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Rocznik Historii Sztuki — 35.2010

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Wiatrzyk, Agnieszka: Les strates d'un palimpseste - entre Leon Battista Alberti et l'architecture venitienne de la première renaissance
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https://doi.org/10.11588/diglit.14577#0071
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LES STRATES D'UN PALIMPSESTE - ENTRE LEON BATTISTA ALBERTI ET L'ARCHITECTURE VENITIENNE.

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L'importance de cette façade se traduit par le nombre important d'autres ca' pour lesquelles le Palazzo
Dario put servir de modèle. Citons les palazzi : Contarini del Zaffo, Manzoni-Angaran, Grimani près de San
Polo, Trevisan Capello près du Rio délia Canonica, Grimani près de Santa Fosca et Contarini dalle Figure.
Ces analogies associent les palais mentionnés avec les trois bâtiments déjà analysés dans un groupe impor-
tant d'édifices de la première Renaissance à Venise. L'emploi des motifs décoratifs analogues entre l'église
Santa Maria dei Miracoli et le Palazzo Dario révèle une transmission de motifs d'une signifiance considé-
rable entre l'architecture sacrale et l'architecture civique122. Quelque soit le décalage temporaire entre les
deux constructions, l'église étant commencée en 1481, Ca'Dario fini après 1487, ces analogies frappaient
les chercheurs depuis longtemps123.

Les analogies avec l'église dei Miracoli incitent aussi à poser la question des analogies avec la pratique
et la théorie d'Alberti. Dans ce contexte le Palazzo Rucellai florentin peut servir d'exemple124, citons juste
quelques ressemblances contextuelles.

En premier lieu, les deux bâtiments furent évidemment les demeures de deux hommes exceptionnels et
bien représentatifs pour les élites de leur temps125, surtout à cause de leur intérêt pour l'antiquité. Deuxième-
ment, dans les deux cas la forme architecturale dut être adaptée à la petitesse de la parcelle, ce qui ensuivit
aussi par des conséquences pour la façade. Le cas du palais florentin se complique encore à cause du fait que
sa construction fut considérablement agrandie par Bernardo Rossellino126. Le projet originel devait s'étendre
sur cinq travées à partir de l'angle gauche, ce qui correspond aux limites de la propriété acquise en 1442127.

La structure du palais et le déploiement des fenêtres et la corniche à modifions, s'inscrivent dans la
tradition florentine représentée par le Palazzo Medici. Alberti veilla surtout à l'unité cohérente de cet orga-
nisme architectural, en accentuant la correspondance de la façade avec l'intérieur128. Tel qu'il apparaît dans
L'art d'édifier, le rôle du columnatio se distingue ici encore une fois129, en liaison avec la question des jeux
optiques. L'articulation de la façade par des pilastres d'ordres superposés (toscano-dorique ou composite /
pseudo-ionique / pseud-corinthien) est allégée par le réseau des corniches à ressauts et le dessin des bossages,
qui servent comme un contrepoids130. Il s'agit d'un essai de concilier la cohérence de l'œuvre avec les condi-
tions particulières de son emplacement131. Pour atteindre ce double objectif, Alberti tenta justement de coor-
donner le vue de la façade de la rue à travers l'emploi du columnatio.

En ce qui concerne le modèle éventuel pour la conception de la façade, Robert Tavernor suggérera une
villa romaine près d'Anguillara Sabazia ou le Septizonium à Rome132. Néanmoins, les modèles les plus évi-

122 Remarquons encore que malgré le fait que l'appartenance du projet de la façade du Ca' Dario à Pietro Lombardo soit peu
documentée, le rôle de son influence (de son cercle peut-être?) dans le projet semble incontestable du point de vue de l'analyse des
formes.

123 L i e b e r m a n, Renaissance Architecturep. 96-145 (voir note 12).

124 В. P r e y e r, The Rucellai Palace, [in :] Giovanni Rucellai e il suo Zibaldone, II, A Florentine Patrician and his Palace,
(contributions de F.W. К e n t, A. P e r о s a, B. P r e y e r, R. S a 1 v i n i, P. S a n p a о 1 e s i), Londres 1981, p. 155-225 ; C.R. M a с к, The
Rucellai Palace: Some New Proposais, „The Art Bulletin", 54, 1974, p. 517-529 ; H. S a a 1 m a n, Palazzo Rucellai, „Journal of the
Society of Architectural Historians", XLVII, 1988, p. 82-90 ; Burns, Leon Battista Alberti... ; G ras si, op. cit., p. 46-53 ;
R. P a с с i a n i, Л Iherti a Firenze. Una presenza difficile: Palazzo Rucellai, [in :] ibidem, p. 218-229 ; i d e m, L'œuvre architecturale

p. 169-177 (voir note 87).

125 J.R. L i n d o w, The Renaissance Palace : Magnificence and Splendeur in Fifteenth-Century Italy, Ashgate, Burlington 2007.

126 La construction du palais commence vers 1450 avec l'extension de la maison ancestrale (à l'angle de la via délia Vigna
Nuova et de la via dei Palchetti) en direction de sept maison acquises progressivement entre 1442 et 1467. Cf : Preyer, op. cit.,
p. 165-166 ; Рас ci ani, L'œuvre architecturale..., p. 171-172.

127 Cf. Pace i ani, L'œuvre architecturale..., p. 175. Selon le chercheur, les cinq premières travées ont été achevées vers
1458 ; la façade fut étendue par la suite à sept travées jusqu'en 1465-1470.

128 Tr a с h t e n b e r g, op. cit., p. 71-79 (voir note 67).

129 Alberti, op. cit., Livre IX, chap. 4.

130 Nous suivons ici les remarques de CL. Frommel, formulées en accord avec le traité albertien [Livre VII, chap. 8]:
F r о m m e 1, The Architecture of the Italian Renaissance..., p. 32 (voir note 90). En revanche, selon la nomenclature de Jean-Marie
Pérouse de Montclos, seul l'ordre composite existe [avec le chapiteau « composé d'une corbeille portant les deux rabgs inférieurs
feuillages du chapiteau corinthien, de l'échine ornée d'oves, des volutes de l'abaque du chapiteau ionique à cornes »], cf.
J.-M. Pérouse deMontclos, Architecture : méthode et vocabulaire. Principes d'analyse scientifique, Centre des Monuments
Nationaux, Paris 2007 [1972], p. 119.

131 Pacciani, L'œuvre architecturale..., p. 170.

132 Tavernor, On Alberti..., p. 93 (voir note 26). Tavernor cite encore comme sources d'inspiration possibles : la maison
de Severus Afer et le Temple de Soleil. Voir aussi : F i о r e, op. cit., p. 104-117.
 
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