8*,Année.
— N« 311.
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JOURNAL DES PATS OCCUPÉS PARAISSANT QUATRE FOIS PAR SEMAINE
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LES ILLUSIONS DÉTRUITES!
Cm n'eal pas dans les journaux français el anglais
Hu 7 et du % décembre qu'un trouvera l'impression
réelle qu'a produite dans les grandes capitales de
l'Entente le nouvelle de la capitulation de Bucarest ;
m'est dan* ceux du 29, du 30 et du 31 août.
C'est en faisant revivre un instant les espoirs el les
Illusions que suscita, il y a trois mois, l'entrée en
■juerre de la Roumanie aux côtés de» Alliés qu'on
pourra mesurer l'étendu» du désastre moral qui vient
«e frapper le prestige de l'Entente.
Rappeler aujourd'hui ce» illusions détruites, c'est
taire œuvre salutaire I
C'est prendre une rude « leçon de faits », une
*> cure de vécité » qui ne pourra être que profitable
fcux*espritj sains et sincères.
La grande presse de Paris et de Londres ■ com-
aoencé par saluer l'entrée en guerre de la Roumanie
comme une preuve éclatante que la défaite des
Puissances Centrales était devenue inévitable et pro-
chain*.
Ecoutons M. Alfred Capus, dans le « Figaro »
£0 août) :
« Avant m.' ;ie «es conséquences militaires, la déclara-
tion d* guerre de la Roumanie à l'Autriche présente un
Intérêt moral d'une importance décisive. Elle marque
l'instant où lea revendicalions nationale* d'un noble paya
■npotent au monde 1» certitude de la défaite allemande...
Ce qua dis maintenant elle noua apporte, c'eat un
surcroît d« confiance, c'*st ana preuve1 nouvelle ajouté* à
tant tVautras qua l'Allemagne ne peut plut échapper h aon
festin et qu» aon humiliation et aa raine tout Jugées
accessoires pu l'ansembl* de l'humanité... »
Dans le « Figaro » du 31 août, Polybe-Reinach
écrivait :
■ Ce n'aat pas cette fois au accours du vaincu, c'est à
rappel du vainqueur qu'arrive l'année fraîche...
L'armée nouvelle, encore intacte, quand aile lurvienl
à la onzième heure, suffit à changer la défaite en victoire.
Quelle accéliratlen donnera-t-ell* à la victoirr, quand elle
■jouta aa force d'impulsion a celle d'une armée qui a déjà
îavautag* I a
Le « Temps » du 31 août :
c L« témoignage de )a Roumanie achèvera peut-être
4'écieirer la* consciences qui u'osant pas encore condamner
aUtunlivament les empires gerinaniqu**. La conviction da
1 r*i rersUaMuae et da g*av*ra*c*ttfM ds Baser*** les libéra da
s»tir- crainte* en leur montrant que la certitude de victoire
4ae alités m ripas*. .. »
Lee « Débats », autre journal grave, écrivaient le
16 août :
a L'annonce de cet»* nouvelle déclasation de guerre est
■usai déprimant* pour l'ennemi qu encourageante pour
•eus : *U* cenariaeara au déséquilibre das résistances
an.irides semas.* aa désé^ullibro des forces matérialisa, et
asdan laa Alliés à remplir la tache difficile de bien con-
vaincra les Allemands que leur règne sur le monde n'est
iacadéoriflBl pas dans les voies de la Providence. »
En province, on ne s'est pts moins trompé qu'à
Paris. Témoin la «Liberté du Sud-Outst», qui a écrit:
a La Roumanie sa joint tux défenseurs de la civilisation
pour porter aux barbares le coup décisif. Honneur k alla
et spse loua les peuplas de l'Entente saluent avec joie *t
taconnaissanc* l'épé* qu'elle met dans la balance pour le
triompha du droit, a ■
Dans le « Journal » du 28 août, un journaliste
tuesi réputé que M. Saint-Bnce écrivait cette phrase
sju'il est utile de lui rappeler aujourd bui
c La décision de la Roumanie «t intéressante à en
aotr* point de vue encore. Elle préacntera la garantie d'un
eeup d'oeil confirmé par l'expérience. M. Draliano n'a ja-
spais dissimulé aon intention de ne parler qu'à coup sûr.
Lue rsselntlen qui donne de tels gagts de clainovauce à
La valeur d'un arrêt tans appel. »
En tête de sa m Victoire « (29 août) Hervé jubilait :
a En attendant que nous puisaonj crier: a Voilà les
Grecs 1 *, ce qui ne taurail plut guère tarder, au-
jourd liui nous pouvons crier de bon cœur à nos poilus :
t Courage ! Voilà lea Roumains I Voilà un renfort da
600.000 poilus qui arrivent à voire rescousse I »
u Car c'eat à nos poilu», aux poilus de toutes les armées
alliées que nous pensons tout d'abord en ces jours d'allé-
giesse, a ceux qui ont jusqu'ici échappé à la mort, à ceux
aussi qui sont tombés glorieusement, et dont la Joie efll été
si grande à voir ae lever à l'horizon-ce nouveau signe certain
de la victoir* I ..
« Et nous sentons nos cœurs tressaillir de joie à la pensée
que demain, dans la. prison où leurs geôliers allemands les
tiennent séparés du monde, nos frères des départements en-
vahis, nos frères da Uelgique, de Serbie, de Transylvaine et
dr Pologne, do Trenle et de Trieste, spprendront la bonne
nouvelle, qui aéra pour eux le sûr présage d* leur prochains
délivrance. ...»
Le 30 août, la presse parisienne publiait un télé-
gramme de Bucarest, qui peignait en ces termes l'en-
thousiasme roumain » :
Bucarest, ag août, a Les nouvelles reçues des divers dé-
partements indiquent que partout la déclaration de guerre
à l'Autrichc-flongrie a été-accueillie avec autant d'enthou-
siasme qu'à Bucarest. -
A Constants*, à Jassy, à Turnu-Severin, à Giurgevo, à
Cralova, des manifestation» se sont organisées et la foule e<t
allée crier sa coniiance autour des'casernes, où les troupes
répondaient par des clameurs belliqueuses et des chants pa-
triotiques. Les drapeaux alliés llotlunt à toutes lea fenêtres
al pavoisent lea monuments publics.
Plusieurs milliers de personnes, comprenant toutes lea
notabilités de Bucarest, ic sont rendues dimanche soir de-
vant les légstions alliées et ont frénétiquement acclamé les
noms des puissances de l'Entente. L'enthousiasme était parti-
culièrement vibrant devant les légations de Russie et de
France.
