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— 172 —

semblée d'hommes éminents, sans doute,
mais pour la majeure partie si directement in-
téressés dans la question, que ce sera un vé-
ritable tour de force de ménager leurs suscep-
tibilités. Qu'il me soit permis, en attendant,
d'attirer votre attention sur un document qui
sans doute aura échappé à beaucoup de per-
sonnes amenées par leurs goûts ou leur état
à s'occuper des questions de l'enseignement
du dessin. Je veux parler du nouveau pro-
gramme d'études des écoles primaires nor-
males d'instituteurs ou d'institutrices.

On ne pense plus guère à nier la place im-
portante qu'il importe de donner au dessin
dans l'instruction populaire, et je crois que
l'on peut affirmer hardiment que les branches
essentielles sur lesquelles doit reposer cette
instruction, sont, outre la lecture et l'écriture,
le calcul et le dessin.

Utileàtous les états, le dessin estindispen-
sable à la majeure partie d'entre eux, sinon
dans ses applications immédiates, au moins
comme un moyen de développement de l'intelli-
gence. Vouloir faire des artistes de lous les
ouvriers serait absurde, mais rien n'est plus
indispensable que de leur former l'œil afin de
leur rendre plus facile la compréhension des
travaux auxquels ils se livrent. Il n'est pas né-
cessaire pour cela de faire dessiner aux en-
fantsdes têtes, ni des figures antiques, ni même
des ornements plus ou moins compliqués. Il
faut quelque chose de plus simple, quelque
chose enfin qui soit à la portée de leur jeune
intelligence et il existe pour cela des méthodes
fort rationnelles dont on pourrait, à la rigueur,
retrancher les développements pour les besoins
de la cause. L'essentiel c'est qu'il n'y ait plus
dans le pays une seule école qui n'ait son cours
de dessin obligatoire pour tous les élèves.

On n'a point assez insisté sur la question,
au dernier congrès, mais il suffit de lire le
discours prononcé par M. le ministre de l'In-
térieur, lors de l'ouverture de l'exposition
ou bien celui de M. Braun , directeur de
l'Ecole normale de Nivelles , prononcé au
congrès, pour voir combien il y a d'unanimité
à considérer le dessin comme devant faire
partie intégrante de l'enseignement de la jeu-
nesse. « C'est mon vœu le plus cher que je
vois se réaliser aujourd'hui ;» disait M. Braun
au congrès « désormais l'enfant apprendra à
dessiner comme il apprend à écrire; l'ouvrier
ne sera plus fatalement condamné à rester au
rang de manœuvre, mais, par la connaissance
du dessin, qui lui est indispensable, il s'élè-
vera, etc., etc » et tout le monde d'applaudir.

Après de si vives manifestations de sympa-
thie, n'était-on pas en droit de voir le pro-
gramme de l'enseignement normal primaire.,
faire une large part au dessin dans les insti-
tutions qui sont destinées à former les maî-

tres de l'avenir, pour les écoles primaires?
Et pourtant, le programme revisé des études
normales, inséré au Moniteur du \Z Octobre,
ne témoigne nullement de la sollicitude du
Gouvernement pour la branche qui nous occu-
pe. Jugez-en : trois années sont consacrées
par les jeunes gens aux études normales pri-
maires. Pendant la première ils dessinent
chaque semaine deux heures, pendant la se-
conde et la troisième ils dessinent une heure
par semaine. Enfin, à l'examen de sortie, sur
un total de 685 points, 25 points seulement
sont accordés au dessin. Je sais fort bien que
les élèves instituteurs n'ont pas de temps à
perdre et que chaque heure de la journée
trouve son emploi, mais je pense qu'il est,
dans le programme d'études, des branches
que jamais l'instituteur ne sera dans le cas
d'aborder à l'école et qui devraient céder le
pas au dessin. N'oublions pas que, dans les
campagnes,l'école primaire est l'unique source
d'instruction des enfants qui demeurent rare-
ment à l'école passé l'âge de onze ans. A
ceux-là le dessin doit être enseigné avec
autant de soin que la lecture, l'écriture et le
calcul. Et de quelle façon sera donné ce cours
par un instituteur qui, lui-même, n'aura des-
siné pendant deux ans qu'une heure par se-
maine.

Quant à la méthode suivieàl'école normale,
elle n'est qu'incomplètement spécifiée dans le
programme. J'y vois pourtant que les élèves,
après les premiers éléments, se livrent à l'é-
tude de modèles, pris dans le règne végétal
et s'appliquent à en tirer parti dans la com-
position de motifs d'ornement. Si utile et si
intelligent que soit un pareil système lorsqu'il
s'agit de former des décorateurs et des orne-
manistes, est-il logique de donner à l'ensei-
gnement du dessin dans les écoles primaires,
une direction si netlement tracée vers un
genre quelconque? 11 y a là un danger évi-
dent. L'art dit industriel, dont on parle tant
aujourd'hui, a certainement ses exigences et
il est temps qu'on les satisfasse , mais il n'est
pas plus raisonnable d'obliger tous ceux qui
veulent apprendre à dessiner à faire des or-
nements qu'il ne l'est de les obliger à copier
pendant quatre à cinq ans des tètes ombrées.

