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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
c’est Chardin qui m’y amène — de probes et sincères artistes qui ne
s’embarrassent pas de chercher des sujets, mais les prennent devant
eux, autour d’eux, chez eux, chez leurs amis, dan s les grandes demeures
du passé. Iis ne peuplent même pas toujours leurs tableaux de figures
humaines. Ils se contentent d’éveiller en nous de bonnes et belles
associations d’idées. M. Moreau-Nélaton, tendre et mélancolique co-
loriste, nous promène parfois dans des chambres d’enfants désertes,
LA TABLE, BAR M. LE SID ANE R
(Société Nationale des Beaux-Arts.)
parmi les petits lits et les jouets répandus sur les tapis. M. Le Sida-
ner, dans une couleur toujours brumeuse et légère, met le couvert
sur une nappe blanche, dans un jardin, un soir d’été. M. Lobre,
habile et ingénieux évocateur des royautés d’autrefois, fait resplen-
dir les marbres, les cristaux et les dorures de Versailles en leur
grandiose et taciturne splendeur : je n’oublierai pas la petite Infante
en robe bleue, dans son cadre doré, au-dessus d’une gracieuse con-
sole. Enfin, c’est M. Walter Gay, ce charmeur, peintre au pinceau
libre et doux, poète des vieilles maisons françaises, des intérieurs
des châteaux d’autrefois. Il sait jeter, par les fenêtres ouvertes, un
regard sur les parterres, les statues et les canaux. Mais il goûte sur-
tout l’intimité des demeures : un lit, une cheminée, une chaise, tout
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
c’est Chardin qui m’y amène — de probes et sincères artistes qui ne
s’embarrassent pas de chercher des sujets, mais les prennent devant
eux, autour d’eux, chez eux, chez leurs amis, dan s les grandes demeures
du passé. Iis ne peuplent même pas toujours leurs tableaux de figures
humaines. Ils se contentent d’éveiller en nous de bonnes et belles
associations d’idées. M. Moreau-Nélaton, tendre et mélancolique co-
loriste, nous promène parfois dans des chambres d’enfants désertes,
LA TABLE, BAR M. LE SID ANE R
(Société Nationale des Beaux-Arts.)
parmi les petits lits et les jouets répandus sur les tapis. M. Le Sida-
ner, dans une couleur toujours brumeuse et légère, met le couvert
sur une nappe blanche, dans un jardin, un soir d’été. M. Lobre,
habile et ingénieux évocateur des royautés d’autrefois, fait resplen-
dir les marbres, les cristaux et les dorures de Versailles en leur
grandiose et taciturne splendeur : je n’oublierai pas la petite Infante
en robe bleue, dans son cadre doré, au-dessus d’une gracieuse con-
sole. Enfin, c’est M. Walter Gay, ce charmeur, peintre au pinceau
libre et doux, poète des vieilles maisons françaises, des intérieurs
des châteaux d’autrefois. Il sait jeter, par les fenêtres ouvertes, un
regard sur les parterres, les statues et les canaux. Mais il goûte sur-
tout l’intimité des demeures : un lit, une cheminée, une chaise, tout