L’ART JAPONAIS A L'EXPOSITION
33
foi nouvelle encore simple, fui par excellence le moyen d’expression
des premiers siècles bouddhistes, celte peinture ne peut grandir
assez vite, plonger assez profondément ses racines dans le sol japo-
nais, pour résister, comme la sculpture, si nettement nationale au
vm° siècle déjà, aux inlluences chinoises, d’autant plus puissantes
que l’impérieux génie delà Chine, plus calligraphique que plastique,
agit ici avec une double force. Le rayonnement de la splendeur
Thang, l’action plus directe de l’art indo-grec, ne firent qu’exalter,
au vme siècle, la beauté de la statuaire, qui atteint alors — on le voit
à Yakusiji, dans le Bouddha en terre d’Udzumasa, le Bodhisattva de
Sangatsudo, l’adorable Kannon de Hokkéji, qui reproduit, dit-on,
les traits de l’impératrice Kômio (724-748) — son épanouissement
suprème. Mais ils eurent vite raison de la naissante technique
japonaise. Ils firent oublier cette première peinture. A peine née,
malgré une hâtive et brillante production, elle s’étiola. La greife
étrangère seule prospéra. La sève populaire ne donnera que plus
tard, et par intermittences seulement, quand la magnifique et
froide floraison chinoise ne l’épuise plus, ses Heurs exquises.
De cette peinture primitive, toute pénétrée de la délicate suavité
coréenne, de cette peinture vraiment japonaise, si vite étouffée, où
revit plus spirituelle la beauté profonde des grandes œuvres sculp-
turales du viuc siècle, et plus immatérielle la grâce de la petite
princesse souriante que nous avons vue parmi les statuettes de la
Maison impériale, rien n’a été exposé. Trois siècles séparent le
portrait de Shôtokou-Taishi des œuvres qui, chronologiquement, lui
succèdent au pavillon, et ces trois siècles sont l’époque même de la
formation de la peinture au Japon. Lacune inexplicable, et double-
ment regrettable, historiquement et esthétiquement, puisque l’his-
toire de la peinture reste sans base et qu’à ce moment appartiennent
des œuvres précieuses, et notamment deux des plus purs chefs-
d’œuvre — l'un, la séduction même; l’autre, la présence la plus
auguste — de toute la peinture japonaise : je veux dire la Dévi
découverte il y a quelques années à Yakusiji, et l’extraordinaire
paravent des « Six Beautés sous les arbres ».
L’importance de ces œuvres est telle, elles manifestent avec
une telle netteté le génie spontané de la race avant que les cultures
étrangères l’aient altéré, elles définissent avec une telle précision
les qualités esthétiques, les influences et les sentiments qui donnent
à ses créations leur unique saveur, qu'il est nécessaire d’en dire ici
un mot. Dans l’absence de toute peinture appartenant à cette
XXV. — 3” PÉRIODE.
33
foi nouvelle encore simple, fui par excellence le moyen d’expression
des premiers siècles bouddhistes, celte peinture ne peut grandir
assez vite, plonger assez profondément ses racines dans le sol japo-
nais, pour résister, comme la sculpture, si nettement nationale au
vm° siècle déjà, aux inlluences chinoises, d’autant plus puissantes
que l’impérieux génie delà Chine, plus calligraphique que plastique,
agit ici avec une double force. Le rayonnement de la splendeur
Thang, l’action plus directe de l’art indo-grec, ne firent qu’exalter,
au vme siècle, la beauté de la statuaire, qui atteint alors — on le voit
à Yakusiji, dans le Bouddha en terre d’Udzumasa, le Bodhisattva de
Sangatsudo, l’adorable Kannon de Hokkéji, qui reproduit, dit-on,
les traits de l’impératrice Kômio (724-748) — son épanouissement
suprème. Mais ils eurent vite raison de la naissante technique
japonaise. Ils firent oublier cette première peinture. A peine née,
malgré une hâtive et brillante production, elle s’étiola. La greife
étrangère seule prospéra. La sève populaire ne donnera que plus
tard, et par intermittences seulement, quand la magnifique et
froide floraison chinoise ne l’épuise plus, ses Heurs exquises.
De cette peinture primitive, toute pénétrée de la délicate suavité
coréenne, de cette peinture vraiment japonaise, si vite étouffée, où
revit plus spirituelle la beauté profonde des grandes œuvres sculp-
turales du viuc siècle, et plus immatérielle la grâce de la petite
princesse souriante que nous avons vue parmi les statuettes de la
Maison impériale, rien n’a été exposé. Trois siècles séparent le
portrait de Shôtokou-Taishi des œuvres qui, chronologiquement, lui
succèdent au pavillon, et ces trois siècles sont l’époque même de la
formation de la peinture au Japon. Lacune inexplicable, et double-
ment regrettable, historiquement et esthétiquement, puisque l’his-
toire de la peinture reste sans base et qu’à ce moment appartiennent
des œuvres précieuses, et notamment deux des plus purs chefs-
d’œuvre — l'un, la séduction même; l’autre, la présence la plus
auguste — de toute la peinture japonaise : je veux dire la Dévi
découverte il y a quelques années à Yakusiji, et l’extraordinaire
paravent des « Six Beautés sous les arbres ».
L’importance de ces œuvres est telle, elles manifestent avec
une telle netteté le génie spontané de la race avant que les cultures
étrangères l’aient altéré, elles définissent avec une telle précision
les qualités esthétiques, les influences et les sentiments qui donnent
à ses créations leur unique saveur, qu'il est nécessaire d’en dire ici
un mot. Dans l’absence de toute peinture appartenant à cette
XXV. — 3” PÉRIODE.