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troduisît aucune autre matière ; et le réseau
de poutres demeure visible en dehors. Cette
demeure atteint les frontières de l’empire
russe, de l’Italie, se retrouve dans tous les
endroits où séjourne la race teutonne. Mais
elle n’a pu traverser le Rhin. Ce n’est donc
pas l’Allemagne qui a rayonné sur la Flandre;
c'est la Flandre qui a envahi une portion du
territoire germanique. Tant qu’il n’a pas ren-
contré un fleuve pour lui barrer le chemin ,
le génie flamand a vaincu et subjugué l’esprit
teutonique. Pourquoi l’art de peindre eût-il
suivi une autre marche? Pourquoi l’inspira-
tion flamande ne serait-elle pas venue planter
au bord du Rhin, comme la civilisation des
Pays-Bas y a transporté son architecture, ses
goûts, ses idées et ses coutumes?

» Il serait inutile d’insister davantage sur
les prétentions allemandes, prétentions que
rien ne justifie. La peinture ne s’est dévelop-
pée, n’a pris de l’importance à Cologne que
vers le milieu du quinzième siècle (1) et bien
loin de montrer la roule aux'peintres fla-
mands, elle les imita presque aussitôt. Sa
manière de travailler ne lui était point parti-
culière : elle continuait à suivre la méthode,
à reproduire les agencements, les données,
le goût de dessin, les draperies, les tons de
couleur usités en Belgique pendant le quator-
zième siècle. Ses types seuls ont quelque ori-
ginalité. Parmi les tableaux qu’on lui attri-
bue, s’il en est d’antérieurs aux Van Eyck,
on ne peut le prouver, et si l’on parvenait à
fixer leur date, il faudrait constater qu’ils
sont allemands, car un bon nombre pour-
raient avoir été transportés de Belgique sur
les bords du Rhin. Tant que ce travail d’élu-
cidation ne sera pas accompli (et nous le re-
gardons comme impossible), on a le droit
de soutenir que les Pays-Bas n’ont jamais
travaillé sous là tutelle de l’Allemagne, que
celle-ci n’a jamais pu leur rien apprendre,
qu’elle a, au contraire, tout appris d’eux. »
Alfred Michiels.

ÏM O T I C E

SUR UN TABLEAU PEINT

par HUBERT VAN EYGK

et faisant partie de la collection de tableaux de
M. de Suermondt à Aix-la-Chapelle.

Ce tableau peint sur bois de chêne, mesure
67 centimètres de hauteur sur 41 de largeur,
et représente la Vierge au milieu d’un ravi-
sant jardin planté de rosiers, d’orangers, de
cyprès et de palmiers. Elle est debout et
porte dans ses bras l’enfant Jésus qui tient de

(0 Tous les tableaux primitifs des peintres allemand^
qu on voit à Munich datent de cette époque.

la main gauche une rose avec ses épines,
symbole qu’il semble vouloir dérober à la
vue de sa mère. Elle est vêtue d’une tunique
bleue et d’un vaste manteau rouge brun cha-
toyant qui lui descend jusqu’aux pieds. Sa
tête, presque vue de face, se penche légère-
ment contre celle de son divin fils. A sa droite
on voit jaillir une fontaine de construction
byzantine, et à sa gauche se trouve un banc
sur lequel est posé un livre richement relié et
en partie recouvert d’un étui en velours noir,
liseré de broderies d’or et d’une frange gar^
nie de perles fines.

Après avoir étudié de nouveau avec la plug
sérieuse attention cet intéressant et rare ta-
bleau, nous nous sommes plus que jamais
trouvé affirmé dans l’opinion que nous avions
déjà formellement émise à son sujet il y a
quelques années, non-seulement quant au
mérite de cette production, mais encore
quant à l’artiste de qui elle émane. Nous l’a-
vions attribuée à Hubert Van Eyck et nous
croyons encore qu’elle est de ce maître et non
pas de Jean Van Eyck, son frère, à qui l’é-
rudit professeur Waagen en fait honneur.

Hubert Van Eyck naquit vers 1366 (?) et
mourut en 1426.

Son frère Jean décéda en 1445, quatorze
ans après la mort de son aîné.

Bien que les dates de mort soient parfai-
tement connues de tout le monde, nous
croyons cependant devoir les rappeler afin
de nous en servir pour étayer l’opinion que
nous allons formuler sur le tableau de M. de
Suermondt.

