Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
— 132 —

force le public à s'arrêter et à se dire que
sur cette toile un véritable artiste a posé sa
griffe. Attendons encore, et le souffle inspi-
rateur qui anime M. Smits ne manquera pas
de lui faire faire quelque œuvre complète qui
nous transportera. Nous en avons pour garant
et les grandes toiles de l'artiste et ses études
de femme si remarquables.

M. Vanden Kerckhove. — La Madone et
Venfanl exposée par cet artiste est une des
choses recommandables du Salon. La Vierge
est vue jusqu'aux genoux, elle tient l'enfant à
sadroite, debout. La composition est simpleet
grande comme tout ce qui est simpleet grand,
l'expression des figures est calme, sincère,l'âme
y est. Il n'est pas possible de considérer long-
temps cette composition (à noire avis mal
exposée parceque le bureau de la commission
occupe la place du spectateur) sans se trouver
comme pénétré d'une douce flamme et d'un
sentiment dont on ne se rend pas compte. Ce
tableau est traité à la façon italienne, c'est à
dire que tout y est compris comme à l'état de
nature. Le coloris a partout sa valeur intrin-
sèque sans tour de force, sans oppositions
calculées, sans procédés. De haut en bas tout
a sa valeur, sa force, son but. Le coup de
brosseetson jeu n'ont pas le moins du monde
préocupé l'artiste. On trouve certains grands
maîtres italiens de qui M. V. D. K. s'est in-
spiré avec un véritable succès. L'œuvre est née
sous l'empire de cette volonté qui l'a conçue
dans son ensemble; l'artiste l'a rêvée ainsi, ni
plus ni moins, et il l'avait rêvée complète. Ceci
vient à l'appui de ce que nous disions plus
haut, à savoir que toute œuvre sérieuse doit
être méditée. Il est facile de voir, et c'est ce
qui place M. Vanden Kerckhove à part par-
mi nos artistes, qu'il est de l'école spiri-
tualiste et que sa main ne marche que quand
l'inspiration a terminé son œuvre. Qu'il se
garde bien desortir d'un système auquel nous
devons les vraies gloires de toutes les écoles
et dans lequel il puise si logiquement sa force
et son courage jusqu'au jour où il lui devra
sa popularité.

Il y a, anatomiquement parlant, de grandes
et solides qualités dans les Hébreux et Idolâ-
tres, mais l'auteur s'est fourvoyé dans un su-
jet qui aurait dû être traité plus en grand et
qui, pour aujourd'hui, est encore une massue
trop lourde pour ses mains.

M. Paternostre. — Cet artiste distingué qui
depuis une vingtaine d'années nous envoyait
de Paris de la peinture vigoureusement enle-
vée, mais généralement restreinte dans une
action peu compliquée, s'est jeté à corps perdu
dans un des sujets les plus vastes qu'il soit
possible à un artiste d'entreprendre.

Les Gaulois du Uainaut attaquent la légion
romaine campée à Mons. Tel est le redoutable

trait d'histoire qui a occupé l'artiste. Comme
disposition,son œuvre est d'un sentimentgrand
et juste; la ligne est belle et même savante.
Dans le groupe de gauche que domine Am-
biorix à l'allure très originale, on rencontre
d'excellentes créations qui ne sont pas le fait
du vulgaire. En ce qui concerne la pensée
qui a guidé M. Paternostre dans le choix de
son plan, nous croyons qu'il a été plus loin
qu'il ne fallait et qu'au lieu de peindre ce que
dit César, il a voulu nous le faire lire. C'est
ainsi qu'il a eu la prétention, très louable du
reste, de déterminer à la fois l'attaque, le
combat et la défaite. Ce sont là des tours de
force qui peuvent tenter des esprits généreux
et entreprenants, mais qui tournent rarement
à bien.

Il s'est opéré dans la manière de composer
et de peindre de M. Paternostre, une modifi-
cation assez notable et nous croyons trouver
dans sa nouvelle facture une réminiscence
de la manière de faire de certains maîtres ita-
liens; nous n'en voudrions pour preuve que
ce soldat à la fronde au côté droit du tableau,
dont l'accent et la tournure rappellent certaines
formules de l'école romaine. Rien de mieux
sans doute que ces voyages d'Italie qui for-
ment les yeux, le goût et la main, mais ce
doit être à la condition que l'originalité de
l'artiste résiste à ces études comparatives.

