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L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré — 9.1876

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https://doi.org/10.11588/diglit.6770#0006
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NOUVELLE PRIME GRATUITE DE L'ÉCLIPSÉ

DOMÉE A TOCS LES NOUYEM ABONNÉS DTN AN OU AUX ABONNÉS ACTUELS QUI RENOUVELLERONT LEUR ABONNEMENT D'UN AN PAR ANTICIPATION

UÉCLIPSE a acquis le droit d'offrir en prime à ses abonnés le nouveau volume de notre collaborateur Touchatout :

LES 50 LETTRES RÉPUBLICAINES DE GERVAIS MARTIAL

Formant un bc»n ct fort volante grand in-8°

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ments

PETIT GODE ÉPISTOLAIRE

A L'USAGE DES DÉPUTÉS SORTANTS

Les princes d'Orléans — qui no sont pas coulumiers du
fait — viennent enfin d'avoir une bonne idée. Vous verrez
qu'ils n'auront pas consulté leurs amis !

Cette idée consiste à engager les électeurs à reporter sur
d'autres les suffrages nombreux que ceux-ci leur destinaient.

Ce que cette idée a de bon, pour les princes, c'est qu'elle
les préserve de remporter une veste dans les élections pro-
chaines.

Elle leur laisse même le droit do dire :

— Ah ! si j'avais voulu me présenter !

11 nous semble qu'il y a là une indication précieuse pour
tous ceux de nos honorables qui sont en passe de sortir
plus ou moins meurtris du grand combat de bulletins en
perspective.

Un éditeur parisien, qui paraît partager cet avis, a voulu
le rendre pratique.

Il met en ce moment sous presse un Petit Guide éf-isto-
laire à l'usage de messieurs du Centre-droit, ou les Cent et une
manières de refuser un siège qu'on ne vous offre pas.

Les députés sortants, qui ne tiendraient pas à se montrer
aux populations, écœurés, bossues, aplatis, trouveront là
quantité de prétextes honorables pour se retirer noblement
de la lutte avant qu'elle ait commencé.

Du reste, l'épigraphe :

Quel est le plus sûr moyeu de ne pas

être rossé ?
C'est d'esquiver le combat.

trahit l'esprit de ce petit volume d'une manière assez trans-
parente.

Nous nous faisons un plaisir de donner quelques extraits
de cette œuvre aussi pratique qu'intelligonte :

le refus médical

« Aux électeurs d

[Ici le nom du département.)

« Chers électeurs,
« C'est avec un vif regret que je me vois obligé de refuser
la candidature que vous m'offrez dans des termes si pres-
sants.

« Ma constitution, si robuste en apparence, sort très-dan-
gereusement affectée de ces luttes parlementaires que vous
daignez qualifier d'« épiques. »

« Il parait que le sang qui colore mes joues d'un si vif
incarnat est le produit de la bile, et que les muscles, dont
j'avais cru jusqu'ici pouvoir me montrer fier, sont le témoi-
gnage d'une désorganisation générale. C'est au moins l'avis
du médecin qui me prodigue en ce moment ses soins.

* Comme première condition, comme condition expresse,
il m'impose, si je veux en revenir, le repos le plus absolu.
Il nie faut donc dire adieu aux discussions ardentes de la
tribune.

« Croyez bien qu'aussitôt guéri, je me ferai un plaisir de
revenir prendre mon rang parmi les courageux cham-
pions..., etc. »

(Signature.)

(bote.)

le refus commercial

" Monsieur et cher électeur,

u Interprète, me dites-vous, des vœux de tout un pays,
Vous me sollicitez avec instances de laisser inscrire mon
nom sur les bulletins de votre arrondissement.

« En vous remerciant de cette marque d'estime, qui est
la plus douce récompense que je puisse attendre de mes
travaux parlementaires, vous me permettrez cepenlant
d'y répondre par un refus.

« U y a deux manières de servir son pays :

« En lui donnant des lois.

« En lui vendant de bonnes pâtes alimentaires.

« Le soin que je donnais à la confection des lois, m'obli-
geait forcément à négliger mes pâtes.

« En revenant prendre la direction de ma maison de com-
merce, je fais jouir de nouveau le public d'un produit
d'une fabrication exceptionnelle.

« Ne vous semble-t-il pas que je puis rendre ainsi, à mon
pays, des services bien autrement précieux que ceux que
j'ai été à même de lui rendre pendant la durée de la session?

« Dussiez-vous m accuser d'un excès de modestie, c'est,
monsieur et cher électeur, l'avis avec lequel j'ai l'honneur
d'être..., etc. »

(Signature.)

