Aujourd’hui, d’agrement, l’art a &t€ promu au grade decoratif, Tout s’y stylise, meme l’inquietude
(par ailleurs tant galvandee) dans sa forme la plus hautement inhumaine. Apres que les
ballets russes se furent empar&s des mannequins de Chirico, la glauque hantise de ce peintre
sembla n’&tre plus qu’un Eclairage parmi les autres. Carnaval, encore et toujours Carnaval
mais rien que carnaval. Des &tres de chair ont par6 leur coquetterie d’attributs metaphysi-
ques, d’un rythme plaisant s’est anime l’immuable, mais, envers de la mCdaille, cette ville
noume€nale oü la minute auparavant on eüt voulu penetrer par la porte du cadre, est devenu
carton-päte. Des lors, les plages oü Chirico fait galoper des chevaux, et pleuvoir des machines
a coudre et des atmoires ä glace, n’ont plus l’indeniable surrE&alit&, qui seule, tente L’esprit
et la cheir non asservis.
Que Picasso, part contre ait €chappe ä tout peril esthetique, au temps de Parade, qu'il secoue
si magistralement les louanges dont un gEnie moin fatal se fut empetre, prouve que si le
public, le succe&s. le gout du jour peEtrifient de tres mouvantes libertes. certains esprits
Echapperont encore ä& cette scl&rose: Ainsi, en opposition aux films dits abstraits nouveau
poncif des cin&mas d’avant garde, l’oeuvre, d’un Bunuel, libre de tout attirail givre, fleurs
de verre carre&s et cubes lache&s en plein vide, en pleine hyste&rie. Le choix des moyens
d’expression n’importe guere, Dali, par exemple, qui au lieu des images anim6&es au choilsi
la peinture, d&couvre des rapports non moins insoupconne&c. Une femme parfaite se dessine
d’un cheval. Nous la savons prete a sauter de la toile de Dali sur l’ecran ou Bunuel, par
les simples gestes de la cr&ature traduit les secrets inexorables. Du moindre objet voici
le sang pret ä jaillir, et a se lever, un fantöme qui, enfin, ne sera plus de linge invertebre,
Les nuages, les canchemars au blanc d’oeuf et a l’&ctoplasme se dissipent. MeEme les tuyaux
de poele se cambrent pour d’eEblouissantes multiplications.
RENE CREVEL
KA Montana Septbre 1930
EC
OSTEN
PyeN SGN
VS S
78
(par ailleurs tant galvandee) dans sa forme la plus hautement inhumaine. Apres que les
ballets russes se furent empar&s des mannequins de Chirico, la glauque hantise de ce peintre
sembla n’&tre plus qu’un Eclairage parmi les autres. Carnaval, encore et toujours Carnaval
mais rien que carnaval. Des &tres de chair ont par6 leur coquetterie d’attributs metaphysi-
ques, d’un rythme plaisant s’est anime l’immuable, mais, envers de la mCdaille, cette ville
noume€nale oü la minute auparavant on eüt voulu penetrer par la porte du cadre, est devenu
carton-päte. Des lors, les plages oü Chirico fait galoper des chevaux, et pleuvoir des machines
a coudre et des atmoires ä glace, n’ont plus l’indeniable surrE&alit&, qui seule, tente L’esprit
et la cheir non asservis.
Que Picasso, part contre ait €chappe ä tout peril esthetique, au temps de Parade, qu'il secoue
si magistralement les louanges dont un gEnie moin fatal se fut empetre, prouve que si le
public, le succe&s. le gout du jour peEtrifient de tres mouvantes libertes. certains esprits
Echapperont encore ä& cette scl&rose: Ainsi, en opposition aux films dits abstraits nouveau
poncif des cin&mas d’avant garde, l’oeuvre, d’un Bunuel, libre de tout attirail givre, fleurs
de verre carre&s et cubes lache&s en plein vide, en pleine hyste&rie. Le choix des moyens
d’expression n’importe guere, Dali, par exemple, qui au lieu des images anim6&es au choilsi
la peinture, d&couvre des rapports non moins insoupconne&c. Une femme parfaite se dessine
d’un cheval. Nous la savons prete a sauter de la toile de Dali sur l’ecran ou Bunuel, par
les simples gestes de la cr&ature traduit les secrets inexorables. Du moindre objet voici
le sang pret ä jaillir, et a se lever, un fantöme qui, enfin, ne sera plus de linge invertebre,
Les nuages, les canchemars au blanc d’oeuf et a l’&ctoplasme se dissipent. MeEme les tuyaux
de poele se cambrent pour d’eEblouissantes multiplications.
RENE CREVEL
KA Montana Septbre 1930
EC
OSTEN
PyeN SGN
VS S
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