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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 9.1893

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Meissner, Franz Hermann: Arnold Boecklin, [1]: artistes contemporains
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310

GAZETTE UES BEAUX-ARTS.

l'œuvre d’un grand et étrange artiste de notre temps, œuvre entre
toutes intéressante, car nous y trouvons maintenu le principe fonda-
mental du romantisme, l’effort pour créer un art purement et essen-
tiellement national; et, en même temps, elle nous apparaît dégagée
des défauts du romantisme, surtout en ce qui touche la forme.
Comme l’œuvre de Cornélius, en effet, cette œuvre d’esprit tout ger-
manique s’inspire de l’antique au point de vue de la forme; au point
de vue de la couleur, elle s’inspire de l’art de Poussin et des colo-
ristes français de notre temps. Et, transformant ces éléments
étrangers sous l’action d’une puissante originalité individuelle, cette
œuvre parvient tout ensemble à être l’incarnation la plus complète
des principes de l’école romantique allemande, et aussi la plus com-
plète manifestation de la couleur qu’ait produit l’art allemand de
tous les temps.

L’œuvre dont nous parlons est celle du peintre suisse Arnold
Bœcklin, une des personnalités artistiques les plus fortes, les plus
singulières et les plus imprévues qu’on puisse rencontrer dans
l’histoire de l’art. Bœcklin ne se rattache en vérité au romantisme
allemand ni par sa technique ni par le choix de ses sujets, dont la
plupart sont pris à la mythologie des Grecs. Romantique, il l’est
pourtant foncièrement par les traits essentiels de son génie, par
l’intimité, la profondeur inouïe de son sentiment, par son souci du
caractère individuel, par son puissant humour, par la façon anti-
classique, et toute mythique, toute dyonisiaque, dont il a interprété
les sujets classiques qu’il a traités. Le romantisme de Bœcklin est
donc à la fois allemand et hellénique : l’esprit grec et l’esprit alle-
mand sont les deux pôles entre lesquels il a su maintenir son génie.

Arnold Bœcklin est né le 16 octobre 1827 à Bâle, dans la ville
illustrée par Holbein. Il descend d’une riche famille de commerçants
établis depuis longtemps dans la ville. Dès le collège, il donna des
marques de ce goût pour le monde antique qui s’est conservé intact
aujourd’hui encore chez le vieillard de soixante-cinq ans, et qui lui
fait estimer au-dessus de tout la poésie des classiques grecs. En
même temps, contrastant avec le milieu prosaïque de la ville de
commerce rhénane et avec les préoccupations toutes pratiques de ses
habitants, se développait chez l’enfant un penchant prononcé pour
la nature et la solitude; une imagination aussi riche que bizarre
 
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