ET COUTUMES RELIGIEUSES. St
convient, on loue de tems en tems un pauvre homme pour paiïer une
nuit sur un lit dans l'endroit où ils sont 5 avec la précaution atroce d'at-
tacher ce malheureux, de crainte que la douleur que lui cause la morsure
de ces insectes ne le force à s'échaper (i). Les charitables banians ont
au surplus un jour dans l'année, consacré au feslin solemnel qu'ils font
à toutes les mouches qui se trouvent dans le pays. Leur attention s'étend
aurli jusques sur les fourmis, qu'ils vont nourrir dans la campagne avec
des sacs de riz & d'autres denrées propres à la nourriture de cet insecte
économe. Ils ne manquent jamais de racheter les oiseaux qu'ils voyent
prendre aux filets des musulmans leurs maîtres. Les plus dévots d'entre
eux sont même difficulté d'allumer pendant la nuit du feu ou de la
chandelle , de peur que les mouches & les papillons qui voltigeroient
autour , ne vimTent s'y brûler. Mais la plus rigide des sectes qui divise
les banians, & la plus attentive à l'observation du dogme qui défend
l'efïusion du sang, en: celle des curawates. Leurs bramines se couvrent
habituellement la bouche d'un linge, dans la crainte qu'une mouche
n'y entre, & portent sur eux un petit balai pour écarter toutes sortes
d'insectes. Ils ne s'asseyent point sans avoir soigneusement nettoyé la
place qu'ils veulent occuper, pour ne pas se rendre coupables , par leur
négligence , de quelque ^oocide. Ils ne font jamais de feu dans leur mai-
son ; ils n'y allument pas même de chandelle (s). Il ne boivent poinc
d'eau froide , de peur d'y rencontrer des insectes à qui ils donneroient la
mort ; & s As la font bouillir, c'eit dans quelque maison voifme , dans
le delsein sans doute de se décharger sur d'autres du péché qu'ils com-
mettent en échaudant quelques moucherons. Enfin, ce sera avoir peint
d'un trait la sotte & humiliante foiblesîe de ces sectaires asiatiques,
quand j'aurai dit qu'il y a parmi eux un certain ordre de bramines sî
(1) Le cardinal Bellarmin semble avoir été encore plus charitable envers ces pauvres insectes.
Muni de beaucoup de patience ôc de résignation , il livroit son propre corps en proie aux puces
& à toutes sortes de vermines , en disant : nos ossrandes feront récompenses dans le ciel : les pauvres
créatures nont que la jouissance de la sélicite présente. Au reste, si l'on étoit tenté de traiter de
fable ce que j'avance ici de l'hôpital que les banians ont construit pour les bêtes, on pounoit con-
sulter le discours préliminaire que M. Anquetil a mis à la tête de son zend-avesta, tom. i , ^g.
ccclxii. Comme cet académicien a vu tout récemment ce singulier édifice, personne n'en pou-
voit parler plus pertinement que lui. Aussi a-t-il porté l'exactitude jusqu'au point de nous donner
le plan & la distribution des différons logemens qu'il contient.
(2) Les talapoins siamois, dont les dogmes sont émanés de ceux des brames, sont un peu moins
scrupuleux sur ce point. La loi leur ordonne de ne se lever que lorsqu'il fait assez jour, pour pou-
voir discerner les veines de leurs mains, dans la crainte de s'exposer pendant l'obscurité à tuer
quelqu'inseâe , en mettant le pied dessus sans s'en appercevoir.
Tome IV» L
convient, on loue de tems en tems un pauvre homme pour paiïer une
nuit sur un lit dans l'endroit où ils sont 5 avec la précaution atroce d'at-
tacher ce malheureux, de crainte que la douleur que lui cause la morsure
de ces insectes ne le force à s'échaper (i). Les charitables banians ont
au surplus un jour dans l'année, consacré au feslin solemnel qu'ils font
à toutes les mouches qui se trouvent dans le pays. Leur attention s'étend
aurli jusques sur les fourmis, qu'ils vont nourrir dans la campagne avec
des sacs de riz & d'autres denrées propres à la nourriture de cet insecte
économe. Ils ne manquent jamais de racheter les oiseaux qu'ils voyent
prendre aux filets des musulmans leurs maîtres. Les plus dévots d'entre
eux sont même difficulté d'allumer pendant la nuit du feu ou de la
chandelle , de peur que les mouches & les papillons qui voltigeroient
autour , ne vimTent s'y brûler. Mais la plus rigide des sectes qui divise
les banians, & la plus attentive à l'observation du dogme qui défend
l'efïusion du sang, en: celle des curawates. Leurs bramines se couvrent
habituellement la bouche d'un linge, dans la crainte qu'une mouche
n'y entre, & portent sur eux un petit balai pour écarter toutes sortes
d'insectes. Ils ne s'asseyent point sans avoir soigneusement nettoyé la
place qu'ils veulent occuper, pour ne pas se rendre coupables , par leur
négligence , de quelque ^oocide. Ils ne font jamais de feu dans leur mai-
son ; ils n'y allument pas même de chandelle (s). Il ne boivent poinc
d'eau froide , de peur d'y rencontrer des insectes à qui ils donneroient la
mort ; & s As la font bouillir, c'eit dans quelque maison voifme , dans
le delsein sans doute de se décharger sur d'autres du péché qu'ils com-
mettent en échaudant quelques moucherons. Enfin, ce sera avoir peint
d'un trait la sotte & humiliante foiblesîe de ces sectaires asiatiques,
quand j'aurai dit qu'il y a parmi eux un certain ordre de bramines sî
(1) Le cardinal Bellarmin semble avoir été encore plus charitable envers ces pauvres insectes.
Muni de beaucoup de patience ôc de résignation , il livroit son propre corps en proie aux puces
& à toutes sortes de vermines , en disant : nos ossrandes feront récompenses dans le ciel : les pauvres
créatures nont que la jouissance de la sélicite présente. Au reste, si l'on étoit tenté de traiter de
fable ce que j'avance ici de l'hôpital que les banians ont construit pour les bêtes, on pounoit con-
sulter le discours préliminaire que M. Anquetil a mis à la tête de son zend-avesta, tom. i , ^g.
ccclxii. Comme cet académicien a vu tout récemment ce singulier édifice, personne n'en pou-
voit parler plus pertinement que lui. Aussi a-t-il porté l'exactitude jusqu'au point de nous donner
le plan & la distribution des différons logemens qu'il contient.
(2) Les talapoins siamois, dont les dogmes sont émanés de ceux des brames, sont un peu moins
scrupuleux sur ce point. La loi leur ordonne de ne se lever que lorsqu'il fait assez jour, pour pou-
voir discerner les veines de leurs mains, dans la crainte de s'exposer pendant l'obscurité à tuer
quelqu'inseâe , en mettant le pied dessus sans s'en appercevoir.
Tome IV» L