-^^D-L'ART DÉCORATIF <5^^-
condamné. Tout celà n'a absolument rien à
faire dans la question. Les constructions ne
comportent aucun ornement; ici, la iigne con-
structive est tout et ia beauté ne peut consister
en autre chose qu'à unir de belies formes et de
beiies proportions aux convenances d'empioi
ie pius parfaites possibie. L'ornement qui n'est
rien d'autre qu'un or-
nement ne fait que
nuire à cette place.
Ce n'est que pour dé-
corer ies surfaces qu'ii
peut être question
d'ornement, et ià, tout
est bon, à ia seuie con-
dition d'être réelie-
ment un ornement.
On a fait — à
tort — aux «linéa-
ristes)) le reproche
d'uniformité. Ii est
certain que chez la
masse des artistes de
second ordre qui s'at-
tachent à ce styie
en Belgique, ie ,«ii-
néarisme» se traduit
par des formules tou-
jours les mêmes, déjà
passées à i'état de
poncifs. Mais ceiui
qui ne voit que des
redites dans ies orne-
ments des artistes qui
ont fondé i'ëcole, M.
Van de Velde ou M.
Lemmen par exempie,
ne doit accuser que
son propre œii de son
erreur. L'œii n'est
par encore fait à ces fonnes, en apparence
compiètement étrangères à ia nature; ii est
comme ceiui d'un eniant apercevant des Chinois
pour la première fois : tous lui paraissent avoir
ie même visage. Un œii exercë percevra bien-
tôt les dihérences, et dècouvrira chez ies artistes
que nous venons de citer une richesse d'imagi-
nation peu ordinaire. Qu'ii y aie des traits
communs à toutes ies œuvres du même auteur,
on ne peut pas pius lui en faire un grief qu'à
un peintre de rester fidèie dans tous ses tableaux
à ses procédès d'expression, à son écriture
artistique.
Ceci fait en mème temps justice de i'aphorisme,
devenu courant, sur la prètendue faciiitë de
rèussir i'ornement ab-
strait. Ilseraitcertes
désirable, et tout-à-
fait conforme aux be-
soins sociaux de notre
temps, que i'art pût
ne plus dèpendre du
gènie, c'est à dire du
pius rare des hasards;
qu'il devînt l'apanage
de tous ceux qui
voudraient prendre 1a
peine de s'exercer un
peu. Maiheureuse-
ment, on ne remarque
rien de pareii jus-
qu'ici : à preuve, prè-
cisèment 1e nornbre
minime des hommes
dont l'individualité
s'accuse dans i'or-
nement abstrait, et
qui n'y sont pas de
simples imitateurs.
L'imitation est faciie
partout, qu'ii s'agisse
d'ornement abstrait
ou d'autre chose. Les
formules paraissent
toujours commodes,
une fois trouvèes ;
seulement, ii fallait
ies trouver.
En résumè, en allant au fond du conhit, ii
apparaît sans objet; les principes opposès du
premier abord deviennent des identités. Ii n'y a
pas d'ornement Rorai ni d'ornement abstrait.
Tout ornement est abstrait; c'est à dire qu'ii fait
abstraction de la nature, car 1a nature ne donne
pas i'art. Et ceia, vrai pour l'ornement, l'est aussi
pour toutes ies formes. j. MEiER-GRAEFE
E. M. HLtEN
236
condamné. Tout celà n'a absolument rien à
faire dans la question. Les constructions ne
comportent aucun ornement; ici, la iigne con-
structive est tout et ia beauté ne peut consister
en autre chose qu'à unir de belies formes et de
beiies proportions aux convenances d'empioi
ie pius parfaites possibie. L'ornement qui n'est
rien d'autre qu'un or-
nement ne fait que
nuire à cette place.
Ce n'est que pour dé-
corer ies surfaces qu'ii
peut être question
d'ornement, et ià, tout
est bon, à ia seuie con-
dition d'être réelie-
ment un ornement.
On a fait — à
tort — aux «linéa-
ristes)) le reproche
d'uniformité. Ii est
certain que chez la
masse des artistes de
second ordre qui s'at-
tachent à ce styie
en Belgique, ie ,«ii-
néarisme» se traduit
par des formules tou-
jours les mêmes, déjà
passées à i'état de
poncifs. Mais ceiui
qui ne voit que des
redites dans ies orne-
ments des artistes qui
ont fondé i'ëcole, M.
Van de Velde ou M.
Lemmen par exempie,
ne doit accuser que
son propre œii de son
erreur. L'œii n'est
par encore fait à ces fonnes, en apparence
compiètement étrangères à ia nature; ii est
comme ceiui d'un eniant apercevant des Chinois
pour la première fois : tous lui paraissent avoir
ie même visage. Un œii exercë percevra bien-
tôt les dihérences, et dècouvrira chez ies artistes
que nous venons de citer une richesse d'imagi-
nation peu ordinaire. Qu'ii y aie des traits
communs à toutes ies œuvres du même auteur,
on ne peut pas pius lui en faire un grief qu'à
un peintre de rester fidèie dans tous ses tableaux
à ses procédès d'expression, à son écriture
artistique.
Ceci fait en mème temps justice de i'aphorisme,
devenu courant, sur la prètendue faciiitë de
rèussir i'ornement ab-
strait. Ilseraitcertes
désirable, et tout-à-
fait conforme aux be-
soins sociaux de notre
temps, que i'art pût
ne plus dèpendre du
gènie, c'est à dire du
pius rare des hasards;
qu'il devînt l'apanage
de tous ceux qui
voudraient prendre 1a
peine de s'exercer un
peu. Maiheureuse-
ment, on ne remarque
rien de pareii jus-
qu'ici : à preuve, prè-
cisèment 1e nornbre
minime des hommes
dont l'individualité
s'accuse dans i'or-
nement abstrait, et
qui n'y sont pas de
simples imitateurs.
L'imitation est faciie
partout, qu'ii s'agisse
d'ornement abstrait
ou d'autre chose. Les
formules paraissent
toujours commodes,
une fois trouvèes ;
seulement, ii fallait
ies trouver.
En résumè, en allant au fond du conhit, ii
apparaît sans objet; les principes opposès du
premier abord deviennent des identités. Ii n'y a
pas d'ornement Rorai ni d'ornement abstrait.
Tout ornement est abstrait; c'est à dire qu'ii fait
abstraction de la nature, car 1a nature ne donne
pas i'art. Et ceia, vrai pour l'ornement, l'est aussi
pour toutes ies formes. j. MEiER-GRAEFE
E. M. HLtEN
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