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— 131 —

M. Cermak. — La grande toile de cet artiste
est d'un ton gris peu flatteur et sans doute
conforme à la situation d'esprit des jeunes filles
enlevées par les Bachi-Bouzouks. Il faut tou-
tefois convenir que ces jeunes filles, aux corps
plus charmants que bien peints et aux traits
plus expressifs par leur dessin que par leur
coloris, ne sont pas très-profondément péné-
trées de l'horreur de leur situation. Nous di-
rons même que la préoccupation de leur ave-
nir les distrait plus qu'elle ne les terrifie.

Enfin, nous avouerons ne pas comprendre
qu'il ait fallu une toile si vaste pour un pareil
sujet. Les deux Bachi-Bouzouks sont de su-
perbes gredins, même celui si admirablement
campé à droite qui n'a cependant pour figure
qu'un masque couleur de carton. Celui de
gauche qui prépare son café est plus accentué.
Son ignoble figure et sa poitrine velue en font
une belle élude mais c'est tout. Le groupe des
deux jeunes filles debout manque de consis-
tance et de lumière, celui des autres jeunes
filles assises sur un rocher, ne provoque qu'un
intérêt secondaire. Le paysage du fond est
grandiose, mais, encore une fois, pourquoi
l'artiste a-t-il été si avare de lumière? A en
juger par son autre tableau où une jeune Mon-
ténégrine, aux yeux démesurément grands,
attend son préféré, nous croyons voir là un
parti pris dont il reviendra, nous l'espérons
et pour lui et pour nous. Que M. Cermak se
rappelle son splendide tableau de l'exposition
d'Anvers de 1861, qu'il compare sincère-
ment son succès d'alors avec celui d'aujour-
d'hui et peut-être se rendra-t-il à l'évidence.
Son grand tableau de Gand est pour nous un
pas en arrière. Deux études d'homme savam-
ment et largement peintes, c'est tout ce que
nous pouvons y voir de vraiment sérieux.

Le Rendez-vous de la Monténégrine frappe
par l'étrangeté d'une figure dont nous avons
déjà signalé l'énormité des yeux. L'analyse du
tableau nous montre un tronc d'arbre bizarre
et d'une rare minutie d'exécution, plus un
rocher d'un travail sec; ces deux acces-
soires sont indiqués à l'excès, tandis que le
personnage principal est d'une inconsistance
de modelé que le public blâmerait sévèrement
chez un autre que chez M. Cermak dont les
qualités le prédisposent à une indulgence re-
grettable.

Ce qui manque à l'élève de Gallait, c'est la
grande qualité de son maître : la réflexion.
Toute œuvre qui vise à la grandeur doit être
méditée. Les improvisations heureuses for-
ment l'exception et M. Cermak n'est pas en-
core de taille à négliger la règle.
M. Courbet.—Cet homme doit être pris com-
me il est: Fort coloriste, dessinateur iné-
gal, esprit sans aucune espèce de profondeur,
intelligence vive mais superficielle, praticien

de la tête aux pieds et prenant sa puissance
technique pour la puissance du génie, indis-
cutable, journalier, sensuel, parfois cynique,
orgueilleux de son faire, vaniteux de ce qu'il
appelle sa philosophie, au demeurant très
curieux à examiner comme représentant as-
sez bien dans l'art ce que notre siècle est dans
toutes les autres conditions morales et philo-
sophiques.

Le Salon de Gand a beaucoup de tableaux
de lui. Il y en a qu'on ne peut pas voir ; ceux-
là sont simplement ignobles et on se demande
ce que leur auteur a pensé des Gantois en les
leur envoyant. C'est tout au moius suspecter
leur dignité que de s'imaginer qu'ils n'ont
pas le respect d'eux-mêmes. Libre à M. Cour-
bet d'user de cette licence vis-à-vis de sa
propre personnalité.

Ceux que l'on peut voir sont cet admirable
portrait de l'artiste alors qu'il avait cette phy-
sionomie riante et heureuse à laquelle s'est
substitué, avec I âge, ce profil des empereurs
romains déformé par la retombée des chairs.
Oui, admirable portrait que celui-là où règne
une main de maître, et que nous sommes
d'autant plus heureux d'avoir encore pu con-
templer qu'il nous semble que cette perle se
ternit et pousse au noir.

