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MÉLANGES D’ARCHÉOLOGIE.
ticulier cil fait de symbolisme et de tradition doctrinale. Bien que cette classification
vaille la peine d’être développée, ce n’est évidemment pas ici sa place. Une affaire plus
pressée en ce moment veut que nous suivions la série des griefs avancés avec plus ou
moins de bonheur contre le livre que nous avions patronné jusqu’à un certain point b
o° Le Bestiaire n’est pas de Tatien, cependant il est bien décidément g nos tique1 2.
Je n’ai voué aucune affection particulière à Tatien, tout disciple qu’il était de
saint Justin le martyr. Je confesse néanmoins que j’éprouve un faible pour l’histoire
littéraire des auteurs apocryphes. Les grands écrivains de l’Église n’ont pas toujours
été traités par leurs éditeurs avec l’attention ou le tact désirables. Que de fois on
a rejeté plusieurs écrits de leurs mains dans la classe des spuria, sans examen suffi-
sant 1 Comme il n’a pas laissé d’être fait d’assez bonnes recherches, en somme, sur
le gros de leurs ouvrages, il me semble que le temps serait venu d’opérer une
recension exacte sur ce qu’avaient écarté nos prédécesseurs avec le titre de dubia,
supposititia, etc., etc. N’y trouvât-on pas les véritables œuvres de quelque grand
homme, ce qui n’est pas clair, on pourrait y rencontrer des personnages qui ont dû
faire quelque figure dans le monde, puisque leurs écrits se sont faufilés sous un nom
illustre. Si usurpée que soit cette place à la suite, il y aurait lieu d’en chercher l’expli-
cation : hasard parfois, similitude de style ou de doctrine dans d’autres cas ; motif en
somme, ou prétexte, sur quoi la postérité peut s’enquérir auprès d’un éditeur titré.
Pour moi, qui voyais un Physiologus cité par les Pères grecs à plusieurs reprises dès
le commencement du me siècle, et qui trouvais un écrivain grec antérieur se vantant
d’avoir fait un livre sur ce sujet, n’avais-je pas quelque raison d’indiquer celui-ci comme
l’auteur extrêmement probable du traité inédit qui répondait aux pensées de cet
ordre? Ayant commencé par établir que le moyen âge avait fait usage de cet écrit,
je 11e m’étais pas fait faute d’indiquer que les vieilles versions latines calquaient
évidemment un original grec3; et déclarais que je préparais une édition du texte en
cette langue. Je 11e me croyais pas suffisamment en mesure avec les manuscrits de
notre Bibliothèque royale, et prétendais recourir à l’Italie. On eût pu alors comparer
absolument le style avec celui de Tatien, ce qui est toujours un peu chanceux. Jusque-là
j’avais cependant signalé certaines preuves plus ou moins décisives, qui pouvaient
mériter la peine d’une réfutation. Si la gnose semble écarter Tatien, c’est ce que je
n’aperçois pas clairement : ayant eu l’occasion d’écrire ex informata conscientia, que
manichéens et gnostiques, sous divers noms, sont oiseaux de même nichée primitive.
On y distinguera sans doute des variétés utiles pour l’histoire, mais qui, doctrinale-
ment, se tiennent de fort près4, et dont les différences 11e sont guère faciles à saisir
1. Tout jésuite que je suis, je n’abonde pas dans le
sens du Journal de Trévoux, qui demandait à quoi pouvait
servir la publication de Fabricius sur les Évangiles apo-
cryphes. Elle peut servir, ne fût-ce que cela, à rendre rai-
son de quelques passages du Coran ; et même de plusieurs
pages des saints Pères. Thilo l’a bien montré depuis; et
M. Tischendorf, qui a repris en sous-œuvre le travail de ses
devanciers, n’a pas remplacé tout à fait son prédécesseur
immédiat sous le rapport de l’érudition ecclésiastique.
2. Spicil. Solcsm., p. lxiij, Ixviij, et 338.
3. Cela saute aux yeux dans certains mots qui m'auraient
pas l’ombre du bon sens s’ils n’étaient ramenés du latin
au grec. Rappelons seulement ce que j’en disais à l’occa-
sion des vipères (Mélanges, t. II, p. 135; notes 15 et 28) ou
sur la fourmi (ibidp. 189, sv.). On y reconnaît d’ailleurs
fréquemment l’usage du texte des Septante; et je l’avais
indiqué parfois. Malgré cela, il fallait montrer aussi que
notre moyen âge avait prisé ce livre.
L\. Mélanges d’archéologie, Ire série, t. I, p. 135-1/jl. Des
recherches postérieures faites par plus d’un homme sérieux
ne me donnent point tort dans une assertion que je n’avais
pas écrite au courant delà plume.