Tous les journaux saluent l'eufréo en guerre de la Rou-
manie comme la .date la plus glorieuse de l'histoire natio-
nale. Lia consacrent des articles chaleureux aux hommes
ili.nl le patriotisme, la clairvoyance et la patiente diplomatie
eut permis à la Roumanie de se préparer à remplir son
grand devoir avec le plus possible de chances de victoire et
lui ont assuré un triomphal avenir, SIM, Talie Joncsco, Fili-
pesoo, Rrntinno. »
En même temps, les journaux français publiaient
de longs télégrammes montrant l'Allemagne en proie
aux plus vives inquiétudes. Ecoutons le » Petit Pari-
tien » du 30 août ;
a Le peuple allemand sclitit hier soir le vent de la défaite,
lorsque les déclarations da guerre d« l'Italie à l'Allemagne
et de la Roumanie à l'Autriche furent connues par les corn-
•muniquéà WotfT.
Ces nouvelles produisirent an effet ssJbbbbXsXss ; elles ro-
« sentirent comme un brusque arrêt de mort, bien que la
foule dea dimanches fut dense dons tous lea endroits publics.
. .T'est ua nid* réveil, Isa illusions croulent. On reconnaît
eue sous Isa plans allemande, notamment celui de la mardis
éventuelle de Hlùdenburg, sont anéantis.
De mémo l'armés bulgare-turque, «smuiandé* par
afaekensen, en Bulgarie, voit son ride réduit à une difficile
défensive. ...»
Et le lieutenanl-colonel Roussel, critique militaire
du même journal appuyait ce noir tableau de toute
r»uicrite de son jugement, en écrivant :
a La liaison entre les Russes et lea Roumains existant de
tait par l'emprise qu* lea premiers ont fait* sur les Car-
pathes, l'invasion 4* la Hongrie devient an fait uou seule-
ment posstbl*, mais très prochain. . . .
Quant aux Bulgares, ils ne tarderont pas à regretter de
s'être Jatéa ai ostentatoircment en Macédoine. Tolcl qu'une
armée russe se préparc k leur tomber dans le dos eu traver-
sent la Dobroudja, largement ouverte à leur action.....
En vérité, lea-nuages qui chargeaient l'horizon oriental
changent d* place. Une brusque saute de vent vient de les
jeter sur laa empires centraux. » _ •
Dans un autre article du même « Petit Parisien »
le lieutenant-colonel Rousset affirmait encore :
• La Dbbroadja ouverte aux Russes — el ceux-ci y août
déjà engages — c'est pour les Bulgares une morsure au
talon qui les force a sa retourner, Alors, le général Ëarrail
aura b«iu jeu pour l'cagager à leur suite sur la route d«
Sofia, et lea Grecs pour reprendre la Marèdoine, s'ils U
veulent.
Ainsi, les satellites de l'Allemagne sont frappés les pre-
miers, et c'est dans l'ordre le compte de celle-ci, quand
seront coupes tous s<i tentaniles, en sera moins difficile à
régler. •
Dans L' « Echo de Paris » du 29 août, M. Jean
Herbelle écrivait :
a Les Allemands ont deviné le péri! depuis de longue*
semaines. Us le discutent abondamment cl gravement. Par
quelle réaction miliUne allaient ils essayer de l'écarter P
a Ils n'ont pas réagi, et la Roumanie* intervient. Aux
yeux du monde entier, c'est une grande preuve d'embarras
eu de lassitude que l'Allemagne s doiiné là..........
« Maiut.nant, le front austro-allemand tS trouve accru
démesurément : de 5oo kilomètres environ. . . . L* llongris
sst ronée à l'invasion, la Bulgarie eut prise tntre deux feux,
In Turquie est plu* abandonnée qu* jamais et l'Allemagne,
tn proie, à la disette, ne peut plus compter sur I» blé rou-
main. »
u*A la date du 37 août, les calendriers de l'avenir pourront
Inscrire : victoire décisive de M. Briand. »
Les Anglais, eux, se sont-ils moins cruellement
trompés que leurs confrères parisiens? Voyons un
feu et donnons d'abord la parole au fameux colonel
tepington, critique militaire du «. Times », dont le
jugement est reproduit par les journaux parisiens du
80 août :
u L'intervention de la Roumanie à coté dessablés a une
Importance- considérable à tpus lea points de vue. Cette
adjonction d'un nouveau cumin ade venant dans nos rangs
sera bien accueillie par tous les Ltats qui combattent*TAlle-
magne et ses dupes... ([ 1 où sont aujourd'hui les dupes p —
Ls Héd.)
La situation stratégique, dans son ensemble, indique une
combinaison offensive roumaine d'accord avec le* Russes '
comme la plus avantageuse pour l'intérêt général.
Ctttc opération inciicrn l'armée roumaine en Transyl-
vanie, où la majorité de la population sera en faveur des en-
vahisseurs.
Il y aura sans doute do nombreux partisans en faveur
de son adoption.
D'un autre côté, en passant le Danube, en avançant sur
Sofia et en bridant la puissance bulgare, d'accord avec l'ar-
mée alliée du Salouique, aela constituerait un* opération jus-
qu'à un certain point séduisante. Celta dernière combinaison
sera sans douta choisie au cours d'une doliburnbon des aihés
avec la Roumanie. Les événements nous en montreront
bientôt le résultat.j>
Le m Daily Clironicls » écrivait le même -jour :
« L'intervention roumaine est le plus grand facteur da
hausse pour les actions d** alliés qui soit surv«nu depuis
'le début de ta guerre. Ella modifie complètement les pers-
pectives de la lutte- engagée sur les théâtres de lu guerre à
ViM «t au Bod-EcL »
Les « Daily News » :
a L'intervention de la Roumanie est, pour 1m allitis, la
tournant le plus décisif depuis le commencement de ta
ruerre, car elle modifie toute la situation sur iea théâtres
Sud-Est et Bal des opérations.
La répercussion on Grèce de eett* intervention sein des
plus importantes, car elle signifie >• triomphe final de
at. Veniteloi. 11
Le * Daily Telegraph » ,
« La plus forte des armées, non encore engagées dans
ls guerre, vient d'entier dans le camp des alliés. Lo gui^re
sntr* dans uns phase nouvelle qal promet de se dsvr-lopper
d'une facan plus rupids «t plu* MnaoUon^lle as'aurime de
eelle* dont nous avon» été témoins leeela Pélxn d» l'ennemi,
11 J a deux ans. La situation militaire dans les Balkans sYât
modifiés dans nne n«it, de façon à glacer d'effrei les
soiirg les plus remplis d'espoir des smprres centraux... ■
Ces quelques citations — que nous pourrions multi-
plier à l'infini — Euffiront pour donner une idée de la
truelle désillusion qu'on ressent aujourd'hui à Paris
et à Londres. Et maintenant, lecteurs, comparer K
ces rodomontades, cruellement démenties par l'ironi-
?ue dtatm, ce que la « Gazette des Ardenncs • du
■ septembre (N* 253) écrivait dans'son article da
fond, consacré 4 l'entrée en guerre tle la RoumnnieK
Nous disions alors :
« L'Histoire jugera I* côté moral d* cette guerre. Elle
découvrira aux yeux d'un monde écœuré tous les fils d* l'in-
trigua qui prépara la catastrophe meurtrier*, et qui s'efforce
à présent d* rétablir par tous les moyens la partie compro-
mise, où les gouv«rnement< alliés engagèrent leurs peuples.
