LE PASSAGE DE CLÉMENT D'ALEXANDRIE
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pas à transcrire de langue spéciale. Ses prétentions étaient plus modestes : il servait
surtout aux hiérogranimâtes \ ces scribes employés à transcrire des ouvrages sacrés,
comme, par exemple, ce Livre des Morts, qui accompagnait les défunts illustres. Le
hiératique n'était donc rien autre qu'une sorte de hiéroglyphes cursifs; et, sauf cer-
taines abréviations de signes difficiles, ne présentait aucune particularité importante.
Dès lors, nous pouvons facilement expliquer pourquoi des étrangers, comme
Hérodote ou Diodore, ne connaissant rien à l'Egypte, et se contentant de répéter ce
qu'ils entendaient (le plus souvent sans le comprendre), ne prêtèrent aucune attention
au hiératique. Tout s'arrange quand on sait que ce dernier se confondait avec le
système hiéroglyphique et que parler de l'un c'était également parler de l'autre. Seuls
les vrais fils de l'Egypte, comme Clément, pouvaient les distinguer, et voir dans le
hiératique une déformation digne d'être mentionnée.
Voici notre auteur arrivé aux hiéroglyphes : il en parle en dernier lieu parce
qu'ils constituent le plus important des systèmes, et méritent, à cet égard, quelques
explications. Plaçons ici une remarque très importante, sur laquelle on ne saurait
trop insister.
Désormais Clément ne nous parlera plus, comme il l'a fait jusqu'ici, de nouvelles
espèces d'écriture. Sur ce point aucun doute. La phrase : bcxà^ 81 xat teXeutouocv tyjv
iEpoYXucptxr(v indique clairement son désir de terminer une liste. Que va-t-il faire alors?
Il va simplement nous expliquer le mécanisme intérieur du langage national et
officiel, constitué par « les hiéroglyphes ». Ce mécanisme est compliqué : aussi pour
bien le mettre à jour, faudra-t-il entrer dans des détails, donner des exemples, et c'est
ce que fera notre auteur. Pour bien le suivre, n'oublions donc pas que les lignes sui-
vantes, loin de se rapporter à des écritures nouvelles, ne sont que le développement
d'une théorie hiéroglyphique, et rien de plus.
Clément divise les hiéroglyphes en deux classes : les cyriologiques et les symbo-
liques.
1. Ces «hiérogrammates» n'ont pas joui d'une grande popularité sous l'Egypte gréco-romaine, car leurs
noms ne se rencontrent que très rarement dans les documents de cette époque. Sur leur rôle, nous ne savons
de précis que le caractère sacerdotal de leur fonction. (Voir le début du décret de Canope, trad. par Bouché-
Lkclercq, Histoire des Lagides, I, p. 267.) Que faisaient ces prêtres? Si les quelques témoignages que nous
rencontrons ne sont pas contradictoires, ils se complètent d'une manière singulière. D'après le même décret de
Canope {op. cit., p. 272), ils écrivaient des hymnes et remplissaient un office d'écrivain sacré. Josèphe {Cont.
Ap., I, 32) parle d'un certain 3>piTicpaç comme étant un cspoypa^aTô-jç sans rien ajouter. Suidas, enfin, quoique
d'une époque bien postérieure, consacre un article à cette catégorie de prêtres (voir ÉEpoypa^aTeùç) auxquels
il attribue une mission presque surnaturelle : o-jtoi -rrap' Alyumn'ocç yja-av Sstvoî Tiepi tà>v [xsXXovtmv tyjv àVr(Ô£tav
e'nreîv. 11 cite, à ce propos, l'exemple d'un hiérogrammate prophète. Autre part (passage de Suidas), cité au
mot tspoypafx^arsùç du Thésaurus linguœ grœcœ d'Estienne), nous trouvons : aicrTisp A'tyjTm'cov oi -/.aXo-^svo'.
Upoypa^ocTeiç, 'Aamipi'wv 8e *ai 'Apàêwv oi è|rjy?)Tai tàiv [x-j6wv. D'après nous, la conclusion qui s'impose est
facile à tirer. Les Égyptiens faisaient usage d'une immense littérature religieuse, peu variée. Elle consistait,
par exemple, en quatre ou cinq ouvrages, tel le Liore des Morts, avec lequel étaient ensevelis tous les nota-
bles. Ce volume, écrit en hiératique, était sacré, et devait avoir été transcrit par des prêtres instruits, spécia-
lement destinés à cet office. Tout me porte donc à croire que ces prêtres étaient bien les tôpoYpa^fxaTetç, dont
il s'agit ici.