(Date.)

le refus bon enfant

« Mes chers électeurs,
« Je suis fâché d'avoirà répondre par une fin de non-rc-
cevoir à vos sollicitations si vives, mais il m'est absolument
impossible, pour des raisons de famille que vous compren-
drez, de continuer à vous représenter à la Chambre.

« Ma belle-mère a une vie très-réglée. Il lui faut tous les
soirs le potage sur la table, à six heures et demie très-pré-
cises. Or, c'est souvent l'heure où je monte en wagon à
Versailles pour revenir dîner à Paris. De là, des scènes de
ménage dont je vous épargne le détail.

« De deux choses l'une :

« Ou je devrais continuera servir fidèlement vos intérêts
et je continuerais .alors à mécontenter ma belle-mère.

« Ou je satisferais ma belle-mère et ce serait alors aux
dépens des intérêts losplus sacrés.

« Entre ces deux propositions je n'hésite pas.

«< Partisan de la paix intérieure, je résigne entre vos
mains les fonctions que je m'honorais d'en avoir reçues,
« Votre,,,, e{c. »

(Signature.)

(Date.)

le refus solennel

« Monsieur,

« Je vous remercie de la lettre dans laquelle, au nom
d'un « groupe nombreux » d'électeurs, vous me conjurez de
reprendre « le timon d; s affaires politiques. »

« J'ai été très-sensible à l'approbation intégrale que vous
donnez à mes. votes. Il est doux de se trouver en commu-
nion de sentiments avec un esprit aussi judicieux, aussi
éclairé que mo paraît être le vôtre.

« Toutefois, un détail me peine.

« Sur la réunion de SOii électeurs qui a acclamé, dites-
vous, ma candidature, il parait que bi)2 voix seulement se
sont prononcées en ma faveur.

« 11 m'est dur de penser que trois des assistants m'ont
jugé indigne de recevoir leur mandat.

« Ce fait dictera ma décision. Fier de représenter mon
département tout entier, je ne puis me faire à l'idée que je
n'en représenterais qu'une partie, fût-ce la plus nombreuse,

« Vous comprendrez le sentiment de dignité qui me fait
repousser la oandidature.

« Agréez, etc. »

(Signature.)

(Date.)

le refus laconique

(Par le télégraphe)

« Versailles... janvier 1876.
« Pas compter sur moi pour Sénat. — Viens de visiter
nouvelle salle. — Essayé sièges. — Sont trop durs. »

Nous nous bornerons à la reproduction de ces courts
fragments.

Les autres lettres que nous pourrions reproduire n'offri-
raient, comme celles-ci, que des variations plus ou moins
heureuses sur le thème connu : « Ils sonttrop... dura! »

PAUL PARFAIT.

LE PETIT ORANGER

i

Une portière avait reçu de ses amis, — les portiers ont
parfois des amis, — une demi-douzaine d'oranges, ces
pommes d'or des Hespérides de Valence.

C'était au temps des étrennes, temps néfaste où l'on dis-
tribue à ses inférieurs le portrait des monarques régnants
ou défunts.

La portière charmée invita, — les portiers ont parfois de
bons mouvements, — ses parents à prendre leur part d'une
salade d'oranges au rhum.

Cette orgie eut lieu le 2 janvier de l'année où l'on me
permit de monter seul en omnibus. — Il y a longtemps de
cela.

Après s'être léché et pourléché les babines, — les por-
tières, les vieilles surtout, ont parfois des babines, — les
hôtes de la loge décampèrent.

Restée seule, la portière eut une idée étrange, — les
portières ont parfois..., — die résolut de créer quelque
chose.

Et, prenant un pépin oublié avec plusieurs collègue» sur
le bord d'une soucoupe, elle l'ensevelit dans une caisse à
Heurs, à moitié remplie de terre et de marc de café.

La nuit qui suivit cette belle expédition, la portière eut
un sommeil agité.

Mais le frére Lèotade survenant avec son histoire de figues,
elle oublia complètement, — les portières oublient sou-
vent, — la caisse et son contenu.

Son esprit fit élection de domicile dans les vertueuses
colonnes du Constitutionnel-

Pendant ce temps, son chat, — les portières ont toujours
un chat, — son chat, dis-je> se prélassait sur la caisse où
s'accomplissait le mystère de la germination.

Cet intelligent animal avait l'habitude de se lécher la
patte, pendant des heures entières, sur l'embryon végétal.
Le cœur de pépin dut bien souffrir I

II

Vers les ides d'avril, un phénomène mit en émoi le quar-
tier.