L'heur* n'est pas venu* encore de cette liquidation
morale, d'où la «politiqu* d'affaires», tell* qu'ell* s* pra-
tique là 06 gouvernent le* cliques d'■ avocat*-politiciens ur
sortirs flétrie. L'heure est à l'action virils et aux grand fa
réalisations. A Bucarest comme à home, cS n* sont pas lea
hommes d'action, ce n* sont pal les soldats qui ont opté
pour ls gucrid. Ce sont les politiciens aveuglés par lea gran~
des promesses et enchevêtrés dam l'intrigue diplomatique»;
où triomph* la rus*.
C'est avec un calme complet que )cb peuples en armes
d'Allemagne et d'Autrirhe-Hongri* at leurs vaillants alliés
turcs si bulgares accueillent l'entrée tn scène de la Hou-
manie, pefsnadés qua celle-ci t'apercevra bientôt, comme
ntalle, que ses politiciens responsables viennent d'engager
dans"'nne vole fatale la peuple dont Ils tonaJent en mains la
destinée.
La presse de Paris et de Londres, si hshile à snbtsituei
l'Illusion à ls réalité, ns manquera pas d'exploiter l'entrée
eu lice de la Roumanie comme étant un signe précurseur da
ls « victoire » tant attendue. Lea lecteurs dégrisés s* rap-
pelleront cependant que l'an passé, déjà, lorsque l'Italie
atlaqua l'Autriche, les journaux parisiens tinrent I» mêros
langage. Avec bien plus de raison même : clr l'Italie repré-
•rntait une force autrement sérieuse que la Roumanie Et
pourtant, au bout i'un an, qu'a-t-elle atleirtt t Non seule-
ment elle n'a pas rapproché la I victoire n alliée; celle-ci
a'est même éloignée depuis..... _
Tous les succès des armes austro-allemandes, turques et
bulgares, la Roumanie espèrc-t-elle pouvoir les réduire à
rien P E*père-t-el!e vraiment briser de sa frêle épé* l* bloo
d acier contre lequel les, plus grandes puissances militaires
de l'Europe s'acharnent en vain depuis deux ans »....
Quoi qu'il en soit, les mauvais bergers «jtl conduisent
le peuple roumain ont accepté ds lai faire suivra la v*l* das
sacrifices; eh l'ont précédé d'antras petite Etat*, vasseaii de
Icl» grands « prntecteara u ; ta Bslflqut, La StraJ* at le
Monténugre. N r.» noai garderons comme t*aj*srs de pré-
dire l'avenir. Nous Ignorons le sert qall réserve à ls àUa-
matdt, Miiis noua savons use le granit sur lte.usl dis s'ap-
prête à mordre, est trop dur pour ses dents I »
Voilà en quels termes sobres el sans forfanterie —
convenez-en, lecteurs î — la u Gazelle des Ardcnnes »
répondait, le 1" septembre 1016,. aux tHustona débor-
dantes de la presse parisienne. Le destin a marché.
Aujourd'hui les faits nous donnent lumineusement
raison 1
BULLETINS OFFICIELS ALLEMANDS
Granu Quartier général, 9 décembre 1019.
Théâtre de la guerre à l'Ouest.
Groupe d'armées du Kroiiprmz Hupprecht.
Dan* la région de la Somme ls lutte d'artilleris fut
violent* t certaines heures ; de fortes palrouillee, s'avanç&nt
nuitamment contre nos positions prés dy Trjnslov, furent
repousséas par nos tirs cl en corps a corps , an certain
nombre d'Australiens restèrent entre nos mains.
Théâtre de la guerre à l'Ett.
Front du feldmaréchal î'nnoe Léopold de Bav-iire,
Au Nord du lac de Naroct, dans le défilé de Skory,
plusieurs compagnies russes attaquèrent vainement nos po-
sitions après une préparation d'artillerie.
FEUILLETON DE La iGAXBTTM DUS AHUGNNES* tl
il
LE
Par Pierre Hael.
Quant an transport « Sirdar Kttchener », il était
iléjà hors de l'eau, st le* deux officier» du ■ Vengeur ■
fuient assister à son départ, aussi bien qu'à celui ds
a Undminted », remorqués l'un et l'autre par un
steamer de moyenne taille, et oonvoyés par un cuirassé
te un.croi*eur. Il était manifeste quo les doux vais-
seaux ne rendraient plus aucun service 4 l'Angleterre,
au moins pondant la présente gueire. Avec les trois
iestroyers et les deux croiseurs coulés le matin, cela
portait à sept le nombre des unités de combat perdues
Mi la flotte britannique, alors que les peites de *la
ïranc* n'atteignaient pas la moitié de ce chiffre. Celui
iea hommes tués ou noyés, blessés ou disparus ne serait
Enuu que dans quelques jours. On savait toutefoia, à
iricnt, que lo corps de débarquement anglais avait
»erdu, sn quatre heurta de combat, la moitié de iou
aflcQtif.
« Commandant, — fit observer rcapectueuacment
Durée, — je crois que la prudence noua commando da
anus immerger derechef. La bonne foi n'a jamais étd
Ine vertu saxonne, et je ne suis pas sûr que, malgré
Jermistice, le premii-r destroyer que nous rencontre-
lions n* nous coulerait peint.
• Vous avez raison, mou ami, — répondit Philippe,
— et c'est maintenant plus que jamais que nous devons
sj*«r do prudence. »
Le c Vengeur » s'eufnnça dono de nouveau à ame
Cfondeur de dix mètres et a'avança à une allure /*-
lie.
Il ne voulait point qnitter ces parsges avant de **-
s»ù- quell* direction allait prendre l'aérostat.
Yen trois heures, du matin, Jeamont ramena la
tous-marin au point où il l'avait placé l'avant-veille,
c'est-à-dire sous-les roches sombres des tilénans, en face
de la côte de Coucarueau. De ce point, il espérait pou-
Toir surveiller lea alléeH et venues du ballon. Au jour,
grâce au périscope, il constata avec satisfaction que la
machine aérienne ne s'était point éloignée de Lorient.
Seulement, elle no planait plus sur la terre; elle se
tenait à deux milles en nier à une altitude moyenne de
quatre cents mètres, en communication avec la flotte
anglaise. Son guîde-rope traînait au-dessous d'elle et
servait de til télégraphique pour l'échange dos signaux.
a Oh 1 — fit Jeumont, dont les doigte se terraient,
— si, seulement, il nous était possible de mettre un
Instant la main sur cette corde ?
