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N° 4.

28 Février 1871.

Treizième Année.

JOURNAL DES BEAUX-ARTS

ET DE LA LITTÉRATURE

paraissant deux fois par mois, sons la direction de M. Ad. SU!ET, memke de l'Académie royale de Belgique, memlire correspondant de la Commission royale des monuments, membre de
l'Institut des provinces de France, de la Société française d'Archéologie, de l'Académie impériale de Reims, de l'Académie d’Archéologie de Madrid, etc.

On s’abonnera Anvers, chez TESSARO, éditeur ; à Bruxelles, chez DECQ et MTÎQUARDT ; à Gand, chez
HOSTE et ROGGÉ ; à Liège, chez DE SOER et DECQ ; dans les autres villes, chez tous les libraires. Pour l’Al-
lemagne, la Russie et l’Amérique : C. MUQUARDT. lia France : VeRENOUARD, Paris. Pour la Hollande :
MARTINUS NYHOFF, à la Haye. Pour l’Angleterre et l’Irlande : chezBARTHES et LO.WELL, 14, Great
Harlborough Street, à Londres. •— Prix d’abonnement s pour toute la Belgique, (port compris . —

Par an, 8 fr. —Étranger, (port compris). — Allemagne, 3 tlil 10 gr. — France, 11 fr. —Hollande, SU.—
Angleterre et Irlande, 8. s. 6 d. — i’> ix par numéro 40 c.— Réclames : 50 c. la ligne. — Pour les
grandes annonces on traite à forfait. — Annonces : 30 c. la ligne. — Pour tout ce qui regarde l’admini-
stration ou les annonces s’adresser à U. le Directeur du Journal des Beaux-Arts, rue du Casino, à
St-Nicolas. — Il pourra être rendu compte des ouvrages dont un exemplaire sera adressé à la rédaction.

Pour tout ce qui concerne la partie française s’adresser a M. J. J. GUIFFREY, rue d’Hauteville N° 1, a Paris.

M. C. Muquardt est le seul éditeur et représentant du Journal des Beaux-Arts pour VAllemagne, la Russie et l’Amérique.

SOMMAIRE : Belgique. Coït. part. Bruxelles.
—Art et Industrie (fin).— Commission royale des
monuments : Peintures murales à Hal ; le châ-
teau des Comtes, à Gand. — Charles de Bériot
(suite). — Mort du Bon de Gerlache. — Alle-
magne. Corr. part. Berlin. — Chronique géné-
rale. — Annonces.

BELGIQUE.

(<Correspondance particulière. )

Bruxelles.

L'art dramatique national. — Discours de M. Trap-
peniers à propos du temple des Auguslins. — Ex-
position.

L’art dramatique est une plante qui s’ac-
climate difficilement chez nous. Le Gouver-
nement l’a compris et c’est avec une sollici-
tude dont il faut lui savoir gré qu’il entoure
la frêle et délicate tige, des appuis les plus
solides et qu’il pourvoit à son existence par
les attentions les plus paternelles. Mais
qu’en arrivera-t-il, sinon autre chose que la
satisfaction du devoir accompli ? Ilélas !
voilà quarante ans que nous assistons à cette
œuvre de Sisyphe et chaque jour nous raf-
fermit dans cette conviction, que l’art dra-
matique national ne pourra jamais fleurir
dans notre pays tant que les matériaux qui
l’alimentent nous viendront de France tout
faits, et de telle façon, que les œuvres dra-
matiques jouées chez nous ne semblent être
que la suite des représentations faites à
Paris. Il serait oiseux de donner à cet égard
des preuves qui s’imposent d’elles-mêmes,
chaque jour,au moins clairvoyant ; il serait
non moins oiseux d’insister sur les causes,
lesquelles ont fait depuis longtemps le sujet
d’articles, même de volumes, émanés de la
plume d’écrivains belges profondément dé-
voués aux intérêts moraux de la patrie. Un
moyen infaillible de développer dans les
conditions naturelles l’art dramatique na-
tional,serait de prononcer la prohibition des
pièces françaises à nos frontières. Ce moyen
radical, il faut l’avouer, n’aurait aucune
chance d’être accueilli chez nous, quoique,
à le considérer avec attention, ce serait aussi
le moyen d’arriver à conserver intact le tré-
sor sacré de nos traditions nationales froissées
chaque jour, chaque heure, non-seulement
par l’expression de sentiments le plus sou-

vent hostiles au pays au fond et dans la
forme,mais par la mise en circulation d’idées
et d’influences qui amèneront tôt ou tard
des conséquences funestes.

