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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 11.1914

DOI issue:
Nr. 6
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Jamot, Paul: Les peintures et les dessins, 2: la Collection Camondo au Musée du Louvre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24888#0501

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LA COLLECTION CAMONDO AU MUSÉE DU LOUVRE 457

Femme s'essuyant les pieds (1886), garde encore quelque chose de
la première manière, plus mesurée et plus douce. Le Tub, qui
est de la même année est déjà plus rude : la lumière tombe
d’aplomb, sans ménagement, sur les épaules de la femme qui
s’accroupit, échine pliée et tête baissée, s’appuyant d’une main au
fond du bassin, tandis que l’autre main, tordue et retournée, presse
une éponge sur le cou. Mais, de cette intransigeance, de cette
exécution féroce, de ce dessin brutal, sort un style de plus en plus
large. Les deux pastels datant des années 1896-1898 sont d’admi-
rables exemples du réalisme décoratif par où cet observateur froi-
dement passionné, réfléchi et pénétrant résume les multiples expé-
riences de sa vie. Dans l’un, la couleur n’est pas moins simplifiée
que le dessin : des hachures de crayon rouge, bleu et jaune forment
une harmonie arbitraire et puissante autour du corps projeté en
avant et plié sur soi-même. Dans l’autre, le geste de la femme assise
sur le bord de la baignoire, relevant des deux mains ses cheveux
sur sa nuque, a une ampleur de fresque. Le torse a la plénitude et
la fermeté de la sculpture. Le fond est diapré de la plus riche et de
la plus éclatante polychromie, et ce qui semble une fantaisie auda-
cieuse est une combinaison méditée, pour un accord entre cette
diaprure des étoffes et les zébrures du pastel dans les chairs. Trois
monotypes de la même époque révèlent une esthétique semblable :
l’un d’eux, où l’on voit dans une atmosphère obscure une femme en
bonnet, assise sur son lit et mettant ses bas, fait penser aux nus de
Rembrandt.

Le tableau des Repasseuses (1884) appartient à une série qui est
moins connue, moins abondante aussi, que celles des Danseuses ou
des Femmes à leur toilette. Cependant les premières Blanchisseuses
de M. Degas sont à peu près contemporaines des premières Dan-
seuses1. Qu’y avait-il dans les mœurs et dans la profession de ces
modestes ouvrières qui fût de nature à séduire un artiste raffiné?
Le choix semble paradoxal ; on croit y reconnaître le désir plus ou
moins raisonné de montrer que tout mouvement nécessité par une
action peut devenir le thème d’une œuvre d’art. Par M. Degas, le

1. Dans son Journal, Concourt note sa première visite à M. Degas, le 13 février
1874, et il ajoute : « Après beaucoup de tentatives, d’essais, de pointes poussées
dans tous les sens, il s’est énamouré du moderne et, dans le moderne, il a jeté
son dévolu sur les blanchisseuses et les danseuses. » La toile de la collection
Camondo est une réplique, avec de très notables variantes de couleur, d’exécu-
tion et de types, d’un tableau peint en 1882, appartenant à M. Durand-Ruel
(Voir Leprieur et Demonts, Catalogue, n° 168).

xi.

4e PÉRIODE.

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