ASIE MINEURE.
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leur gouvernement; mais ces papiers
sont loin d’avoir l’influence des fer-
mans. Enfin- pour aller d’un lieu à
un autre, il y a encore, un papier de
route appelé teskéré, qui n’est bon que
pour avoir des chevaux de poste. L’in-
convénient de ces deux dernières piè-
ces, c’est qu’elles ne mettent pas le
voyageur à l’abri des visites douanières
à tous les lieux de péage, tandis que
le porteur du ferman n’y est jamais
exposé, soit qu’il aille par terre ou par
mer.
Nous donnons ici le modèle d’un
ferman délivré sous le règne du sultan
Mahmoud à la demande de l’ambassa-
deur de France.
Traduction d'unferman adressé a tou-
tes les autorités civiles et militaires
des pays situés entre Constantinople
et Tarsous.
L’ambassadeur de France, près ma Su-
blime Porte, amiral baron Roussin, mo-
dèle des grands de la nation chrétien-
ne, a dernièrement,dans la note qu'il a
présentée , exposé que le gentilhomme
français N... se rend de Constantinople
à Tarsous pour faire un voyage de curio-
sité, avec un certain nombre de domes-
tiques francs, et il a demandé que ce
gentilhomme, partout sur sa route,
depuis Constantinople jusqu’à Tarsous,
soit logé convenablement ; qu’il n’é-
prouve aucune difficulté ni pour lui-
même, ni pour ses effets et ses mon-
tures , que les vivres nécessaires lui
soient fournis, qu’on se garde bien de
le molester en lui demandant la capi-
tation, ou pour tout autre prétexte, que
les règles de l’hospitalité soient obser-
vées envers lui, et qu’il jouisse d’une
pleine et entière protection, conformé-
ment aux capitulations impériales.
Mon ordre est qu’il soit agi ainsi que
dessus. Vous donc qui êtes les autorités
susdites , vous saurez que ce gentil-
homme mérite hospitalité et respect.
Dans quelque lieu qu’il débarque, en
allant de Constantinople à Tarsous avec
un certain nombre de domestiques
francs, vous aurez soin qu’il soit logé
convenablement, qu’il n’éprouve au-
cune difficulté ni pour lui-même, ni
pour ses effets et ses montures, qu’on
ne le moleste pas parla demande de la
capitation ou sous quelque autre pré-
texte, que les vivres nécessaires lui
soient fournis, qu’il trouve toujours
hospitalité, égards et protection, sui-
vant les capitulations impériales. Tel
est l’objet de mon présent ferman ; dès
sa réception, conformez vous-y exacte-
ment.
Écrit à la fin de la lune de safer 1251
(20 juin 1835).
Traduit par 1e soussigné, secrétaire
interprète du Roi.
Signé: Annibal DANTAN.
Pour le personnel que le voyageur
veut emmener avec lui, le personnage
le plus important est un bon cawass
Un cawass est une espèce de maréchal
des logis qui porte le ferman et qui se
charge de procurer à la caravane, hom-
mes et chevaux, tout ce dont elle a
besoin. Ce cawass est nécessairement un
Turc; mais il n’a pas besoin d’être réel-
lement tiré du corps des cawass. Il
suffît qu’on lui fasse délivrer une com-
mission par les bureaux de la Porte.
Quand un voyageur est assez heureux
pour avoir trouvé un bon cawass, il
peut partir tranquille; il trouvera tou-
jours sa tente ou son konac bien ap
provisionné , les chevaux bien four-
nis d’orge et de foin et bonne réception
partout. Mais il faut se défier d’un ca-
wass querelleur, qui croit se donner
de l’importance en molestant le petit
nombre de curieux et d’enfants qui
s’arrêtent pour voir passer le captan ;
c’est le nom que les Turcs du peuple et
des bazars donnent aux Européens.
Après le cawass vient le cuisinier. On
prend ordinairement un jeune Grec qui
n’a besoin que de savoir faire le pilaw;
il n’est pas même nécessaire qu’il sache
plumer des poules, car dans ce pays on
se contente de les tremper un moment
dans l’eau bouillante, et d’un seul geste
on enlève tout, plumes et peau, et
quelquefois la viande.
