GUSTAVE RICARD
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il pourrait continuer leurs traditions, si Dieu lui prêtait vie!
Merci donc, mon cher Directeur, de m’avoir donné l’occasion de
rendre hautement hommage au brave compagnon de travail qui m’a
si généreusement aidé de ses forces dans le moment où je sentais
les miennes impuissantes à me soutenir. Je vous demande la per-
mission de joindre à ces actions de grâces en l’honneur de Ricard le
souvenir d’un autre artiste grand, comme lui, par le cœur et par le
talent, Jules Dupré, qui, au début de ma carrière, me donna en
quelques mots le substratum des efforts de toute sa vie pour atteindre
ce qui est le charme même d’un tableau, c’est-à-dire l’art de dispo-
ser les masses de lumière et d’ombre par l’entente des valeurs,
pour la satisfaction de l’œil.
A lui et à Ricard, à ces deux généreux amis, toute la ferveur de
ma profonde reconnaissance.
ÏI É B E R T
l semble qu’une Muse attentive préside aux destinées
posthumes de certains artistes, préserve leur mémoire
des publicités bruyantes, leurs ouvrages des repro-
ductions fâcheuses, leur nom de la louange des sots.
Une telle fortune est échue au peintre Gustave Ricard
Les rares connaisseurs qui, de son vivant, fréquentaient l’atelier de
la rue Du perré, sont remplacés d’année en année par d’autres aussi
délicats et non moins fervents. Mais le cercle se reforme sans
s’élargir. Ce sont les mêmes amis discrets et sûrs de la peinture,
visitant les musées aux heures matinales, s’absorbant chez eux
dans la contemplation de dix toiles de choix, goûtant l’art de peindre
pour lui-même, dignes de'recevoir en présent le tube de précieux
cadmium que Ricard offrit au jour de l’an à l’un d’entre eux qu’il
voulait particulièrement honorer.
Par les prés de sombre verdure, fleuris de belles femmes nues,
décors de Giorgione ou de Titien, et qui sont les Champs Elysées des
peintres, Ricard conversant avec ses maîtres et ses pairs, doil être
satisfait de la fortune faite à son œuvre. Nul artiste en effet ne fut
aussi peu soucieux des jugements du vulgaire. Celui qui signait
presque toutes ses toiles d’un simple G. R. ne saurait être mécon-
tent de ce que le public connaît à peine son nom.
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il pourrait continuer leurs traditions, si Dieu lui prêtait vie!
Merci donc, mon cher Directeur, de m’avoir donné l’occasion de
rendre hautement hommage au brave compagnon de travail qui m’a
si généreusement aidé de ses forces dans le moment où je sentais
les miennes impuissantes à me soutenir. Je vous demande la per-
mission de joindre à ces actions de grâces en l’honneur de Ricard le
souvenir d’un autre artiste grand, comme lui, par le cœur et par le
talent, Jules Dupré, qui, au début de ma carrière, me donna en
quelques mots le substratum des efforts de toute sa vie pour atteindre
ce qui est le charme même d’un tableau, c’est-à-dire l’art de dispo-
ser les masses de lumière et d’ombre par l’entente des valeurs,
pour la satisfaction de l’œil.
A lui et à Ricard, à ces deux généreux amis, toute la ferveur de
ma profonde reconnaissance.
ÏI É B E R T
l semble qu’une Muse attentive préside aux destinées
posthumes de certains artistes, préserve leur mémoire
des publicités bruyantes, leurs ouvrages des repro-
ductions fâcheuses, leur nom de la louange des sots.
Une telle fortune est échue au peintre Gustave Ricard
Les rares connaisseurs qui, de son vivant, fréquentaient l’atelier de
la rue Du perré, sont remplacés d’année en année par d’autres aussi
délicats et non moins fervents. Mais le cercle se reforme sans
s’élargir. Ce sont les mêmes amis discrets et sûrs de la peinture,
visitant les musées aux heures matinales, s’absorbant chez eux
dans la contemplation de dix toiles de choix, goûtant l’art de peindre
pour lui-même, dignes de'recevoir en présent le tube de précieux
cadmium que Ricard offrit au jour de l’an à l’un d’entre eux qu’il
voulait particulièrement honorer.
Par les prés de sombre verdure, fleuris de belles femmes nues,
décors de Giorgione ou de Titien, et qui sont les Champs Elysées des
peintres, Ricard conversant avec ses maîtres et ses pairs, doil être
satisfait de la fortune faite à son œuvre. Nul artiste en effet ne fut
aussi peu soucieux des jugements du vulgaire. Celui qui signait
presque toutes ses toiles d’un simple G. R. ne saurait être mécon-
tent de ce que le public connaît à peine son nom.