— «Que feriei-vous f demanda Durée, surpris par
l'exclamation d* son chef.
— Je tenterai* l'escalade. Ils sont aix hommes dans
la nacelle. Ce serait une torte d'abordage. Nous mon-
terions à Tassant. >
L'euseigny hocha la tête en signe de doute, ou plu-
tôt de dénégation.
« Monter à l'assaut du ballon à l'aide de ce fil, eua-
péndus comme dea araignées ? C'est une idée hurdie,
eertei. Mais n* voyez-vous pns, commandant, que l'axe-
tution *n *st impossible, Oublies-voui notre attaque à
Quidel et comment le seul poids additionnel du notre
brave Pénélan empéoha le ballon d* a'elever ? S'ils
n'avaiant point ooupé l'échelle, nous lea prenions, lia
n'ont pas hésité à nous laisser entre les mains leur ca-
marade, cet Aylesford, dont ils sont venus réclamer
tout à l'heure la vie contre celle de votre sœur.
— Sans doute, — répondit Philippe. — Aussi n'ai-
ie pas fait le rêve de grimper à lescalads comme à
raid* d'une corde à nœuds, mais bien de la* surpren-
dre, sn profitant d'an instant d'inattention pour nous
substituer à un nombin égal de leur équipage.
— Hum 1 — fit encore Durée, pensse-vout qu'un
somme comme Cecil Woodman se laissa surprendre t
■— lion, k vrai dire, je ne le ptnse pus, mon ami.
Vais je u* «ai* pourquoi cette idéo siiifnilitre mu liante,
•ourquoi, depuis qua je sais ma au;ur prisonnière, muis
vivant*, j'éprouv* un espoir insensé, que rieu 110 justi-
fte, de m'emparer de ce ballon.
— Vous Bavez que je vout suis dévoué corps et ame,
■— répliqua Durée.— Que l'occasion se présente et noua
tenteruns cette folie... »
ilais, tout en prononçant oes paroles, le jeune
homme attachait sur son chef un regaid si craintif que
Philippe put croira que sou second doutait de la toli-
dito de sa raison. Un ballon pris par de» matelots d'un
navire sous-marin, qm plus est, n'etait-oe pas le chef-
d'œuvre de l'imagination la plus déréglto ? L'n roman-
cier même n'aurait pas eu nue senibluule conception.
Et, cependant, JiMirmmt, sann lais-er voir à Uureo
qu'il lisait dans bou eapiit le soupçon qm venait d'y
éclore, serra la uiaïu-de son secund avec la mémo ellu-
tiou amicale qu il mettait dans toutes les manifesta-
tions de su confiance.
■ liepo*cz-vouB, Duruc, — lui dit-il affectueuse-
ment. — J'oublie, à bavarder ainsi, que nous n'avons
pas dormi depuis trente-six beures.
— Le repos ne voua ost-il pas uustd utile qu'à moi-
mÊnie, commandant Y
— Je me reposerai pendant la nuit qui va venir et
je vous laisserai tout le soin du a Vengeur ». Hoprenez
donc des force» en attendant. »
11 avait MOion. Tout le jour, éveillé et soutenu par
la pensée de la lutte terrible engagée entre la machine
aérienne et la machine lOUS-mtvnne, le commandant du
t Vengeur » ne rkchit point sous le poida eexasant de
la fatigue.
Mais, le soir venu, sachant qu'il pouvait a'ôn -re-
mettre entièrement à ton second du soin do gouverner
1* batuau invisible, Jeumont a'héiita plus à accorder
à set membres liarn^ta un sommeil réparateur. Il alla
donc se juter 111 r aon cadre, ou tl dormit sans un mou-
yement d* sept heures du soir à quatre heures du rnntjn.
A peina éveille, il fut sur pied et entra vivement
•ans 1* kiosque- ou Durée, penché but le verre dépoli,
ebservait la mer et le ciel
• Nous marchons doncP — questionna-t-il avec une
certaine ansit-tp.
— Oui, commandant, — répondit l'enseigne, ta lu!
désignant du doigt le» tableaux successifs de 00 ciné-
, BtatogTuphe animé, — nous murcliuii»
— Ali ' depuis quand niarcln)iis-i)oU3, et pourquoi,
s'il tous plaît, Duiei '■
— DepuiM une heure et demie. Pourquoi f 11 vu-uij
suffit d'observer vous-même pour vous fournir une ré-
ponse satisfaisante, s
L'ofiicier t'absorba à ton tour dans la contempla-
lion du merveilleux tableau vivant.
« liais nous tommes an pleine mer, Durée P — s'iî-
exia-t-il.
— Oui... Nous avions doublé, à une heure du ma-
tin, la pointe de Penmirch et nous sommes présente-
ment à la hauteur ds l'entrée de la Manche. Il est
certain que l'ennemi va nous conduhv ainsr-gusqu'A la
côto anglaise. >
Jeumont n« parlait plus. Il s'était absorbé dans la
contemplation du tableau projeté sur la tuifnce du
Terre.
A mesure que le jour gi imdissait, les images deve-
nait nt plus nettes, plus précises. -
Maintenant il voyait distinctement l'aérostat,fcn«
dre 1"» airs du battement précipité du «es ailes, et gui-
der, *n quelque sorte, tout en faisant le guet autour de
lui, an steamfcr de moyennes diuiouninna qui fuyait à
toute ràneur vers le Nord-Ouest,
« Voilà nn bateau qui doit porter quelque grave
message, — murmura enfin Philippe ca relevant la
têtu. — Qu'en penses-TOUt, Durée ?
— fnnon un grave message, du moins un peraon-
sago d'importance, — répondit t'enseigne
— Si noua le coulions ? Ce serait «tus dout* eue
hell* action que uoun accomplirions la.
— A moins que t* ne fût pour nnus une censé
d'étemels regrets. Happolez-vou* Wpî'od* du « Sirdur
Kitcheuer »? VoudriwK-.oue repasser par les marno*
angoissas qui lui Tirent notre exploit d'bier «t la dis-
traction du transport ?
— J« ne tous comprends pas, mon ami. Suppose»
lies-tous, par hasard, que
— J* fais plus nu* auppoaer.-je suin à peu près sû*
que e« bateau, sur lequel le ballon Teille ureo faut de
sollicitude, porte dans tes flanc*- la priumni^r* de
Woodman, voir» héroïque sœur, mademoisi lie Alio* de
Jeumont.
— Miséncordo ! — l'eîcltma Philippe. — C'est
Txoi ' J* n'avais pas pensé à cela. »
.td, te reprenant, il ajouta :
(A iuivre.)
— N« 311.