Lnvoyante, autre superbe étude d'un grand
effet et d'un caractère puissant. Bien qu'un
peu grise, la couleur est étudiée, la profon-
deur du regard de cette voyante tient du ter-
rible; elle vous fascine et vous écrase. Quant
à la brosse c'est du Courbet, c'est tout dire,
mais du Courbet des meilleurs jours et non
de celui du portrait de Proudhon en famille,
pâle et triste page, sans intérêt aucun et d'un
vulgarisme à nul autre pareil.

La Dame aux bijoux, rousse opulente pour-
vue d'un bras impossible, le tout peint gran-
dement, mais avec un laisser-aller peut-être
affecté; c'est plus une étude d'artiste pour
l'atelier qu'une œuvre de Salon, où l'on exige
généralement certaines qualités d'aspect sus-
ceptibles d'être comprises par les masses.
Ce n'est pas nous qui réclamons contre l'exhi-
bition opportune de ce genre d'études, mais,
soyons de bon compte, la porte une fois ou-
verte à ce genre, le goût public au lieu d'être
éclairé sera faussé, il s'affolera de l'à peu
près et l'art ira à reculons. Il n'y a guères que
le véritable amateur et le critique qui puis-
sent éprouver à la vue de ces œuvres inache-
vées de réelles jouissances.

Il faut en dire tout autant de la Source de
la Loue et des Chevreuils à la rivière, très
jolis motifs, magistralement enlevés mais qui
ne sauraient être appréciés de la majorité du
public.

Quant aux Fleurs du même, malgré leur
incontestable valeur comme dessin, elles sont

fanées, flétries et sales. Si c'est là ce que M.
Courbet a voulu faire, nous avouerons qu'il y
a réussi peut-être même au delà de ses inten-
tions.

M. De Biefve. — La comtesse d'Egmont
nous est encore une fois revenue en compa-
gnie d'un Guillaume le Taciturne sur lequel
nous serons aussi taciturne que lui. La com-
tesse elle, a peu ou point changé; elle a tou-
jours assez grand air, son visage ne manque
pas d'expression, son costume de velours noir
est soigné, mais le tout est d'un effet mélodra-
matique agaçant, et puis franchement, après
tanl de d'Egmont, de veuves de d'Egmont,
d'AIbe, assasin d'Egmont, la Belgique a be-
soin de respirer un peu, ne fut-ce que pour
attendre convenablement le moment et l'heure
de Marnix de Sle Aldegonde.

MLafon.—Un jeune enfant en culottes cour»
tes, au visage peut-être trop d'un jeune hom-
me, est appuyé sur. une chaise près d'une
table où se trouve un homme endormi. L'hom-
me est le gardien de la prison, l'enfant froisse
un bonnet rouge dans sa main gauche; à ces
deux accessoires inévitables, on reconnaît
Louis XVII, lequel serait difficile à détermi-
ner sans cela.

Grande expression dans la figure, noblesse
dans le dessin , coloris frais, trop frais peut-
être, aspect général élégant et provocateur,
tels sont les éléments de succès de ce tableau
qui intéresse beaucoup et émeut convenable»
ment.

M. Aima Tadema.— Comment Claude devint
empereur. Beaucoup de vérité et de piquant,
soldats bien réussis; Claude également. C'est
à coup sûr une des productions les plus fran-
chement originales de l'auteur. — Lune de
miel. Couple pas beau mais peint soigneu-
sement dans la partie des étoffes surtout.
Leurs corps nous semblent bien gros et leurs
poses bien niaises; ne croyez-vous pas, M.
Aima Tadema, que celles-ci seraient plus en
situation avant la susdite lune ?

M. Smits. — Voici encore une belle brosse
s'annonçant avec une majesté qui a ému le
public. Evidemment M. Smits est un homme
qui se préoccupe assez peu du sujet, car cette
Marche des saisons n'est point heureuse com-
me composition. Il y a là des bizarreries qui
pourraient passer, dans le sens allégorique
adopté par l'auteur, pour des faiblesses que
ne toléreront jamais des juges de goût ou sim-
plement de bon sens. C'est ainsi que nous ne
comprenons point l'Automne vêtue à la mo-
derne et à la façon de nos plus vulgaires pay-
sannes au milieu d'amours voletant et d'attri-
buts qui jettent la pensée dans un monde tout
à fait idéal.

Quoi qu'il en soit, cette Marche des Saisons
avec ses négligences dans le dessin et ailleurs,
 
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