On sait qu’en 1428, c’est-à-dire deux ans
après la mort d’Hubert, Jean fut attaché à
l’ambassade que le duc de Bourgogne, Phi-
lippe le Bon, envoya en Portugal pour aller
demander au roi Jean 1er, la main de sa fille
Isabelle. Il n’y a pas de doute que l’aspect de
la nature méridionale, si riche, si rayonnante,
si essentiellement différente de celle du Nord,
n’ait vivement impressionné l’imagination
poétique du peintre. En effet, lorsque, après
son retour en Belgique, il termina le retable
de l’Agneau mystique qui orne l’église du
saint Bavon à Gand et qui était resté inachevé
à la mort d’Hubert, il se plut à introduire
dans ce chef-d’œuvre de l’art chrétien de vi-
sibles réminiscences de la végétation et des
j sites qu’il avait été à même de voir dans le
j midi de l’Europe.

j Or, M. Waagen s’empare de cet argument
| pour attribuer notre tableau à Jean Van Eyck,

I en se fondant sur ce qu’Hubert, mort avant
le voyage fait par son frère, n’aurait pu in-
troduire dans son ouvrage la végétation mé-
ridionale au milieu de laquelle la Vierge de
M. de Suermondt se trouve placée; car il n’a-
vait jamais quitté Maeseyck où il naquit, ni

Bruges où il résida longtemps, ni Gand
où il mourut.

L’opinion de M. Waagen n’est donc fondée
que sur une simple conjecture et sur un fait
extérieur qui ne nous semble rien moins que
concluant. En effet, les frères Van Eyck
étaient de trop grands artistes pour qu’on
puisse douter un seul instant qu’ils aient
négligé de se tenir au courant des progrès
inaugurés et réalisés par la période qui pré-
céda la leur. Malgré le silence de l’histoire
de l’art, on ne peut raisonnablement suppo-
ser qu’aucun artiste avant eux, n’ait visité
l’Orient, surtout la Terre Sainte, et n’ait
essayé de reproduire, dans quelque œuvre
perdue pour nous postérité, la nature du sol
biblique; cette supposition estd’autant moins
permise que, de tous les pays de l’Europe qui
concoururent au mouvement des croisades,
la Belgique fut peut-être celui qui prit la part
la plus active à ces guerres, elle qui donna
à Jérusalem son premier roi latin et à Con-
stantinople son premier empereur. Hubert a
donc très bien pu s’inspirer des productions
des artistes, ses prédécesseurs, qui avaient
visité l’Orient, et faire ce qui se pratique de
nos jours sur une plus grande échelle.

C’est donc à regret que nous nous éloignons
de l’opinion émise, au sujet du tableau qui
nous occupe, par l’érudit M. Waagen, qui se
montre toujours si judicieux dans ses appré-
ciations et à qui nous avons eu plusieurs fois
l’occasion de rendre un éclatant hommage.

Dans notre écrit sur le caractère de l’école
flamande de peinture au XVe siècle (i), nous
ne croyons pas nous être trompé au sujet de
i la part que nous avons attribuée à chacun des
frères Van Eyck dans la composition du ré-
table de l’Agneau Mystique. C’est à Hubert
que nous avons rapporté, entre autres, les
deux volets qui représentent Adam et Eve et
qui ornent aujourd’hui le Musée royal de
Bruxelles, Les peintures qui émanent du
pinceau de ce maître se distinguent par une
force et une richesse de couleur auxquelles
son frère, plus essentiellement miniaturiste,
n’a pu atteindre. L’expression de ses têtes de
Madone, à figure plus allongée, ont un caractè-
re plus archaïque, tandis que celles qui sont
dues positivement à son frère inclinent déjà
plus ou moins vers le type néerlandais (2).

(1) Histoire de l'Ecole flamande de peinture au ATe
siècle. Mémoire couronné par l’Académie royale de Bel-
gique. I806.

(2) Dans le nouveau catalogue du Musée royal de
Belgique, M. Ed. Fétis a donné une notice étendue sur
la vie et les ouvrages des frères Van Eyck, et il prétend
que l’on ne connaît rien de positif sur les productions
d’Hubert, les deux artistes ayant toujours marché de
conserve dans leurs travaux, de sorte que tout point de

j comparaison nous fait défaut.
 
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