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Grand-Carteret, John
Les moeurs et la caricature en France — Paris, 1888

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https://doi.org/10.11588/diglit.9066#0371

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336

LES MŒURS ET LA CARICATURE EN FRANCE

C'est ainsi que l'écrivain libéral, le penseur éminent, confirmait en 1865
ce que les caricaturistes avaient noté par le crayon dès 1831, c'est-à-dire au
moment même où le macadam faisait son apparition.

De fait, toute cette première période de l'Empire, qui va de 1852 à 1865,
fut occupée en entier par deux choses futiles en apparence, qui devaient,
cependant, exercer une réelle influence sur les mœurs et sur l'organisme
social : le macadam, la crinoline.

L'un, surtout si l'on tient compte des grands travaux d'assainissement et
de percements qui allaient être opérés, rendit, en effet, les révolutions de
la rue plus difficiles; l'autre, en modifiant de fond en comble le costume
féminin, en le ramenant aux cages de l'époque austro-espagnole, fixa
l'attention générale sur ce point. C'est ainsi que, dès son origine, l'Empire
qui avait tué sans rémission la caricature politique tournait l'estampe
vers la femme et vers l'actualité parisienne.

Les faits les plus insignifiants qui, d'ordinaire, constituent la petite chro-
nique de la plume ou du crayon, furent élevés à la hauteur d'événements
et obtinrent les honneurs de la grande page. Daumier dont on trouve encore,
après le coup d'Etat, plusieurs belles suites, Les Parisiens en 1852, Croquis
musicaux, Physionomie des chemins de fer, Le Public au Salon, Daumier qui
avait encore une façon à lui do traiter les actualités, réduit à la portion con-
grue, se verra souvent forcé do transformer ses sujets d'étude en simples
faits divers illustrés. Et, pour comble, Philipon, qui rêve de plus en plus je ne
sais quelle lithographie sans couleur, lui enlèvera les beaux gras de son
crayon.

La femme n'a pas seulement augmenté de volume ; elle va absorber toutes
les forces vives du pays ; elle va développer, dans des proportions inconnues
jusqu'ici, le luxe et les plaisirs. « Certes à l'époque où Louis-Philippe
régnait sans façon, un parapluie sous le bras, » dit Eugène Pelletan, dont
le livre restera le document le plus précieux sur les mœurs du second
Empire, « on pouvait voir, comme à présent, de beaux hôtels, de beaux
équipages, de belles livrées et de belles femmes, à l'étalage, au balcon de
l'Opéra.

« Mais si, à cette époque, le luxe tenait sa place en France, il n'y tenait
que sa place, tandis qu'à cette heure-ci on ne voit que lui, on ne rencontre
que lui; il règne, il trône partout, comme le premier personnage de l'Etat
et comme le héros de la conversation. Quelque part qu'on aille, on n'entend
parler que de millions et de police correctionnelle. »

A la génération bourgeoise de 1830, dont l'unique idéal était l'argent, a
 
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