Nous avons hâte de voir M. Paternostre,
non pas répudier les impressions qu'il est
allé recevoir en Italie, mais les approprier à
des sujets plus en rapport avec la mâle dis-
tinction de son talent comme compositeur et
la sobriété austère de son exécution comme
peintre.

M. Soubre. — Jamais cet artiste n'a été
aussi poétique et aussi véritablement ému
que dans son Vendredi saint. Ce tableau est
plein de charme dans la composition et dans
l'exécution; déplus, M. Soubre a également
réussi dans l'expression très émue de chacun
de ses personnages. Comme coloriste, l'influ-
ence du gris ne domine pas notre artiste; il
faut le féliciter de ne pas tirer, comme tant
d'autres, cette ficelle harmonique, mais il faut
aussi le prémunir franchement contre des
tendances contraires.

M.De Coninck.—L'Epreuve.Carnation d'une
fraîcheur adorable, souplesse et grâce, des-
sin très pur, saufcelui de la jambe gauche qui
s'explique difficilement, sujet non-seulement
impossible à comprendre sans livret, mais im-
possible à rendre. On ne pouvait s'en tirer
sans commettre de faute, orl'auteura commis
celle de faire croire que l'épreuve condamnera
l'épouse et la mère. C'est là une conclusion
d'une grande audace que l'on pourrait peut-
être comprendre s'il s'agissait d'un fait histo-
rique avec noms connus, mais qui ici, dans

la donnée vague admise par l'auteur, soulève
dans l'âme du spectateur un vil dégoût; c'est
fâcheux, la pensée fait tort à l'œuvre.

M. Tydlgat. Pour ceux qui, comme nous,
entendons le devoir du critique autrement
que comme un besoin de montrer au public
les finesses d'un esprit subtil, les protondeurs
d'une science certaine ou les ressources d'une
prose ornée de toutes les parures de la
langue française, pour nous qui sommes à
l'affût de tout ce qui peut contribuer à l'enno-
blissement de notre école, à son progrès
chez nous et à sa popularité à l'étranger,
c'est une véritable fête que de découvrir, dans
la masse de nos débutants, quelque homme
nouveau qui se distingue de la foule et nous
arrive avec un signe sur le front. Arrêtons-
nous un instant devant un de ceux là : M.
Tydtgat.

Ce n'est pas que ce jeune homme soit ar-
rivé, loin de là, mais sa voie est tracée, sa
marche est ferme, sa volonté s'accentue de
plus en plus, d'œuvre en œuvre; il y a peu de
chose à lui dire, car on sent qu'il s'apprécie
et qu'il se connaît. Chose précieuse et rare
chez l'artiste débutant que ce sentiment de
sa force et de sa faiblesse, et cependant nous
la rencontrons bien caractérisée cette année
chez MM. Vanden Kerckhove et Tydlgat. L'un
et l'autre sont des hommes qui ont horreur
de l'ignorance et qui estiment que la pensée
est supérieure à la technique, cette science
splendide à la vérité lorsqu'elle accompagne
l'idée, mais qui ne produit le plus souvent que
des décorateurs là où la société réclame des
philosophes.

Le Christ au jardin des Oliviers est compris
et traité dans un ton mystérieux qui, pour
quelques-uns, touche par certains côtés au
mélodrame; toutefois cette scène de douleur
et de résignation intime est comprise noble-
ment et avec un sentiment juste. La gamme
des tons n'est point vulgaire, il y a mêmedans
cette partie des difficultés sérieuses vaincues
avec art.

Dans le Chemin du Golgotha, le souffle
de l'inspiration est manifeste. Il y a là, au
milieu de certaines inexpériences, des passa-
ges d'une réelle valeur, surtout comme ex-
pression. Le coloris vise un peu à l'effet.

Les Etudes de M. Tydtgat nous le montrent
plus coloriste que dessinateur, mais ce ne
sont que des éludes ; elles font bonne impres-
sion et nous confirment dans l'opinion que
nous avons de l'avenir de cet artiste gantois
dont nous suivrons les travaux avec une atten-
tion particulière. Ad. S.

(ha suite au prochain n').
 
Annotationen