MÉLANGES D’ARCHÉOLOGIE.
ticulier cil fait de symbolisme et de tradition doctrinale. Bien que cette classification
vaille la peine d’être développée, ce n’est évidemment pas ici sa place. Une affaire plus
pressée en ce moment veut que nous suivions la série des griefs avancés avec plus ou
moins de bonheur contre le livre que nous avions patronné jusqu’à un certain point b
o° Le Bestiaire n’est pas de Tatien, cependant il est bien décidément g nos tique1 2.
Je n’ai voué aucune affection particulière à Tatien, tout disciple qu’il était de
saint Justin le martyr. Je confesse néanmoins que j’éprouve un faible pour l’histoire
littéraire des auteurs apocryphes. Les grands écrivains de l’Église n’ont pas toujours
été traités par leurs éditeurs avec l’attention ou le tact désirables. Que de fois on
a rejeté plusieurs écrits de leurs mains dans la classe des spuria, sans examen suffi-
sant 1 Comme il n’a pas laissé d’être fait d’assez bonnes recherches, en somme, sur
le gros de leurs ouvrages, il me semble que le temps serait venu d’opérer une
recension exacte sur ce qu’avaient écarté nos prédécesseurs avec le titre de dubia,
supposititia, etc., etc. N’y trouvât-on pas les véritables œuvres de quelque grand
homme, ce qui n’est pas clair, on pourrait y rencontrer des personnages qui ont dû
faire quelque figure dans le monde, puisque leurs écrits se sont faufilés sous un nom
illustre. Si usurpée que soit cette place à la suite, il y aurait lieu d’en chercher l’expli-
cation : hasard parfois, similitude de style ou de doctrine dans d’autres cas ; motif en
somme, ou prétexte, sur quoi la postérité peut s’enquérir auprès d’un éditeur titré.
Pour moi, qui voyais un Physiologus cité par les Pères grecs à plusieurs reprises dès
le commencement du me siècle, et qui trouvais un écrivain grec antérieur se vantant
d’avoir fait un livre sur ce sujet, n’avais-je pas quelque raison d’indiquer celui-ci comme
l’auteur extrêmement probable du traité inédit qui répondait aux pensées de cet
ordre? Ayant commencé par établir que le moyen âge avait fait usage de cet écrit,
je 11e m’étais pas fait faute d’indiquer que les vieilles versions latines calquaient
évidemment un original grec3; et déclarais que je préparais une édition du texte en
cette langue. Je 11e me croyais pas suffisamment en mesure avec les manuscrits de
notre Bibliothèque royale, et prétendais recourir à l’Italie. On eût pu alors comparer
absolument le style avec celui de Tatien, ce qui est toujours un peu chanceux. Jusque-là
j’avais cependant signalé certaines preuves plus ou moins décisives, qui pouvaient
mériter la peine d’une réfutation. Si la gnose semble écarter Tatien, c’est ce que je
n’aperçois pas clairement : ayant eu l’occasion d’écrire ex informata conscientia, que
manichéens et gnostiques, sous divers noms, sont oiseaux de même nichée primitive.
On y distinguera sans doute des variétés utiles pour l’histoire, mais qui, doctrinale-
ment, se tiennent de fort près4, et dont les différences 11e sont guère faciles à saisir
1. Tout jésuite que je suis, je n’abonde pas dans le
sens du Journal de Trévoux, qui demandait à quoi pouvait
servir la publication de Fabricius sur les Évangiles apo-
cryphes. Elle peut servir, ne fût-ce que cela, à rendre rai-
son de quelques passages du Coran ; et même de plusieurs
pages des saints Pères. Thilo l’a bien montré depuis; et
M. Tischendorf, qui a repris en sous-œuvre le travail de ses
devanciers, n’a pas remplacé tout à fait son prédécesseur
immédiat sous le rapport de l’érudition ecclésiastique.
2. Spicil. Solcsm., p. lxiij, Ixviij, et 338.
3. Cela saute aux yeux dans certains mots qui m'auraient
pas l’ombre du bon sens s’ils n’étaient ramenés du latin
au grec. Rappelons seulement ce que j’en disais à l’occa-
sion des vipères (Mélanges, t. II, p. 135; notes 15 et 28) ou
sur la fourmi (ibidp. 189, sv.). On y reconnaît d’ailleurs
fréquemment l’usage du texte des Septante; et je l’avais
indiqué parfois. Malgré cela, il fallait montrer aussi que
notre moyen âge avait prisé ce livre.
L\. Mélanges d’archéologie, Ire série, t. I, p. 135-1/jl. Des
recherches postérieures faites par plus d’un homme sérieux
ne me donnent point tort dans une assertion que je n’avais
pas écrite au courant delà plume.