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pas à transcrire de langue spéciale. Ses prétentions étaient plus modestes : il servait
surtout aux hiérogranimâtes \ ces scribes employés à transcrire des ouvrages sacrés,
comme, par exemple, ce Livre des Morts, qui accompagnait les défunts illustres. Le
hiératique n'était donc rien autre qu'une sorte de hiéroglyphes cursifs; et, sauf cer-
taines abréviations de signes difficiles, ne présentait aucune particularité importante.
Dès lors, nous pouvons facilement expliquer pourquoi des étrangers, comme
Hérodote ou Diodore, ne connaissant rien à l'Egypte, et se contentant de répéter ce
qu'ils entendaient (le plus souvent sans le comprendre), ne prêtèrent aucune attention
au hiératique. Tout s'arrange quand on sait que ce dernier se confondait avec le
système hiéroglyphique et que parler de l'un c'était également parler de l'autre. Seuls
les vrais fils de l'Egypte, comme Clément, pouvaient les distinguer, et voir dans le
hiératique une déformation digne d'être mentionnée.
Voici notre auteur arrivé aux hiéroglyphes : il en parle en dernier lieu parce
qu'ils constituent le plus important des systèmes, et méritent, à cet égard, quelques
explications. Plaçons ici une remarque très importante, sur laquelle on ne saurait
trop insister.
Désormais Clément ne nous parlera plus, comme il l'a fait jusqu'ici, de nouvelles
espèces d'écriture. Sur ce point aucun doute. La phrase : bcxà^ 81 xat teXeutouocv tyjv
iEpoYXucptxr(v indique clairement son désir de terminer une liste. Que va-t-il faire alors?
Il va simplement nous expliquer le mécanisme intérieur du langage national et
officiel, constitué par « les hiéroglyphes ». Ce mécanisme est compliqué : aussi pour
bien le mettre à jour, faudra-t-il entrer dans des détails, donner des exemples, et c'est
ce que fera notre auteur. Pour bien le suivre, n'oublions donc pas que les lignes sui-
vantes, loin de se rapporter à des écritures nouvelles, ne sont que le développement
d'une théorie hiéroglyphique, et rien de plus.
Clément divise les hiéroglyphes en deux classes : les cyriologiques et les symbo-
liques.
1. Ces «hiérogrammates» n'ont pas joui d'une grande popularité sous l'Egypte gréco-romaine, car leurs
noms ne se rencontrent que très rarement dans les documents de cette époque. Sur leur rôle, nous ne savons
de précis que le caractère sacerdotal de leur fonction. (Voir le début du décret de Canope, trad. par Bouché-
Lkclercq, Histoire des Lagides, I, p. 267.) Que faisaient ces prêtres? Si les quelques témoignages que nous
rencontrons ne sont pas contradictoires, ils se complètent d'une manière singulière. D'après le même décret de
Canope {op. cit., p. 272), ils écrivaient des hymnes et remplissaient un office d'écrivain sacré. Josèphe {Cont.
Ap., I, 32) parle d'un certain 3>piTicpaç comme étant un cspoypa^aTô-jç sans rien ajouter. Suidas, enfin, quoique
d'une époque bien postérieure, consacre un article à cette catégorie de prêtres (voir ÉEpoypa^aTeùç) auxquels
il attribue une mission presque surnaturelle : o-jtoi -rrap' Alyumn'ocç yja-av Sstvoî Tiepi tà>v [xsXXovtmv tyjv àVr(Ô£tav
e'nreîv. 11 cite, à ce propos, l'exemple d'un hiérogrammate prophète. Autre part (passage de Suidas), cité au
mot tspoypafx^arsùç du Thésaurus linguœ grœcœ d'Estienne), nous trouvons : aicrTisp A'tyjTm'cov oi -/.aXo-^svo'.
Upoypa^ocTeiç, 'Aamipi'wv 8e *ai 'Apàêwv oi è|rjy?)Tai tàiv [x-j6wv. D'après nous, la conclusion qui s'impose est
facile à tirer. Les Égyptiens faisaient usage d'une immense littérature religieuse, peu variée. Elle consistait,
par exemple, en quatre ou cinq ouvrages, tel le Liore des Morts, avec lequel étaient ensevelis tous les nota-
bles. Ce volume, écrit en hiératique, était sacré, et devait avoir été transcrit par des prêtres instruits, spécia-
lement destinés à cet office. Tout me porte donc à croire que ces prêtres étaient bien les tôpoYpa^fxaTetç, dont
il s'agit ici.