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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
représentées. C’est dans cette insuffisance de dessin qu’il faut proba-
blement chercher l’explication du nombre si restreint des planches
gravées par Cuyp. Ses eaux-fortes, au nombre de huit, des vaches
accroupies ou vues de profil, sont indiquées d’un trait un peu gros:
elles ne sont exemptes ni de manière ni de monotonie. L’artiste ne
s’accommode guère d’un instrument aussi maigre que’ la pointe; il
est plus à son aise quand il tient un pinceau et qu’il peut noyer dans
une lumière éclatante un modelé qu’il serait impuissant à préciser.
Cuyp a-t-il eu des élèves? Outre Barent Van Kalraet cité par
Houbraken, on a cru quelque temps que Govert Camphuysen avait
eu ses leçons ; mais les deux artistes, nés à trois ou quatre ans de
distance, étaient à peu près du même âge et ont vécu séparés l’un de
l’autre. Quant à Art Van der Neer, qui autrefois passait également
pour son disciple, les découvertes faites par M. Bredius dans les
archives nous ont appris qu’il était de dix-sept ans plus âgé que son
prétendu maître. On serait tenté de croire, du moins, qu’ils se sont
connus. La belle peinture de la National Gallery, le Soir (n° 152 du
Catal.), si remarquable par l’ampleur de l’exécution et la puissance
du coloris, porte, en même temps que le monogramme habituel de
Van der Neer, la signature de Cuyp inscrite sur le seau de la femme
qui va traire ses vaches. Cette collaboration, au surplus, ne se serait
pas bornée à ce seul tableau et dans un autre, presque de même valeur,
exposé à Manchester par M. Francis Edward, les signatures des deux
artistes se trouvent également réunies. En l’absence de tout docu-
ment relatif aux relations qui auraient pu exister entre eux, la
question ne laisse pas d’être assez délicate et la différence de leurs
âges respectifs n’est pas de nature à l’éclaircir. Si les personnages de
ces tableaux de Van der Neer sont, en effet, de la main de Cuyp,
peut-être faudrait-il ne voir dans ce rapprochement que le résultat
du caprice d’un ancien possesseur qui aurait demandé au peintre
d’étoffer ces paysages, pensant ainsi leur donner plus de prix '.
Les œuvres de Cuyp sont assez nombreuses et le total de celles
que Smith a mentionnées dans son Catalogue raisonné s’élève à 281 3,
1. C’est ainsi, par exemple, que dans l’admirable composition de Claude Lorrain
Acis et Galathée, qui fait l’ornement de la galerie de Dresde, les ligures ont été
repeintes par Bon Boulogne, sur l’ordre exprès du comte de Nocé, à qui ce tableau
avait appartenu.
2. Près d’un siècle après Cuyp, un de ses compatriotes, Jacob Van Stry (1750-
1815) a imité sa manière avec assez de succès pour prêter à des confusions qu’il
semble d’ailleurs avoir voulu encourager lui-même, puisqu’il a parfois mis la signa-
ture de Cuyp sur ses propres tableaux.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
représentées. C’est dans cette insuffisance de dessin qu’il faut proba-
blement chercher l’explication du nombre si restreint des planches
gravées par Cuyp. Ses eaux-fortes, au nombre de huit, des vaches
accroupies ou vues de profil, sont indiquées d’un trait un peu gros:
elles ne sont exemptes ni de manière ni de monotonie. L’artiste ne
s’accommode guère d’un instrument aussi maigre que’ la pointe; il
est plus à son aise quand il tient un pinceau et qu’il peut noyer dans
une lumière éclatante un modelé qu’il serait impuissant à préciser.
Cuyp a-t-il eu des élèves? Outre Barent Van Kalraet cité par
Houbraken, on a cru quelque temps que Govert Camphuysen avait
eu ses leçons ; mais les deux artistes, nés à trois ou quatre ans de
distance, étaient à peu près du même âge et ont vécu séparés l’un de
l’autre. Quant à Art Van der Neer, qui autrefois passait également
pour son disciple, les découvertes faites par M. Bredius dans les
archives nous ont appris qu’il était de dix-sept ans plus âgé que son
prétendu maître. On serait tenté de croire, du moins, qu’ils se sont
connus. La belle peinture de la National Gallery, le Soir (n° 152 du
Catal.), si remarquable par l’ampleur de l’exécution et la puissance
du coloris, porte, en même temps que le monogramme habituel de
Van der Neer, la signature de Cuyp inscrite sur le seau de la femme
qui va traire ses vaches. Cette collaboration, au surplus, ne se serait
pas bornée à ce seul tableau et dans un autre, presque de même valeur,
exposé à Manchester par M. Francis Edward, les signatures des deux
artistes se trouvent également réunies. En l’absence de tout docu-
ment relatif aux relations qui auraient pu exister entre eux, la
question ne laisse pas d’être assez délicate et la différence de leurs
âges respectifs n’est pas de nature à l’éclaircir. Si les personnages de
ces tableaux de Van der Neer sont, en effet, de la main de Cuyp,
peut-être faudrait-il ne voir dans ce rapprochement que le résultat
du caprice d’un ancien possesseur qui aurait demandé au peintre
d’étoffer ces paysages, pensant ainsi leur donner plus de prix '.
Les œuvres de Cuyp sont assez nombreuses et le total de celles
que Smith a mentionnées dans son Catalogue raisonné s’élève à 281 3,
1. C’est ainsi, par exemple, que dans l’admirable composition de Claude Lorrain
Acis et Galathée, qui fait l’ornement de la galerie de Dresde, les ligures ont été
repeintes par Bon Boulogne, sur l’ordre exprès du comte de Nocé, à qui ce tableau
avait appartenu.
2. Près d’un siècle après Cuyp, un de ses compatriotes, Jacob Van Stry (1750-
1815) a imité sa manière avec assez de succès pour prêter à des confusions qu’il
semble d’ailleurs avoir voulu encourager lui-même, puisqu’il a parfois mis la signa-
ture de Cuyp sur ses propres tableaux.