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JOURNAL DES PATS OCCUPÉS PARAISSANT QUATRE FOIS PAR SEMAINE
Ou s'abonne dans tous les bureaux de poste
LES ILLUSIONS DÉTRUITES!
Cm n'eal pas dans les journaux français el anglais
Hu 7 et du % décembre qu'un trouvera l'impression
réelle qu'a produite dans les grandes capitales de
l'Entente le nouvelle de la capitulation de Bucarest ;
m'est dan* ceux du 29, du 30 et du 31 août.
C'est en faisant revivre un instant les espoirs el les
Illusions que suscita, il y a trois mois, l'entrée en
■juerre de la Roumanie aux côtés de» Alliés qu'on
pourra mesurer l'étendu» du désastre moral qui vient
«e frapper le prestige de l'Entente.
Rappeler aujourd'hui ce» illusions détruites, c'est
taire œuvre salutaire I
C'est prendre une rude « leçon de faits », une
*> cure de vécité » qui ne pourra être que profitable
fcux*espritj sains et sincères.
La grande presse de Paris et de Londres ■ com-
aoencé par saluer l'entrée en guerre de la Roumanie
comme une preuve éclatante que la défaite des
Puissances Centrales était devenue inévitable et pro-
chain*.
Ecoutons M. Alfred Capus, dans le « Figaro »
£0 août) :
« Avant m.' ;ie «es conséquences militaires, la déclara-
tion d* guerre de la Roumanie à l'Autriche présente un
Intérêt moral d'une importance décisive. Elle marque
l'instant où lea revendicalions nationale* d'un noble paya
■npotent au monde 1» certitude de la défaite allemande...
Ce qua dis maintenant elle noua apporte, c'eat un
surcroît d« confiance, c'*st ana preuve1 nouvelle ajouté* à
tant tVautras qua l'Allemagne ne peut plut échapper h aon
festin et qu» aon humiliation et aa raine tout Jugées
accessoires pu l'ansembl* de l'humanité... »
Dans le « Figaro » du 31 août, Polybe-Reinach
écrivait :
■ Ce n'aat pas cette fois au accours du vaincu, c'est à
rappel du vainqueur qu'arrive l'année fraîche...
L'armée nouvelle, encore intacte, quand aile lurvienl
à la onzième heure, suffit à changer la défaite en victoire.
Quelle accéliratlen donnera-t-ell* à la victoirr, quand elle
■jouta aa force d'impulsion a celle d'une armée qui a déjà
îavautag* I a
Le « Temps » du 31 août :
c L« témoignage de )a Roumanie achèvera peut-être
4'écieirer la* consciences qui u'osant pas encore condamner
aUtunlivament les empires gerinaniqu**. La conviction da
1 r*i rersUaMuae et da g*av*ra*c*ttfM ds Baser*** les libéra da
s»tir- crainte* en leur montrant que la certitude de victoire
4ae alités m ripas*. .. »
Lee « Débats », autre journal grave, écrivaient le
16 août :
a L'annonce de cet»* nouvelle déclasation de guerre est
■usai déprimant* pour l'ennemi qu encourageante pour
•eus : *U* cenariaeara au déséquilibre das résistances
an.irides semas.* aa désé^ullibro des forces matérialisa, et
asdan laa Alliés à remplir la tache difficile de bien con-
vaincra les Allemands que leur règne sur le monde n'est
iacadéoriflBl pas dans les voies de la Providence. »
En province, on ne s'est pts moins trompé qu'à
Paris. Témoin la «Liberté du Sud-Outst», qui a écrit:
a La Roumanie sa joint tux défenseurs de la civilisation
pour porter aux barbares le coup décisif. Honneur k alla
et spse loua les peuplas de l'Entente saluent avec joie *t
taconnaissanc* l'épé* qu'elle met dans la balance pour le
triompha du droit, a ■
Dans le « Journal » du 28 août, un journaliste
tuesi réputé que M. Saint-Bnce écrivait cette phrase
sju'il est utile de lui rappeler aujourd bui
c La décision de la Roumanie «t intéressante à en
aotr* point de vue encore. Elle préacntera la garantie d'un
eeup d'oeil confirmé par l'expérience. M. Draliano n'a ja-
spais dissimulé aon intention de ne parler qu'à coup sûr.
Lue rsselntlen qui donne de tels gagts de clainovauce à
La valeur d'un arrêt tans appel. »
En tête de sa m Victoire « (29 août) Hervé jubilait :
a En attendant que nous puisaonj crier: a Voilà les
Grecs 1 *, ce qui ne taurail plut guère tarder, au-
jourd liui nous pouvons crier de bon cœur à nos poilus :
t Courage ! Voilà lea Roumains I Voilà un renfort da
600.000 poilus qui arrivent à voire rescousse I »
u Car c'eat à nos poilu», aux poilus de toutes les armées
alliées que nous pensons tout d'abord en ces jours d'allé-
giesse, a ceux qui ont jusqu'ici échappé à la mort, à ceux
aussi qui sont tombés glorieusement, et dont la Joie efll été
si grande à voir ae lever à l'horizon-ce nouveau signe certain
de la victoir* I ..
« Et nous sentons nos cœurs tressaillir de joie à la pensée
que demain, dans la. prison où leurs geôliers allemands les
tiennent séparés du monde, nos frères des départements en-
vahis, nos frères da Uelgique, de Serbie, de Transylvaine et
dr Pologne, do Trenle et de Trieste, spprendront la bonne
nouvelle, qui aéra pour eux le sûr présage d* leur prochains
délivrance. ...»
Le 30 août, la presse parisienne publiait un télé-
gramme de Bucarest, qui peignait en ces termes l'en-
thousiasme roumain » :
Bucarest, ag août, a Les nouvelles reçues des divers dé-
partements indiquent que partout la déclaration de guerre
à l'Autrichc-flongrie a été-accueillie avec autant d'enthou-
siasme qu'à Bucarest. -
A Constants*, à Jassy, à Turnu-Severin, à Giurgevo, à
Cralova, des manifestation» se sont organisées et la foule e<t
allée crier sa coniiance autour des'casernes, où les troupes
répondaient par des clameurs belliqueuses et des chants pa-
triotiques. Les drapeaux alliés llotlunt à toutes lea fenêtres
al pavoisent lea monuments publics.
Plusieurs milliers de personnes, comprenant toutes lea
notabilités de Bucarest, ic sont rendues dimanche soir de-
vant les légstions alliées et ont frénétiquement acclamé les
noms des puissances de l'Entente. L'enthousiasme était parti-
culièrement vibrant devant les légations de Russie et de
France.
