sur l'ennéade
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Ménès. Il offrait l'avantage de s'adapter aisément aux reli-
gions féodales, sans blesser la vanité des provinciaux. Les
théologiens de province remplacèrent Toumou-Râ, soit entier,
soit une seule de ses personnes, par le dieu local qu'ils procla-
mèrent souverain créateur et maître de l'ennéade : cela fait,
les autres dieux suivirent à la file, comme dans le prototype
héliopolitain. On les accueillait d'autant plus volontiers qu'ils
appartenaient au plus vieux fonds des croyances communes
à la nation, et qu'on les retrouvait presque tous sur les points
les plus éloignés du sol. Les gens de la Haute-Égypte avaient
par exemple le Shou de l'Anhouri-Shou de Thinis, le Sît
d'Ombos, du nome Hypsélite ou du nome Oxyrrhynchite,
l'Osiris de Cusse, l'Isis de Coptos. Ils leur avaient fait une
histoire très différente, sur bien des points, de celle qui
courait dans le Delta, mais le nom était le même et cela suf-
fisait. Les quelques localités qui échappèrent d'abord, s'il y en
eut, furent envahies à l'époque historique, et l'on ne trouve
plus., aux derniers temps, une seule religion féodale qui n'ait
son ennéade composée sur le modèle de l'ennéade héliopoli-
taine. Je ne dis pas ses ennéades formées sur le modèle des
ennêades héliopolitaines, car les monuments connus jusqu'à
présent ne permettent pas de rien affirmer à ce sujet. Que la
théorie des trois ennéades soit fort ancienne à Héliopolis, il
suffit, pour s'en convaincre, de jeter un regard sur les textes
des Pyramides où la compagnie des vingt-sept dieux est
citée à chaque instant. Mais les membres de la deuxième et
de la troisième ennéade, ceux de celle-là surtout, offraient
en général si peu d'intérêt et tenaient un rôle si restreint
dans le gouvernement du monde qu'on ne s'occupait guère
d'eux, même à Héliopolis. On prit donc l'habitude d'extraire
de la deuxième ennéade les quelques divinités qui y jouis-
saient de la notoriété publique, Harsiésis, Hâthor, Thot,
Anubis, et on les inscrivit â la suite de la première. On con-
tinua en leur faveur de mentionner la petite ennéade â côté
de la grande, mais sans jamais l'énumérer ou la figurer
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Ménès. Il offrait l'avantage de s'adapter aisément aux reli-
gions féodales, sans blesser la vanité des provinciaux. Les
théologiens de province remplacèrent Toumou-Râ, soit entier,
soit une seule de ses personnes, par le dieu local qu'ils procla-
mèrent souverain créateur et maître de l'ennéade : cela fait,
les autres dieux suivirent à la file, comme dans le prototype
héliopolitain. On les accueillait d'autant plus volontiers qu'ils
appartenaient au plus vieux fonds des croyances communes
à la nation, et qu'on les retrouvait presque tous sur les points
les plus éloignés du sol. Les gens de la Haute-Égypte avaient
par exemple le Shou de l'Anhouri-Shou de Thinis, le Sît
d'Ombos, du nome Hypsélite ou du nome Oxyrrhynchite,
l'Osiris de Cusse, l'Isis de Coptos. Ils leur avaient fait une
histoire très différente, sur bien des points, de celle qui
courait dans le Delta, mais le nom était le même et cela suf-
fisait. Les quelques localités qui échappèrent d'abord, s'il y en
eut, furent envahies à l'époque historique, et l'on ne trouve
plus., aux derniers temps, une seule religion féodale qui n'ait
son ennéade composée sur le modèle de l'ennéade héliopoli-
taine. Je ne dis pas ses ennéades formées sur le modèle des
ennêades héliopolitaines, car les monuments connus jusqu'à
présent ne permettent pas de rien affirmer à ce sujet. Que la
théorie des trois ennéades soit fort ancienne à Héliopolis, il
suffit, pour s'en convaincre, de jeter un regard sur les textes
des Pyramides où la compagnie des vingt-sept dieux est
citée à chaque instant. Mais les membres de la deuxième et
de la troisième ennéade, ceux de celle-là surtout, offraient
en général si peu d'intérêt et tenaient un rôle si restreint
dans le gouvernement du monde qu'on ne s'occupait guère
d'eux, même à Héliopolis. On prit donc l'habitude d'extraire
de la deuxième ennéade les quelques divinités qui y jouis-
saient de la notoriété publique, Harsiésis, Hâthor, Thot,
Anubis, et on les inscrivit â la suite de la première. On con-
tinua en leur faveur de mentionner la petite ennéade â côté
de la grande, mais sans jamais l'énumérer ou la figurer