Si l’on veut se convaincre impartialement
de l’état de choses imposé à la Belgique par
des circonstances dont nous ne sommes pas
les maîtres, que l’on veuille poser en regard
de la situation de l’art dramatique national
en langue française,cette même situation en
langue flamande.

Là, que voit-on ? de temps en temps une
comédie, un drame, un vaudeville, un opéra
représenté après des efforts inouïs de la
part de l’auteur et presque toujours par des
moyens eu dehors de ceux du droit commun,
enfin toujours aussi avec cette négligence,
ce mauvais vouloir que des étrangers et une
administration étrangère savent apporter à
l’exécution d’une mission remplie par eux
à contre cœur. Il est bien rare que l’œuvre
belge soit représentée plusieurs fois, c’est
connu. Elle disparaît du répertoire sans
bruit et l’on n’en parle plus. Nous admet-
tons très volontiers qu’elle ne soit pas à la
hauteur de ce que Paris nous envoie commu-
nément,mais on voudra bien remarquer qu’il
n’est pas fait, pour les pièces nationales, la
centième partie des efforts accomplis pour
la réussite de certaines pièces tellement
mauvaises, que rien que de les nommer la
rougeur vous monte au front. Et ces efforts
se perpétuent, et ces pièces restent pendant
des années au répertoire ! Voilà ce que peut
faire l’esprit national français transporté sur
notre terre par des auteurs français, puis
sur la scène par des acteurs et des direc-
teurs français et de là répandu comme un
poison dans le peuple.

Dans le théâtre national flamand, que
voyons-nous ? D’abord, dans presque toutes
les villes flamandes du royaume, un théâtre
spécial,quelquefois deux; à Anvers on élève
en ce moment un véritable temple à l’art
dramatique local. Partout, la foule se presse
dans ces théâtres et fait de véritables succès
aux pièces qui y sont jouées et qui, si elles
ne sont pas des modèles du goût le plus pur,

ont du moins le grand mérite de communi-
quer un souille national aux spectateurs. Le
plus souvent on y joue des pièces où un
développement extrême est donné au patrio-
tisme et à l’amour de la patrie, et ces soirs-
là, la salle est belle à voir dans son délire
et son enthousiasme qui, pour éclater en fla-
mand, n’en sont pas moins belges. L’art
dramatique a là ses auteurs, ses acteurs,son
administration, son public, tout un monde
cohésif qui vit d’une union parfaite et qui se
suffit. 11 y avait naguères, dans un des fau-
bourgs les plus populeux de Bruxelles, à
Molenbeeck-St-Jean, un théâtre où la foule,
deux fois par semaine, faisait rage. On y
jouait des pièces nationales , quelquefois
dos traductions et ces soirées étaient char-
mantes. Et pendant ce temps-là, la V e pari-
sienne attirait chez elle les Bruxellois lettrés,
les Bruxellois qui ont laissé passer le Billet cle
Marguerite sans y aller, osant donner pour
prétexte que c’était d’un Belge !

Les Flamands, il faut le reconnaître,don-
nent une leçon sévère de patriotisme à une
bonne partie de la nation, ils restent eux et
repoussent avec une énergie qui a quelque
chose de l’antique, tout ce qui ne se rappro-
che point de leur chère patrie. Simple et
admirable sentiment dont il est de bon goût
de ne pas s’apercevoir quand on n’en peut
pas rire hautement !

S’il fallait dresser ici la liste des pièces
belges jouées au théâtre flamand,un volume
n’y suffirait pas. Celles des pièces écrites et
jouées en français, fournirait quelques pages
seulement. Dans ce seul détail se révèle la
situation, et, malgré la bonne volonté du
Gouvernement, il est douteux que les choses
marchent jamais d’une autre manière. Le
public de la capitale, comme celui des pro-
vincesqui se rapprochent du sud est décidé-
ment façonné à l’art dramatique moderne
français. Aucune réaction n’est possible de
notre part, et, s’il faut attendre un change-
ment en bien, il devra avoir la même origine
quecelle d’où estvenu le mal.Puissedonc l’art
dramatique français avoir la vertu de la lan-
ce d’Achille et guérir les plaies qu’il a faites.
 
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