Tous les journaux saluent l'eufréo en guerre de la Rou-
manie comme la .date la plus glorieuse de l'histoire natio-
nale. Lia consacrent des articles chaleureux aux hommes
ili.nl le patriotisme, la clairvoyance et la patiente diplomatie
eut permis à la Roumanie de se préparer à remplir son
grand devoir avec le plus possible de chances de victoire et
lui ont assuré un triomphal avenir, SIM, Talie Joncsco, Fili-
pesoo, Rrntinno. »
En même temps, les journaux français publiaient
de longs télégrammes montrant l'Allemagne en proie
aux plus vives inquiétudes. Ecoutons le » Petit Pari-
tien » du 30 août ;
a Le peuple allemand sclitit hier soir le vent de la défaite,
lorsque les déclarations da guerre d« l'Italie à l'Allemagne
et de la Roumanie à l'Autriche furent connues par les corn-
•muniquéà WotfT.
Ces nouvelles produisirent an effet ssJbbbbXsXss ; elles ro-
« sentirent comme un brusque arrêt de mort, bien que la
foule dea dimanches fut dense dons tous lea endroits publics.
. .T'est ua nid* réveil, Isa illusions croulent. On reconnaît
eue sous Isa plans allemande, notamment celui de la mardis
éventuelle de Hlùdenburg, sont anéantis.
De mémo l'armés bulgare-turque, «smuiandé* par
afaekensen, en Bulgarie, voit son ride réduit à une difficile
défensive. ...»
Et le lieutenanl-colonel Roussel, critique militaire
du même journal appuyait ce noir tableau de toute
r»uicrite de son jugement, en écrivant :
a La liaison entre les Russes et lea Roumains existant de
tait par l'emprise qu* lea premiers ont fait* sur les Car-
pathes, l'invasion 4* la Hongrie devient an fait uou seule-
ment posstbl*, mais très prochain. . . .
Quant aux Bulgares, ils ne tarderont pas à regretter de
s'être Jatéa ai ostentatoircment en Macédoine. Tolcl qu'une
armée russe se préparc k leur tomber dans le dos eu traver-
sent la Dobroudja, largement ouverte à leur action.....
En vérité, lea-nuages qui chargeaient l'horizon oriental
changent d* place. Une brusque saute de vent vient de les
jeter sur laa empires centraux. » _ •
Dans un autre article du même « Petit Parisien »
le lieutenant-colonel Rousset affirmait encore :
• La Dbbroadja ouverte aux Russes — el ceux-ci y août
déjà engages — c'est pour les Bulgares une morsure au
talon qui les force a sa retourner, Alors, le général Ëarrail
aura b«iu jeu pour l'cagager à leur suite sur la route d«
Sofia, et lea Grecs pour reprendre la Marèdoine, s'ils U
veulent.
Ainsi, les satellites de l'Allemagne sont frappés les pre-
miers, et c'est dans l'ordre le compte de celle-ci, quand
seront coupes tous s<i tentaniles, en sera moins difficile à
régler. •
Dans L' « Echo de Paris » du 29 août, M. Jean
Herbelle écrivait :
a Les Allemands ont deviné le péri! depuis de longue*
semaines. Us le discutent abondamment cl gravement. Par
quelle réaction miliUne allaient ils essayer de l'écarter P
a Ils n'ont pas réagi, et la Roumanie* intervient. Aux
yeux du monde entier, c'est une grande preuve d'embarras
eu de lassitude que l'Allemagne s doiiné là..........
« Maiut.nant, le front austro-allemand tS trouve accru
démesurément : de 5oo kilomètres environ. . . . L* llongris
sst ronée à l'invasion, la Bulgarie eut prise tntre deux feux,
In Turquie est plu* abandonnée qu* jamais et l'Allemagne,
tn proie, à la disette, ne peut plus compter sur I» blé rou-
main. »
u*A la date du 37 août, les calendriers de l'avenir pourront
Inscrire : victoire décisive de M. Briand. »
Les Anglais, eux, se sont-ils moins cruellement
trompés que leurs confrères parisiens? Voyons un
feu et donnons d'abord la parole au fameux colonel
tepington, critique militaire du «. Times », dont le
jugement est reproduit par les journaux parisiens du
80 août :
u L'intervention de la Roumanie à coté dessablés a une
Importance- considérable à tpus lea points de vue. Cette
adjonction d'un nouveau cumin ade venant dans nos rangs
sera bien accueillie par tous les Ltats qui combattent*TAlle-
magne et ses dupes... ([ 1 où sont aujourd'hui les dupes p —
Ls Héd.)
La situation stratégique, dans son ensemble, indique une
combinaison offensive roumaine d'accord avec le* Russes '
comme la plus avantageuse pour l'intérêt général.
Ctttc opération inciicrn l'armée roumaine en Transyl-
vanie, où la majorité de la population sera en faveur des en-
vahisseurs.
Il y aura sans doute do nombreux partisans en faveur
de son adoption.
D'un autre côté, en passant le Danube, en avançant sur
Sofia et en bridant la puissance bulgare, d'accord avec l'ar-
mée alliée du Salouique, aela constituerait un* opération jus-
qu'à un certain point séduisante. Celta dernière combinaison
sera sans douta choisie au cours d'une doliburnbon des aihés
avec la Roumanie. Les événements nous en montreront
bientôt le résultat.j>
Le m Daily Clironicls » écrivait le même -jour :
« L'intervention roumaine est le plus grand facteur da
hausse pour les actions d** alliés qui soit surv«nu depuis
'le début de ta guerre. Ella modifie complètement les pers-
pectives de la lutte- engagée sur les théâtres de lu guerre à
ViM «t au Bod-EcL »
Les « Daily News » :
a L'intervention de la Roumanie est, pour 1m allitis, la
tournant le plus décisif depuis le commencement de ta
ruerre, car elle modifie toute la situation sur iea théâtres
Sud-Est et Bal des opérations.
La répercussion on Grèce de eett* intervention sein des
plus importantes, car elle signifie >• triomphe final de
at. Veniteloi. 11
Le * Daily Telegraph » ,
« La plus forte des armées, non encore engagées dans
ls guerre, vient d'entier dans le camp des alliés. Lo gui^re
sntr* dans uns phase nouvelle qal promet de se dsvr-lopper
d'une facan plus rupids «t plu* MnaoUon^lle as'aurime de
eelle* dont nous avon» été témoins leeela Pélxn d» l'ennemi,
11 J a deux ans. La situation militaire dans les Balkans sYât
modifiés dans nne n«it, de façon à glacer d'effrei les
soiirg les plus remplis d'espoir des smprres centraux... ■
Ces quelques citations — que nous pourrions multi-
plier à l'infini — Euffiront pour donner une idée de la
truelle désillusion qu'on ressent aujourd'hui à Paris
et à Londres. Et maintenant, lecteurs, comparer K
ces rodomontades, cruellement démenties par l'ironi-
?ue dtatm, ce que la « Gazette des Ardenncs • du
■ septembre (N* 253) écrivait dans'son article da
fond, consacré 4 l'entrée en guerre tle la RoumnnieK
Nous disions alors :
« L'Histoire jugera I* côté moral d* cette guerre. Elle
découvrira aux yeux d'un monde écœuré tous les fils d* l'in-
trigua qui prépara la catastrophe meurtrier*, et qui s'efforce
à présent d* rétablir par tous les moyens la partie compro-
mise, où les gouv«rnement< alliés engagèrent leurs peuples.