L’interprète vient ensuite ; il se pré-
sente ordinairement comme parlant
« indistinctement » toutes les langues
du pays. Il est presque toujours dans le
vrai. Son emploi consiste à préparer les
bagages et à les surveiller au moment
des haltes. Il fait les menues commis-
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leur gouvernement; mais ces papiers
sont loin d’avoir l’influence des fer-
mans. Enfin- pour aller d’un lieu à
un autre, il y a encore, un papier de
route appelé teskéré, qui n’est bon que
pour avoir des chevaux de poste. L’in-
convénient de ces deux dernières piè-
ces, c’est qu’elles ne mettent pas le
voyageur à l’abri des visites douanières
à tous les lieux de péage, tandis que
le porteur du ferman n’y est jamais
exposé, soit qu’il aille par terre ou par
mer.
Nous donnons ici le modèle d’un
ferman délivré sous le règne du sultan
Mahmoud à la demande de l’ambassa-
deur de France.
Traduction d'unferman adressé a tou-
tes les autorités civiles et militaires
des pays situés entre Constantinople
et Tarsous.
L’ambassadeur de France, près ma Su-
blime Porte, amiral baron Roussin, mo-
dèle des grands de la nation chrétien-
ne, a dernièrement,dans la note qu'il a
présentée , exposé que le gentilhomme
français N... se rend de Constantinople
à Tarsous pour faire un voyage de curio-
sité, avec un certain nombre de domes-
tiques francs, et il a demandé que ce
gentilhomme, partout sur sa route,
depuis Constantinople jusqu’à Tarsous,
soit logé convenablement ; qu’il n’é-
prouve aucune difficulté ni pour lui-
même, ni pour ses effets et ses mon-
tures , que les vivres nécessaires lui
soient fournis, qu’on se garde bien de
le molester en lui demandant la capi-
tation, ou pour tout autre prétexte, que
les règles de l’hospitalité soient obser-
vées envers lui, et qu’il jouisse d’une
pleine et entière protection, conformé-
ment aux capitulations impériales.
Mon ordre est qu’il soit agi ainsi que
dessus. Vous donc qui êtes les autorités
susdites , vous saurez que ce gentil-
homme mérite hospitalité et respect.
Dans quelque lieu qu’il débarque, en
allant de Constantinople à Tarsous avec
un certain nombre de domestiques
francs, vous aurez soin qu’il soit logé
convenablement, qu’il n’éprouve au-
cune difficulté ni pour lui-même, ni
pour ses effets et ses montures, qu’on
ne le moleste pas parla demande de la
capitation ou sous quelque autre pré-
texte, que les vivres nécessaires lui
soient fournis, qu’il trouve toujours
hospitalité, égards et protection, sui-
vant les capitulations impériales. Tel
est l’objet de mon présent ferman ; dès
sa réception, conformez vous-y exacte-
ment.
Écrit à la fin de la lune de safer 1251
(20 juin 1835).
Traduit par 1e soussigné, secrétaire
interprète du Roi.
Signé: Annibal DANTAN.
Pour le personnel que le voyageur
veut emmener avec lui, le personnage
le plus important est un bon cawass
Un cawass est une espèce de maréchal
des logis qui porte le ferman et qui se
charge de procurer à la caravane, hom-
mes et chevaux, tout ce dont elle a
besoin. Ce cawass est nécessairement un
Turc; mais il n’a pas besoin d’être réel-
lement tiré du corps des cawass. Il
suffît qu’on lui fasse délivrer une com-
mission par les bureaux de la Porte.
Quand un voyageur est assez heureux
pour avoir trouvé un bon cawass, il
peut partir tranquille; il trouvera tou-
jours sa tente ou son konac bien ap
provisionné , les chevaux bien four-
nis d’orge et de foin et bonne réception
partout. Mais il faut se défier d’un ca-
wass querelleur, qui croit se donner
de l’importance en molestant le petit
nombre de curieux et d’enfants qui
s’arrêtent pour voir passer le captan ;
c’est le nom que les Turcs du peuple et
des bazars donnent aux Européens.
Après le cawass vient le cuisinier. On
prend ordinairement un jeune Grec qui
n’a besoin que de savoir faire le pilaw;
il n’est pas même nécessaire qu’il sache
plumer des poules, car dans ce pays on
se contente de les tremper un moment
dans l’eau bouillante, et d’un seul geste
on enlève tout, plumes et peau, et
quelquefois la viande.
L’interprète vient ensuite ; il se pré-
sente ordinairement comme parlant
« indistinctement » toutes les langues
du pays. Il est presque toujours dans le
vrai. Son emploi consiste à préparer les
bagages et à les surveiller au moment
des haltes. Il fait les menues commis-