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D U CINQUANTENAIRE

3

UN ALBUM DE DESSINS
ATTRIBUÉS A JOACHIM PATENIER

u Déjà dans les miniatures des livres d’Heures
s’était fait jour cette aspiration par laquelle l’ar-
tiste cherche à rendre le charme intime et péné-
trant que les bois, les fleuves, les campagnes,
la limpidité des eaux et du ciel qu’elles reflètent
exercent sur l’àme contemplative. »

(Jules Helbig. La peinture au pays de Liège
et sur les bords de la Meuse. Liège igo3,
p. 117.)

M. Paul Errera possède un curieux album
de dessins anciens que je voudrais décrire ici
brièvement. Relié aux initiales A. D. (par J. Scha-
vye) (1), il appartint à Adolphe Dillens, lequel
l’avait découvert dans un château du Brabant
hollandais où il exécutait des peintures décora-
tives (2). Le format est allongé; le filigrane —
un fleuron*ou quatrefeuille posé dans le jambage
d’un P gothique — contrôlé aux sources (3),
établit l’authentique provenance des 84 feuillets
(soit i63 numéros exactement) de croquis tracés
à la plume, ou au roseau (4), et encre de Chine.
Nous y voyons les préparations très minutieuses
de magnifiques paysages. Tout de suite s’impo-
sent le nom de Joachim Patenier et la date du
premier quart du xvie siècle ! Aucune inscrip-
tion à la vérité ne confirme cette hypothèse,
de portée générale ; le seul fragment d’écriture —
adjonction contemporaine sans rapport avec le
contenu du cahier, mais d’une amusante saveur
de terroir — énonce une recette : Pourdre par
savant, ij dragma end een half met clen hier gelait
ende smorgens gedronken (deux dragmes et demi,
délayé dans de la petite bière et bu le matin...).

L’attribution à Patenier, ou à l’un de ses disci-
ples immédiats, que je laisse à de plus compé-
tents que moi le soin d’identifier, s’appuie sur une
frappante analogie technique avec un dessin de
l’Albertina considéré traditionnellement comme
de la main du maître (5). Le paysage apparaît

(1) A Bruxelles.

(2) Des enfants jouaient avec ces feuillets et en avaient
même polychromé quelques-uns ; Dillens obtint l’album
moyennant un léger supplément de travail.

(3) C. M. Briquet. Les filigranes, dictionnaire histo-
rique des marques du papier (Paris 1907) III, p. 473,
n° 8822. Archives de l’Etat à Namur, 1509, comptes de l’hô-
pital des grands malades. Signalé ensuite en France :
Troyes i5io, Mezières i5io, Châlons-sur-Marne i5i2, Lille,
Rouen, etc.

(4) Opinon de M. H. Hymans.

(5) J. Schônbrunner et J. Meder. Handzeichnungen
alter Meister aus der Albertina (Vienne 1896) X 1124.

donc absorbant et complet : rochers fantastiques
; où grimpe une végétation touffue [28], collines
i ondulées et vallées sinueuses [53], gracieux castels
qui se mirent dans les rivières limpides [24, 52,
142-145]... Toute la poésie éparse aux somptueux
livres d’Heures d’alors, tel le Bréviaire Grimani,

; refleurit ici avec sa fraîcheur d’idylle. Et de
même, la vie rurale, microscopique, s’y meut en
un décor précis : barques mignonnes au bord
des étangs, chapelles entourées de capricieuses
frondaisons [16, 17, 19], escaliers de bois au flanc
des maisons à pignons [12, 27], barrières cham-
pêtres [31, 35, 86, 161 ], puits [1; 2] et mou-
lins [49, 94, 96]. D’élégants perrons alternent
avec des aiguilles rocheuses [16, 104-107] ; ailleurs
une façade de château à la fière allure [116]. Et
surtout attirantes, surgissent les villes hérissées de

FIG. 1

tourelles : forteresses crénelées, remparts en

encorbellement, grosses églises aux rotondes
superposées [124, 125], clochers qui pointent
hardiment dans l’azur — évoquant la Jérusalem
prestigieuse dont scintillent les coupoles derrière
le Christ en croix. Je joins à ces lignes un des

Paysage à la plume et encre de Chine grise, 13,3 X 20 cm.
Petit étang, bouquet d’arbres, église, maisonnettes, col-
lines... “ Von derselbe H and befindet sich bei Herrn Paul
Errera in Briissel ein Skizzenbuch mit àhnlichen Land-
schaften. » On a avancé aussi le nom, plus tardif, de Lucas
Gassel.
 
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