L'heur* n'est pas venu* encore de cette liquidation
morale, d'où la «politiqu* d'affaires», tell* qu'ell* s* pra-
tique là 06 gouvernent le* cliques d'■ avocat*-politiciens ur
sortirs flétrie. L'heure est à l'action virils et aux grand fa
réalisations. A Bucarest comme à home, cS n* sont pas lea
hommes d'action, ce n* sont pal les soldats qui ont opté
pour ls gucrid. Ce sont les politiciens aveuglés par lea gran~
des promesses et enchevêtrés dam l'intrigue diplomatique»;
où triomph* la rus*.
C'est avec un calme complet que )cb peuples en armes
d'Allemagne et d'Autrirhe-Hongri* at leurs vaillants alliés
turcs si bulgares accueillent l'entrée tn scène de la Hou-
manie, pefsnadés qua celle-ci t'apercevra bientôt, comme
ntalle, que ses politiciens responsables viennent d'engager
dans"'nne vole fatale la peuple dont Ils tonaJent en mains la
destinée.
La presse de Paris et de Londres, si hshile à snbtsituei
l'Illusion à ls réalité, ns manquera pas d'exploiter l'entrée
eu lice de la Roumanie comme étant un signe précurseur da
ls « victoire » tant attendue. Lea lecteurs dégrisés s* rap-
pelleront cependant que l'an passé, déjà, lorsque l'Italie
atlaqua l'Autriche, les journaux parisiens tinrent I» mêros
langage. Avec bien plus de raison même : clr l'Italie repré-
•rntait une force autrement sérieuse que la Roumanie Et
pourtant, au bout i'un an, qu'a-t-elle atleirtt t Non seule-
ment elle n'a pas rapproché la I victoire n alliée; celle-ci
a'est même éloignée depuis..... _
Tous les succès des armes austro-allemandes, turques et
bulgares, la Roumanie espèrc-t-elle pouvoir les réduire à
rien P E*père-t-el!e vraiment briser de sa frêle épé* l* bloo
d acier contre lequel les, plus grandes puissances militaires
de l'Europe s'acharnent en vain depuis deux ans »....
Quoi qu'il en soit, les mauvais bergers «jtl conduisent
le peuple roumain ont accepté ds lai faire suivra la v*l* das
sacrifices; eh l'ont précédé d'antras petite Etat*, vasseaii de
Icl» grands « prntecteara u ; ta Bslflqut, La StraJ* at le
Monténugre. N r.» noai garderons comme t*aj*srs de pré-
dire l'avenir. Nous Ignorons le sert qall réserve à ls àUa-
matdt, Miiis noua savons use le granit sur lte.usl dis s'ap-
prête à mordre, est trop dur pour ses dents I »
Voilà en quels termes sobres el sans forfanterie —
convenez-en, lecteurs î — la u Gazelle des Ardcnnes »
répondait, le 1" septembre 1016,. aux tHustona débor-
dantes de la presse parisienne. Le destin a marché.
Aujourd'hui les faits nous donnent lumineusement
raison 1
BULLETINS OFFICIELS ALLEMANDS
Granu Quartier général, 9 décembre 1019.
Théâtre de la guerre à l'Ouest.
Groupe d'armées du Kroiiprmz Hupprecht.
Dan* la région de la Somme ls lutte d'artilleris fut
violent* t certaines heures ; de fortes palrouillee, s'avanç&nt
nuitamment contre nos positions prés dy Trjnslov, furent
repousséas par nos tirs cl en corps a corps , an certain
nombre d'Australiens restèrent entre nos mains.
Théâtre de la guerre à l'Ett.
Front du feldmaréchal î'nnoe Léopold de Bav-iire,
Au Nord du lac de Naroct, dans le défilé de Skory,
plusieurs compagnies russes attaquèrent vainement nos po-
sitions après une préparation d'artillerie.
FEUILLETON DE La iGAXBTTM DUS AHUGNNES* tl
il
LE
Par Pierre Hael.
Quant an transport « Sirdar Kttchener », il était
iléjà hors de l'eau, st le* deux officier» du ■ Vengeur ■
fuient assister à son départ, aussi bien qu'à celui ds
a Undminted », remorqués l'un et l'autre par un
steamer de moyenne taille, et oonvoyés par un cuirassé
te un.croi*eur. Il était manifeste quo les doux vais-
seaux ne rendraient plus aucun service 4 l'Angleterre,
au moins pondant la présente gueire. Avec les trois
iestroyers et les deux croiseurs coulés le matin, cela
portait à sept le nombre des unités de combat perdues
Mi la flotte britannique, alors que les peites de *la
ïranc* n'atteignaient pas la moitié de ce chiffre. Celui
iea hommes tués ou noyés, blessés ou disparus ne serait
Enuu que dans quelques jours. On savait toutefoia, à
iricnt, que lo corps de débarquement anglais avait
»erdu, sn quatre heurta de combat, la moitié de iou
aflcQtif.
« Commandant, — fit observer rcapectueuacment
Durée, — je crois que la prudence noua commando da
anus immerger derechef. La bonne foi n'a jamais étd
Ine vertu saxonne, et je ne suis pas sûr que, malgré
Jermistice, le premii-r destroyer que nous rencontre-
lions n* nous coulerait peint.
• Vous avez raison, mou ami, — répondit Philippe,
— et c'est maintenant plus que jamais que nous devons
sj*«r do prudence. »
Le c Vengeur » s'eufnnça dono de nouveau à ame
Cfondeur de dix mètres et a'avança à une allure /*-
lie.
Il ne voulait point qnitter ces parsges avant de **-
s»ù- quell* direction allait prendre l'aérostat.
Yen trois heures, du matin, Jeamont ramena la
tous-marin au point où il l'avait placé l'avant-veille,
c'est-à-dire sous-les roches sombres des tilénans, en face
de la côte de Coucarueau. De ce point, il espérait pou-
Toir surveiller lea alléeH et venues du ballon. Au jour,
grâce au périscope, il constata avec satisfaction que la
machine aérienne ne s'était point éloignée de Lorient.
Seulement, elle no planait plus sur la terre; elle se
tenait à deux milles en nier à une altitude moyenne de
quatre cents mètres, en communication avec la flotte
anglaise. Son guîde-rope traînait au-dessous d'elle et
servait de til télégraphique pour l'échange dos signaux.
a Oh 1 — fit Jeumont, dont les doigte se terraient,
— si, seulement, il nous était possible de mettre un
Instant la main sur cette corde ?