Le but essentiel de tout dessin étant d'a-
mener l'élève à dessiner les corps vus dans
l'espace, le dessin d'après le relief se présente
comme le complément naturel des premiers
éléments, et ce n'est qu'arrivé à ce point qu'il
importe de diriger les études de l'élève vers
une branche déterminée. Or ce ne sera jamais
là la mission del'école primaire, et, en suppo-
sant que cela fût, on ne pourrait confier cette
mission à un instituteur qui ne serait formé
que par deux cents heures d'exercice.

H. II.

Liège.

Nous avons inauguré le théâtre du Gymnase
avec un véritable succès. Une pièce du cru,
de notre Hyacinthe Kirsch, a puissamment
contribué à donner à celte solennité une im-
portance particulière.
Allons-]) gaiment ! tel est le litre de la Revue-
prologue de M. Kirsch, revue qui semblait
devoir mourir avec la circonstance, et qui a
survécu à l'actualité. Cette revue est spiri-
tuelle et de bon ton. Elle a été vivement et
chaudement applaudie. J'en extrais le passage
suivant qui est un résumé rapide et exact de
l'histoire du théâtre. On verra que si M. Kirsch
manie, dans le style léger, la plume avec
une supériorité réelle, il est aussi dans le gen-
re grave, un écrivain de mérite.

LA COMÉDIE.

Echo dos passions, imago de la vie,

Reflet des temps, des mœurs, je suis la Comédie.

Fille du monde ancien, dans Athènes, jadis,

Je fis mes premiers pas. Cralinus, Eupolis,

Poètes oubliés, Ménandre, Aristophane,

Le seul dont maint auteur recueille encor la mano,

Firent à mon enfance un printemps lumineux.

L'antique Liberté, de son lait généreux,

Me nourrit, et, dès lors, me vint l'horreur profonde

Du joug capricieux des souverains du monde.

Fièrc et libre, dans Rome aussi j'eus nies lauriers,

Et le vieil Ennius les cueillit des premiers.

Plante lui succéda. Joyeux aussi du rire,

11 eût certes raillé qui lui fut venu dire

Que vingt siècles plus tard, un poète fécond

Lui devrait deux succès : L'Avare, Amphitryon.

Terence, à son niveau dressant son personnage,

Sut épurer mon goût, ma forme, mon langage ,

Et je vis rayonner à mon œil enchanté

Une ère de grandeur et de prospérité.....

Mais un jour, jour de deuil! d'innombrables nuées
De sauvages guerriers, couvrant rnonts et vallées.
S'abattirent, du Nord, sur ces heureux climats
Dont l'art et la science avaient lait leurs Etats.
Emportée avec eux, je vis en ce désastre
Du beau théâtre ancien, bientôt s'éteindre l'astre,
Et, dix siècles durant, sous un sombre linceuil,
Vivante, mais muette, enfermée au cercueil,
J'attendis, j'espérai la radieuse aurore

Qui me ferait revivre et resplendir encore!.....

Oh ! j'attendis longtemps ! Mon lugubre sommeil,

Par des songes meilleurs l'osant croire au réveil,

Fut agité souvent. Il me semblait renaître

Au chant des Troubadours qui, sous le toit champêtre

Comme ou riche castel, répétant leurs refrains,

Passaient, (lisant leurs vers à l'écho des chemins.

Puis viennent la Bazachc avec ses gais compères

Et de la Passion les burlesques confrères,

Qui, dans le vain espoir de me ressusciter,

Sur d'indignes tréteaux me forcent de monter.

Hélas ! je ne suis plus la noble comédie !

On m'affuble dos noms de farce, de sottie;

On larde mon front pale; on me vêt d'oripeaux

| Et, je trône, ô douleur! près du Prince des Sols!...
Ah ! mieux valait la mort que cette mascarade
Qui rabaissait la scène à l'ignoble parade !

I Pourtant de ce cahos sortit un beau malin
Le chef- d'oeuvré naïf de Maître Patelin.
Mais un souffle plus pur arrive d^Italie
Et d'Espagne, pays de grâce et d'harmonie;
Et Jodelle, Grévin, Baïf et La Rivey
D'un théâtre nouveau tentent l'heureux essai.
Enfin le soleil luit à travers le nuage,
Il dissipe la nuit du sombre moyen-àge,
Vient ranimer mou âme et, sur mon corps glacé,
Efface la souillure et les coups du passé.
Je m'éveille à la voix de Rotrou, de Corneille;
Je sors de mon tombeau rajeunie!... 0 merveille!
Je m'élance joyeuse et le front couronné;
Je respire; je vis!... Le grand Molière est né!...
Molière! à ce nom seul quel horizon s'entr'ouvre!
Cet immortel génie, en se jouant, découvre
L'art de charmer l'esprit et de toucher le cœur,
D'instruire, d'amuser et de rendre meilleur.
 
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