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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 10.1893

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Leprieur, Paul: Correspondance d'Angleterre
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81

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Ici comme là, c’est un portraitiste qui a la palme, peintre connu et aimé du
public français, M. Sargent. Doux, tendre et argentin dans une gamme de gris
bleu et de mauve, avec le délicieux et comme éthéré Portrait de lady Agnew à la
Royal Academy, il s’abandonne à toute sa grâce primesautière et vive, à tous ses
instincts de coloriste à la New Gallery, où un merveilleux portrait de jeune femme,
Mrs Hugh Hammerslcy, assise en robe de velours rose à reflets changeants sur un
canapé de satin gris, éclate à la façon d’une fanfare triomphante et dominatrice.
Il faut avouer, d’ailleurs, qu’il a la part belle : car autour de lui c’est le vide
absolu. Les peintres de la beauté féminine sont rares en Angleterre; dès qu’ils s’en
mêlent, ils arrangent trop, et ce n’est pas MM. Wells, Ouless ou Luke Tildes, même
M. Shannon, qui pourront lutter. Il serait injuste d’oublier toutefois un portrait de
femme de M. Hugh Rivière, dans une crâne harmonie de satin jaune, digne
pendant de Sargent à T Academy et, dans un genre différent, le minuscule et fin
Portrait de Mts Charles Wyllie par M. Alma-Tadema, ainsi que ceux de MM. Solomon
et Stanhope Forbes, élèves du plein air français. Du côté des hommes, trop de
portraits de « présentation », comme on dit ici, de portraits apprêtés, convenus,
officiels. M. Hubert Herkomer est le grand producteur en ce genre. Il ne se réveille
un peu qu’à la New Gallery, où celui de deux jeunes garçons en costume écossais
dans un paysage (Jock and Charlie), a, du moins, une saveur de fantaisie et
d’imprévu, dans ses tonalités jaunâtres à la vieille mode anglaise. Près de lui sont
à citer les portraits encore plus roux et rancis de M. Orchardson ou du regretté
M. Pettie, qu’on voit à P Academy pour la dernière fois; ceux de MM. Cope, Olivier,
Mac-Lure Hamilton ou sir George Reid.

Avec les Sargent, un des grands succès de saison est l’effort que font vers la
peinture d’histoire des peintres qui ne nous y avaient guère accoutumés jusqu’ici,
M. Briton Rivière et M. Frank Dicksee. Malheureusement le premier, dans la
Libation du roi, qui se passe en Assyrie et nous montre une hécatombe de lions
égorgés en sacrifice, a apporté presque exclusivement ses préoccupations d’ani-
malier : on sent visiblement que le roi, ses serviteurs, le cadre ne sont là que
comme un prétexte ; et quant au second, si ses Funérailles d'un Viking, chef
saxon ou Scandinave qu’on pousse au large dans sa barque après y avoir mis le
feu, dénotent un sérieux sentiment delà reconstitution historique, on y trouve trop
de petites habiletés, d’adresses cherchées et voulues pour être sincèrement ému :
il y manque un peu de la fougue passionnée et de l’ampleur d’un Cormon, par
exemple. Pour l’un comme pour l’autre, les dimensions de la peinture se sont
agrandies plutôt que le style. L’histoire n’est décidément pas faite pour fleurir en
Angleterre. Laissons-la aux Seymour Lucas ou aux Calderon, qui la traitent en
imagerie.

Sir Frederick Leighton conduit, comme toujours, le chœur des sujets antiques,
des nudités ou demi-nudités aimables : car on ne se déshabille jamais complète-
tement dans le pays du cant. Le plus important de ses tableaux, Rizpah, la mère
juive défendant le corps de ses enfants mis en croix contre les oiseaux de proie
et les tigres, ne vaut pas le délicieux Jardin des Hespérides exposé l’autre année,
malgré les prétentions tragiques. De M. Alma-Tadema, plutôt que les petites scènes
de genre, les Tanagra anglais qui font sa gloire, nous regardons le simple et
charmant tableau où il a représenté un coin de l’atelier somptueux que con-
naissent tous les visiteurs de Londres (Dans mon studio). MM. Poynter, Albert
 
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