— «Que feriei-vous f demanda Durée, surpris par
l'exclamation d* son chef.
— Je tenterai* l'escalade. Ils sont aix hommes dans
la nacelle. Ce serait une torte d'abordage. Nous mon-
terions à Tassant. >
L'euseigny hocha la tête en signe de doute, ou plu-
tôt de dénégation.
« Monter à l'assaut du ballon à l'aide de ce fil, eua-
péndus comme dea araignées ? C'est une idée hurdie,
eertei. Mais n* voyez-vous pns, commandant, que l'axe-
tution *n *st impossible, Oublies-voui notre attaque à
Quidel et comment le seul poids additionnel du notre
brave Pénélan empéoha le ballon d* a'elever ? S'ils
n'avaiant point ooupé l'échelle, nous lea prenions, lia
n'ont pas hésité à nous laisser entre les mains leur ca-
marade, cet Aylesford, dont ils sont venus réclamer
tout à l'heure la vie contre celle de votre sœur.
— Sans doute, — répondit Philippe. — Aussi n'ai-
ie pas fait le rêve de grimper à lescalads comme à
raid* d'une corde à nœuds, mais bien de la* surpren-
dre, sn profitant d'an instant d'inattention pour nous
substituer à un nombin égal de leur équipage.
— Hum 1 — fit encore Durée, pensse-vout qu'un
somme comme Cecil Woodman se laissa surprendre t
■— lion, k vrai dire, je ne le ptnse pus, mon ami.
Vais je u* «ai* pourquoi cette idéo siiifnilitre mu liante,
•ourquoi, depuis qua je sais ma au;ur prisonnière, muis
vivant*, j'éprouv* un espoir insensé, que rieu 110 justi-
fte, de m'emparer de ce ballon.
— Vous Bavez que je vout suis dévoué corps et ame,
■— répliqua Durée.— Que l'occasion se présente et noua
tenteruns cette folie... »
ilais, tout en prononçant oes paroles, le jeune
homme attachait sur son chef un regaid si craintif que
Philippe put croira que sou second doutait de la toli-
dito de sa raison. Un ballon pris par de» matelots d'un
navire sous-marin, qm plus est, n'etait-oe pas le chef-
d'œuvre de l'imagination la plus déréglto ? L'n roman-
cier même n'aurait pas eu nue senibluule conception.
Et, cependant, JiMirmmt, sann lais-er voir à Uureo
qu'il lisait dans bou eapiit le soupçon qm venait d'y
éclore, serra la uiaïu-de son secund avec la mémo ellu-
tiou amicale qu il mettait dans toutes les manifesta-
tions de su confiance.
■ liepo*cz-vouB, Duruc, — lui dit-il affectueuse-
ment. — J'oublie, à bavarder ainsi, que nous n'avons
pas dormi depuis trente-six beures.
— Le repos ne voua ost-il pas uustd utile qu'à moi-
mÊnie, commandant Y
— Je me reposerai pendant la nuit qui va venir et
je vous laisserai tout le soin du a Vengeur ». Hoprenez
donc des force» en attendant. »
11 avait MOion. Tout le jour, éveillé et soutenu par
la pensée de la lutte terrible engagée entre la machine
aérienne et la machine lOUS-mtvnne, le commandant du
t Vengeur » ne rkchit point sous le poida eexasant de
la fatigue.
Mais, le soir venu, sachant qu'il pouvait a'ôn -re-
mettre entièrement à ton second du soin do gouverner
1* batuau invisible, Jeumont a'héiita plus à accorder
à set membres liarn^ta un sommeil réparateur. Il alla
donc se juter 111 r aon cadre, ou tl dormit sans un mou-
yement d* sept heures du soir à quatre heures du rnntjn.
A peina éveille, il fut sur pied et entra vivement
•ans 1* kiosque- ou Durée, penché but le verre dépoli,
ebservait la mer et le ciel
• Nous marchons doncP — questionna-t-il avec une
certaine ansit-tp.
— Oui, commandant, — répondit l'enseigne, ta lu!
désignant du doigt le» tableaux successifs de 00 ciné-
, BtatogTuphe animé, — nous murcliuii»
— Ali ' depuis quand niarcln)iis-i)oU3, et pourquoi,
s'il tous plaît, Duiei '■
— DepuiM une heure et demie. Pourquoi f 11 vu-uij
suffit d'observer vous-même pour vous fournir une ré-
ponse satisfaisante, s
L'ofiicier t'absorba à ton tour dans la contempla-
lion du merveilleux tableau vivant.
« liais nous tommes an pleine mer, Durée P — s'iî-
exia-t-il.
— Oui... Nous avions doublé, à une heure du ma-
tin, la pointe de Penmirch et nous sommes présente-
ment à la hauteur ds l'entrée de la Manche. Il est
certain que l'ennemi va nous conduhv ainsr-gusqu'A la
côto anglaise. >
Jeumont n« parlait plus. Il s'était absorbé dans la
contemplation du tableau projeté sur la tuifnce du
Terre.
A mesure que le jour gi imdissait, les images deve-
nait nt plus nettes, plus précises. -
Maintenant il voyait distinctement l'aérostat,fcn«
dre 1"» airs du battement précipité du «es ailes, et gui-
der, *n quelque sorte, tout en faisant le guet autour de
lui, an steamfcr de moyennes diuiouninna qui fuyait à
toute ràneur vers le Nord-Ouest,
« Voilà nn bateau qui doit porter quelque grave
message, — murmura enfin Philippe ca relevant la
têtu. — Qu'en penses-TOUt, Durée ?
— fnnon un grave message, du moins un peraon-
sago d'importance, — répondit t'enseigne
— Si noua le coulions ? Ce serait «tus dout* eue
hell* action que uoun accomplirions la.
— A moins que t* ne fût pour nnus une censé
d'étemels regrets. Happolez-vou* Wpî'od* du « Sirdur
Kitcheuer »? VoudriwK-.oue repasser par les marno*
angoissas qui lui Tirent notre exploit d'bier «t la dis-
traction du transport ?
— J« ne tous comprends pas, mon ami. Suppose»
lies-tous, par hasard, que
— J* fais plus nu* auppoaer.-je suin à peu près sû*
que e« bateau, sur lequel le ballon Teille ureo faut de
sollicitude, porte dans tes flanc*- la priumni^r* de
Woodman, voir» héroïque sœur, mademoisi lie Alio* de
Jeumont.
— Miséncordo ! — l'eîcltma Philippe. — C'est
Txoi ' J* n'avais pas pensé à cela. »
.td, te reprenant, il ajouta :
(A iuivre.)