, par Decamps. Il nous transporte en Orient.
D’un plateau très vaste, très accidenté, très lumineux, où des
troupeaux sont disséminés, les regards passent à des montagnes qui
ferment l’horizon. Le ciel lui-même est plein d’éclat avec ses nuages
ensoleillés. C’est un dessin d’une rare beauté. Dans un genre plus
humble, Brascassat montre un talent supérieur et un vif sentiment
de la vérité avec ses deux Taureaux roux, tachetés de blanc, l’un
broutant, l’autre baissant la tète d’un air farouche. Ileim, Géri-
cault, Delacroix, Marilhat, Gaillard, Baudry, Barye tiennent digne-
ment aussi leur place et sont représentés par des dessins ou par des
aquarelles en rapport avec leur réputation1...
U Quatorze aquarelles de Barye, d’une couleur très riche, quoiqu’un peu
lourde, montrent que l’auteur de tant de bronzes admirables était aussi un
peintre de grand mérite. Les animaux y vivent dans des paysages merveilleu-
sement appropriés au caractère de chacun d’eux et ayant quelque chose de
dramatique. Voyez, par exemple, cet arbre énorme et contourné, qui fait corps
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Que de délicatesse dans le dessin du front, du nez, de la bouche et
du menton! Quelle souplesse et quelle suavité dans le modelé!
Quelle candeur exquise dans l’expression! Un cadre ravissant fait
merveilleusement valoir ce délicieux dessin. Ce cadre se termine
par un fronton à l’intérieur duquel est peinte en demi-figure, au
milieu d’un ciel bleu parsemé d’étoiles d’or, sainte Véronique mon-
trant la tête du Christ imprimée sur son voile.
Si les dessins des écoles flamandes et hollandaises sont en petit
nombre, quelques-uns se recommandent du moins par leur excel-
lence. Tel est le portrait, si plein de caractère, d'Antoine Cornelissen
par van Dyck, portrait que l’auteur lui-même a reproduit dans
une de ses gravures à l’eau-forte. Tel est aussi le dessin où Rem-
brandt a représenté un homme priant devant un crucifix auprès
d’un malade couché dans un grand lit à rideaux. Tel est enfin un
magistral Portrait cl'homnie exécuté par Durer en loi8.
Parmi les dessins de l’école française figure un des plus beaux
paysages de Claude Lorrain, exécuté à la plume et lavé de bistre. On
le croirait d’hier, tant il est bien conservé. Rien de plus grandiose
et de plus lumineux. On a devant les yeux des arbres imposants,
une rivière, une vaste étendue de terrains mouvementés, un ciel
animé par les nuages et où s’ébattent des oiseaux. Que de poésie
répandue sur cette feuille de papier ! La poésie abonde aussi dans
un grand paysage au fusain, inspiré à Corot par une nature très
simple. Tout autre est l’aspect d’un paysage à la sépia, avec quel-
ques rehauts de blanc, par Decamps. Il nous transporte en Orient.
D’un plateau très vaste, très accidenté, très lumineux, où des
troupeaux sont disséminés, les regards passent à des montagnes qui
ferment l’horizon. Le ciel lui-même est plein d’éclat avec ses nuages
ensoleillés. C’est un dessin d’une rare beauté. Dans un genre plus
humble, Brascassat montre un talent supérieur et un vif sentiment
de la vérité avec ses deux Taureaux roux, tachetés de blanc, l’un
broutant, l’autre baissant la tète d’un air farouche. Ileim, Géri-
cault, Delacroix, Marilhat, Gaillard, Baudry, Barye tiennent digne-
ment aussi leur place et sont représentés par des dessins ou par des
aquarelles en rapport avec leur réputation1...
U Quatorze aquarelles de Barye, d’une couleur très riche, quoiqu’un peu
lourde, montrent que l’auteur de tant de bronzes admirables était aussi un
peintre de grand mérite. Les animaux y vivent dans des paysages merveilleu-
sement appropriés au caractère de chacun d’eux et ayant quelque chose de
dramatique. Voyez, par exemple, cet arbre énorme et contourné, qui fait corps