Un filament verdâtre, tremblant au moindre souffle, d'une
hauteur de 0 m. 01 centimètre, était sorti de la terre noire,
dans la caisse verte qui avait quatre jolies boules aux
angles.

Voyant ce, la portière sentit une sorte de maternité au
fond de ses vieilles entrailles; elle avait mis au monde un
oranger !

Les locataires du premier, la bonne du second, la femme
de ménage du troisième, le porteur d'eau, le facteur, le
boulanger et quelques autres personnages de distinction,
daignèrent visiter le nouveau-né.

Le Sénat romain se rassembla bien pour un turbot!

— Très-drôle ! — Singulier ! — Curieux ! — Ah ! parfait !—
Il n'y a que vous pour ces choses-là ! — furent les exclama-
tions de chacun,

— Nous mangerons de la récolte ! dit le facteur au por-
teur d'eau qui sourit en faisant voir ses dents, comme le
tableau de dentiste du passage Jouffroy.

— Certainement, répondit la portière, — les portières
répondent parfois, — en versant une goutte d'eau dans la
caisse en manière de baptême botanique.

Dès ce jour, la caisse nourrice et l'enfant de sa propre
terre furent entourés de soins.

Le chat, ce brave animal, alla paître, sur des injonctions
supérieures.

Il trouva, dit-on, le mou de l'exil bien amer, ce pauvre ré-
fugié félin ; mais sa chère patte le consola.

Il continua, comme par le passé, à la lisser du bout de la
langue, depuis le lever de Phœbus jusqu'à celui de Phœbé.

III

Dix ans se sont écoulés depuis l'insoription de la nais-
sance du petit oranger, sur les registres de la nature.

Dix ans! bigre! En ce temps-là je soulevais le prix d'his-
toire naturelle à la force du poignet, dans les officines uni-
versitaires !

Heureux temps! — Pur et discret comme un parfum an-
glais, je ne m'amusais pas à jeter mon cœur fanatique sous
les roues du ohar de l'amour, ce Bouddha impitoyable de la
Djaggernat occidentale.

Hélas ! hélas ! et quatre fols hélas ! comme chante Ophélie.

Mais revenons à ma plante.

Quand je retrouvai mon petit oranger, je sortais du col-
lège ; je m'asseyais au banquet de la vie, la tête farcie des
vieux mots, des vieilles tournures, des vieilles métaphores
de l'enseignement classique, grossis des visions d'Accurse et
d'Aguila, ainsi que le dit le père Boileau, de galante mé-
moire.

Mais j'avais sauvé mon cœur du naufrage.

Aussi ce fut avec émotion que je revis la petite plante
dans sa caisse verte. Je lui avais jadis conservé plusieurs
fois la vie en la débarrassant des chiendents qui voulaient
l'étouffer, les Mirecourt qu'ils étaient.

Mon oranger avait grandi. C'était un petit arbre, les oiseaux
du ciel ne venaient pas encore se percher sur lui, comme
dans la parabole, mais c'était déjà un petit arbre, au tronc
noir, lisse, branchu comme Absalon.

C'était un petit arbre, oui, comme les enfants sont de petits
hommes ; mais quel malingre enfant !

Il avait froid sous le ciel de Paris, ce fils de l'Espagne.

Ses feuilles — il avait des feuilles ! — étaient minces,
ternes — dans son pays elles sont si brillantes! — Leur
teinte était pâle, vert-pâle.

Je le revis, ce petit oranger ; il me fit l'effet d'un phthi-
gique, au soleil, dans le coin de la croisée qui donne sur la
rue, un peu au-dessus du ruisseau.

IV

Souvent, très-souvent, presque tous les jour», je passais
devant mon petit oranger.
J'étais son unique ami.

Depuis longtemps la portière ne s'en occupait plus ; à
peine l'arrosait-elle encore lorsqu'elle nettoyait sa carafe
avec des coquilles d'œuf.

La plante veule me faisait pitié.

Et puis, disons-le, invinciblement mon esprit s'était habi-
tué à trouver une ressemblance douloureuse entre mon
petit oranger et la fille du peuple, pâle, maigre, dont les
cheveux, comme des rayons blonds flottant au vent, parfu-
ment ct éclairent seuls les ruelles noires.

Ce n'était plus une plante, c'était une fleur que je voyais
s'étioler.

Mon petit oranger eut trois fleurs ; la fille du peuple
fleurit aussi : sa jeunesse, sa fraîcheur, sa beauté s'épa-
nouissent au soleil de seize ans.
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