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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 10.1893

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Leprieur, Paul: Correspondance d'Angleterre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24663#0094

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CORRESPONDANCE D’ANGLETERRE.

85

Moore, sir John Everett MilJais, Orchardson ou Leslie ne sont pas assez sensi-
blement différents de leur genre habituel pour nous arrêter.

Les idéalistes, les inventeurs de légendes et de rêves, quoique relativement en
petil nombre, peuvent charmer davantage. Avouons toutefois que les deux tableaux
de M. Burne-Jones, à la New Gallery, illustrant, avec accompagnement de vers
de M. William Morris, le début et la fin de la Romance de la Rose, ne sont pas des
meilleurs qu’il ait faits. Si le dessin en reste séduisant malgré son maniérisme, la
couleur nous a paru un peu dure. M. Watts est toujours peintre par-dessus tout.
Son ami Walter Crâne avait laborieusement combiné cet hiver et pesamment
peint un tableau sur les Chevaux de Neptune, où figurent en une longue frise,
accourant sur le sommet des vagues, Neptune et son cortège de chevaux fougueux,
plein de détails ingénieux, mais trop réalisés, trop appuyés pour que la vraisem-
blance n’en souffre pas un peu. C’eût été bien peut-être en blanc et noir, comme
illustration de livres, dans un de ces bois sommaires et francs, où le jeune maître,
si expert dans la décoration, a le droit d’affirmer nettement, de souligner même
au besoin ses intentions. Ici, avec ces couleurs crues, cet aspect absolument irréel,
le rêve disparaissait. M. WaRs s’est amusé à lui donner une leçon, et, avec infini-
ment de bonne grâce, en quelques traits a refait le tableau. Sont-ce des éclabous-
sures d’écume ou des crinières flottantes, ces taches blanches qui chevauchent les
unes sur les autres, dans la mer au gris bleuté, sous un ciel sombre piqué d’étoiles ?
On ne sait. De loin, ce sont encore des vagues. De près, les formes s’accusent, se
modèlent, et des coursiers nous apparaissent, aux yeux ardents, aux naseaux
ouverts, secouant la tête, emportés en un galop fou. Ce n’est qu’une esquisse, une
ébauche, mais qui a tout le charme d’une poétique vision. Rien n’est plus inté-
ressant que cette espèce de concours amené par les circonstances entre deux
peintres aussi différents de tendances que de manière, et dont chacun peut se
faire juge à la New Gallery. M. Waterhouse a envoyé à l’une et l’autre
exposition des tableaux d'invention curieuse : Naïade contemplant un jeune
pâtre endormi ; Hamadryade engainée dans son arbre écoutant curieusement
un petit faune joueur de pipeaux rustiques ; la Relie dame sans merci, enfin, attirant
à elle, enlaçant avec sa chevelure le chevalier qui s’approche pour la baiser. Que
manque-t-il à toutes ces peintures pour être vraiment mystérieuses et féeriques?
Un peu d’étrangeté peut-être, un grain de fantaisie et d’imprévu, moins de
réalité calme dans l’exécution, et des têtes qui soient moins proches du modèle
d’atelier. M. Hacker, dans son Sommeil des dieux, même dans sa Circé, est encore
bien autrement académique. Notons, quoiqu’elle touche presque à la figure
d’expression, la délicieuse petite Miranda de M. Symonds, à mi-corps, sur un fond
de mer bleu verdâtre, tenant sur son bras des algues, et approchant de son oreille
une coquille dont elle écoute le bourdonnement. Cela est peint avec toute la
divine aisance, le velouté, le fondu dans les notes tendres, d’un Baudry en ses
meilleurs jours, quand il créait la Vague ou la Léda.

C’est visiblement vers les scènes de la vie réelle, ou hardiment transcrites, ou
baignées de tendresse, que vont les meilleurs et les mieux doués des peintres de
la jeune école, pour la plupart d’ailleurs élèves de la France, et y ayant pris le
goût du plein air ou des effets curieux d’éclairage. M. Brangwyn, qui fut long-
temps un des adeptes du système, est en train de s’en détourner toutefois, et a
rapporté d’un récent voyage en Orient l’amour des tons flambants, des virulences
 
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