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BULLETIN DES MUSÉES ROYAUX
UNE COTTE DE MAILLES SARRASINE. DÉTAIL.
dans le tissu de fer, s'obtient en passant l'une des
extrémités, momentanément amincie, dans l'œil
percé à l'autre extrémité, puis en refoulant la
première pour en former le rivet. Ce mode de fer-
meture a valu aux défenses de corps de cette
nature le nom de cottes de mailles à grains d’orge,
la petite saillie ainsi produite, jointe à la partie
renflée de l’anneau, donnant à cet ensemble l’as-
pect d’un grain d’orge.
Il fallait, pour mener à bonne fin la confection
d'une cotte de mailles, une patience à toute
épreuve. C’est à juste titre que ce genre de travail
caractérise, dans le langage proverbial, le labeur
patient et successif, bon artisan des longues
tâches : Maille à maille se fait le haubergeon !
Dans la cotte orientale dont nous parlons, la fer-
meture de l’anneau, après son introduction dans
le tissu, est obtenue par la superposition des deux
extrémités qui sont maintenues par deux rivets.
Travail délicat par excellence, si l'on considère que
la rivure de l'anneau qui suit sa réunion aux autres
anneaux doit nécessairement se faire après
l'étampage de l’inscription ! Mais la pa-
tience orientale, jointe au fanatisme reli-
gieux des mahométans, n’est pas faite pour
se rebuter devant pareille entreprise.
La cotte sarrasine dont nous donnons
deux reproductions, l'une de la pièce en-
tière vue de face, l'autre d’un rectangle
destiné à en montrer le détail en grandeur
naturelle, est composée de onze mille an-
neaux environ. Elle est formée de rangs
alternatifs d’anneaux découpés à l’emporte-
pièce et d’anneaux dont les extrémités sont
réunies par une double rivure. Le patient
fabricant de cette défense a donc dû assu-
mer la lourde tâche de fixer onze mille
rivets environ, la moitié des anneaux n’étant
pas rivés et ceux qui le sont ayant, comme
nous l’avons dit, double rivure.
Si l’on considère les dimensions de ces
rivets, peu faciles à manipuler à raison de
leur ténuité, l’on se convaincra que cette
patience devait être doublée d’une grande
adresse.
Le revers des anneaux, à l’intérieur du
vêtement, est étampé du motif ornemental
appelé boucle.
Le diamètre extérieur de ces anneaux
est de omoi6 ; le diamètre intérieur est de
omo11.
La hauteur totale de la cotte est de om8o
la fente de poitrine qui permet le passage
de la tête de l’homme d’armes est de om32.
Le tour de cou est composé de huit rangs
de maillons à section ronde, rivés à grains
d’orge.
Dans le bas de la cotte, deux fentes de om25,
l’une devant, l’autre derrière, facilitent la mise en
selle du cavalier.
Est-il besoin d’ajouter que les cottes du genre de
celle qui fait l’objet de cette rapide esquisse sont
extrêmement rares. L’on n’en connaît guère plus
de douze, tant dans les dépôts publics que dans les
collections privées.
LTne jaque de mailles orientale du Musée d’artil-
lerie de Paris ainsi que la cotte de mailles dite de
Bajazet conservée à la Tour de Londres ont aussi
chacun de leurs anneaux étampé d’un verset du
Coran.
Dans un fort intéressant article, paru en février
dernier, dans la revue Zeitschrift für hislomsche
Waffenkunde, le savant docteur Walther Rose, de
Berlin, qui s’est fait une spécialité de l’étude des
cottes de mailles en général et des cottes orientales
en particulier, nous fait connaître une défense de
corps, dont il est l’heureux possesseur, et qui a de
BULLETIN DES MUSÉES ROYAUX
UNE COTTE DE MAILLES SARRASINE. DÉTAIL.
dans le tissu de fer, s'obtient en passant l'une des
extrémités, momentanément amincie, dans l'œil
percé à l'autre extrémité, puis en refoulant la
première pour en former le rivet. Ce mode de fer-
meture a valu aux défenses de corps de cette
nature le nom de cottes de mailles à grains d’orge,
la petite saillie ainsi produite, jointe à la partie
renflée de l’anneau, donnant à cet ensemble l’as-
pect d’un grain d’orge.
Il fallait, pour mener à bonne fin la confection
d'une cotte de mailles, une patience à toute
épreuve. C’est à juste titre que ce genre de travail
caractérise, dans le langage proverbial, le labeur
patient et successif, bon artisan des longues
tâches : Maille à maille se fait le haubergeon !
Dans la cotte orientale dont nous parlons, la fer-
meture de l’anneau, après son introduction dans
le tissu, est obtenue par la superposition des deux
extrémités qui sont maintenues par deux rivets.
Travail délicat par excellence, si l'on considère que
la rivure de l'anneau qui suit sa réunion aux autres
anneaux doit nécessairement se faire après
l'étampage de l’inscription ! Mais la pa-
tience orientale, jointe au fanatisme reli-
gieux des mahométans, n’est pas faite pour
se rebuter devant pareille entreprise.
La cotte sarrasine dont nous donnons
deux reproductions, l'une de la pièce en-
tière vue de face, l'autre d’un rectangle
destiné à en montrer le détail en grandeur
naturelle, est composée de onze mille an-
neaux environ. Elle est formée de rangs
alternatifs d’anneaux découpés à l’emporte-
pièce et d’anneaux dont les extrémités sont
réunies par une double rivure. Le patient
fabricant de cette défense a donc dû assu-
mer la lourde tâche de fixer onze mille
rivets environ, la moitié des anneaux n’étant
pas rivés et ceux qui le sont ayant, comme
nous l’avons dit, double rivure.
Si l’on considère les dimensions de ces
rivets, peu faciles à manipuler à raison de
leur ténuité, l’on se convaincra que cette
patience devait être doublée d’une grande
adresse.
Le revers des anneaux, à l’intérieur du
vêtement, est étampé du motif ornemental
appelé boucle.
Le diamètre extérieur de ces anneaux
est de omoi6 ; le diamètre intérieur est de
omo11.
La hauteur totale de la cotte est de om8o
la fente de poitrine qui permet le passage
de la tête de l’homme d’armes est de om32.
Le tour de cou est composé de huit rangs
de maillons à section ronde, rivés à grains
d’orge.
Dans le bas de la cotte, deux fentes de om25,
l’une devant, l’autre derrière, facilitent la mise en
selle du cavalier.
Est-il besoin d’ajouter que les cottes du genre de
celle qui fait l’objet de cette rapide esquisse sont
extrêmement rares. L’on n’en connaît guère plus
de douze, tant dans les dépôts publics que dans les
collections privées.
LTne jaque de mailles orientale du Musée d’artil-
lerie de Paris ainsi que la cotte de mailles dite de
Bajazet conservée à la Tour de Londres ont aussi
chacun de leurs anneaux étampé d’un verset du
Coran.
Dans un fort intéressant article, paru en février
dernier, dans la revue Zeitschrift für hislomsche
Waffenkunde, le savant docteur Walther Rose, de
Berlin, qui s’est fait une spécialité de l’étude des
cottes de mailles en général et des cottes orientales
en particulier, nous fait connaître une défense de
corps, dont il est l’heureux possesseur, et qui a de