GAZETTE DES BEAUX-ARTS
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les vagues sont traitées fait penser à certains précurseurs d’Everdin-
gen, tels que Porcellis et Simon de Ylieger. Mais le mouvement du
ciel est d’un modelé superbe, et l’opposition des nuées grisâtres qui
vont bientôt couvrir un grand nuage blanc, seul reste du beau temps,
est d’un effet très saisissant. Encore discrètes, les colorations chez
Everdingen sont cependant plus vives que chez scs devanciers. Ses
marines, d’ordinaire très supérieures à ses paysages norvégiens, attes-
tent chez lui des facultés d’observation et un sens dramatique qui, dans
scs meilleurs ouvrages de cette soiffe, le mettent au premier rang.
Adrien van de Yelde, en traitant des sujets plus calmes, a, plus
encore qu’Everdingen, abordé tous les genres. Paysagiste lui-même,
on sait les innombrables services que, sans compter, il a rendus à la
plupart de ses confrères, en « étoffant » leurs tableaux de personnages
et d’animaux très variés et très vivants, d’une exécution aussi
facile que spirituelle, ettoujours placés au bon endroit. Chez quelques-
uns de ces artistes, comme Moucheron, Hackaert et d’autres encore,
ces charmantes figures de van de Yelde restent certainement le
meilleur de leurs œuvres. En dépit de sa courte vue, grâce à sa
précocité et à son infatigable labeur, van de Velde a beaucoup pro-
duit : des paysages purs, des tableaux d’animaux, des plages et des
marines exquises, et jusqu’à des compositions mythologiques et
religieuses. C’est à Ja Fable antique qu’il a emprunté le sujet de la
toile importante et, en son temps, célèbre que M. Dutuit a payée
30 500 francs à la vente Schneider. La composition en avait été soi-
gneusement étudiée dans un dessin signé et daté de 1666 qui fait
également partie de la collection réunie au Petit Palais. Elle pro-
cède de ce réalisme un peu terre à terre et de ce goût tout à fait
hollandais qui, dans P interprétation des légendes de l’antiquité,
aboutit aux plus désastreux travestissements. Mais, si le style et la
noblesse font par trop défaut à cette œuvre, du moins les qualités
aimables de l’artiste s’y manifestent : la correction irréprochable de
son dessin, l’agrément de son coloris, et ce sens pénétrant de la vie
qui lui permet de donner aux animaux eux-mêmes la physionomie
individuelle qui appartient à chacun d’eux. Peut-être cette fois la
conscience scrupuleuse et le soin trop minutieux qu’il a mis à l’exé-
cution de cet ouvrage ont-ils un peu amoindri son mérite. C’est
évidemment d’après un modèle posé nu en plein soleil, qu’il a peint
la figure assez vulgaire d’Argus, et quant au groupe des animaux
qui l’avoisinent — la vache accroupie, les moutons placés à côté
d’elle, et même le chêne qui les abrite — ils se retrouvent identi-
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les vagues sont traitées fait penser à certains précurseurs d’Everdin-
gen, tels que Porcellis et Simon de Ylieger. Mais le mouvement du
ciel est d’un modelé superbe, et l’opposition des nuées grisâtres qui
vont bientôt couvrir un grand nuage blanc, seul reste du beau temps,
est d’un effet très saisissant. Encore discrètes, les colorations chez
Everdingen sont cependant plus vives que chez scs devanciers. Ses
marines, d’ordinaire très supérieures à ses paysages norvégiens, attes-
tent chez lui des facultés d’observation et un sens dramatique qui, dans
scs meilleurs ouvrages de cette soiffe, le mettent au premier rang.
Adrien van de Yelde, en traitant des sujets plus calmes, a, plus
encore qu’Everdingen, abordé tous les genres. Paysagiste lui-même,
on sait les innombrables services que, sans compter, il a rendus à la
plupart de ses confrères, en « étoffant » leurs tableaux de personnages
et d’animaux très variés et très vivants, d’une exécution aussi
facile que spirituelle, ettoujours placés au bon endroit. Chez quelques-
uns de ces artistes, comme Moucheron, Hackaert et d’autres encore,
ces charmantes figures de van de Yelde restent certainement le
meilleur de leurs œuvres. En dépit de sa courte vue, grâce à sa
précocité et à son infatigable labeur, van de Velde a beaucoup pro-
duit : des paysages purs, des tableaux d’animaux, des plages et des
marines exquises, et jusqu’à des compositions mythologiques et
religieuses. C’est à Ja Fable antique qu’il a emprunté le sujet de la
toile importante et, en son temps, célèbre que M. Dutuit a payée
30 500 francs à la vente Schneider. La composition en avait été soi-
gneusement étudiée dans un dessin signé et daté de 1666 qui fait
également partie de la collection réunie au Petit Palais. Elle pro-
cède de ce réalisme un peu terre à terre et de ce goût tout à fait
hollandais qui, dans P interprétation des légendes de l’antiquité,
aboutit aux plus désastreux travestissements. Mais, si le style et la
noblesse font par trop défaut à cette œuvre, du moins les qualités
aimables de l’artiste s’y manifestent : la correction irréprochable de
son dessin, l’agrément de son coloris, et ce sens pénétrant de la vie
qui lui permet de donner aux animaux eux-mêmes la physionomie
individuelle qui appartient à chacun d’eux. Peut-être cette fois la
conscience scrupuleuse et le soin trop minutieux qu’il a mis à l’exé-
cution de cet ouvrage ont-ils un peu amoindri son mérite. C’est
évidemment d’après un modèle posé nu en plein soleil, qu’il a peint
la figure assez vulgaire d’Argus, et quant au groupe des animaux
qui l’avoisinent — la vache accroupie, les moutons placés à côté
d’elle, et même le chêne qui les abrite — ils se retrouvent identi-