TABLEAU HISTORIQUE.
distractions, dont cependant les poètes et les romanciers ont faille partage de ce prince, aussi
beau que le jour, a dit l'Ariostc : mais alors les variations, les contrastes les plus bizarres, signa-
laient et les tems et les hommes.
Hachis en fournil un double exemple : il sort du cloître où il s'était retiré, et, sans en quitter le
costume, se met à la télé d'une armée pour disputer aux princes lombards le tronc vacant par la mort
de sou frère. Mais ce fut Didier, duc de Toscane, le plus puissant cl le plus adroit des compéti-
teurs, qui en prit possession : il avait des qualités propres à en relever l'éclat, s'il eût pu s'y main-
tenir plus long-tems. Les premières années de son règne furent employées à augmenter ses états, en
usant tour-à-tour de négociations, de menaces , et de mesures hostiles contre l'empereur d'Orient,
les papes, et même les rois de France; mais enfin, ne pouvant résister à la politique d'Adrien lrr,
unie à la force de Charlcmagne, que ce pontife habile sut décider à la conquête de l'Italie, Didier
succomba et perdit à la fois le sceptre et la liberté. Charlcmagne l'envoya, avec toute sa famille,
finir ses jours en France; et, resté maître de tous ses états, il en forma un établissement royal pour
un de ses fils, sauf les portions dont il disposa en faveur du S1 Siège. Ainsi finit, en yy/\, le royaume
des Lombards en Italie, après avoir duré deux cent six ans, à compter de l'an 568, qu'ils y entrèrent
sous la conduite d'AIhoin.
Si je pouvais m'écarter de l'unique but auquel je dois tendre, après avoir rappelé les principaux
traits de l'histoire civile des Lombards en Italie, je dirais comment une partie des maux qui déso-
lèrent cette contrée pendant leur domination, doit s'attribuer à la conduite des chefs qui, sous le
nom d'Exarques, en gouvernaient alors une portion sous l'autorité de l'empereur grec. Leurs pre-
miers efforts pour s'opposer à la conquête des Lombards, avaient sans doute été pour eux un devoir;
niais, quand une fois toute opposition fut devenue inutile, les moyens de résistance qu'ils employè-
rent, plus souvent pour servir leur ambition personnelle que par dévouement aux intérêts de l'em-
pire, furent peruicieux pour les peuples, continuellement froissés entre les deux puissances.
Ces exarques étaient de grands officiers, envoyés de Constautiuople par l'empereur grec pour gou-
verner l'Italie; usage qui datait de l'an 563, sept ans après la destruction de l'empire des Goths dans
cette contrée. L'invasion des Lombards y réduisit presque aussitôt les possessions.des Grecs aux
villes de Ravenne et de Padoue, avec une partie de la Ligurie, et les îles de Sicile, de Sardaigne, et
de Corse.
Rome et Naplcs ne furent plus bientôt que des espèces de républiques sous la protection de l'em-
pire; et l'état de Venise était déjà dans une situation incertaine, dont il sortit peu après pour devenir
une puissance considérable.
Nommés à la cour de Constantînople, le plus souvent par la faveur ou par l'intrigue, les exarques
d'ailleurs semblaient ne venir en Italie que pour s'y procurer des richesses, aliment de tous les vices
qui sont l'ordinaire apanage d'hommes ainsi choisis. Plusieurs, tels que Lénvigius en 615, et Eleu-
tbère en 619, y payèrent de leur vie les maux et les vexations dont ils accablaient les peuples.
La conduite de ces mêmes exarques à l'égard des papes, n'était pas moins odieuse : chargés de
donner, au nom de l'empereur, la confirmation nécessaire pour l'exaltation des nouveaux pontifes,
plus d'une fois ils ne l'accordèrent qu'à prix d'argent, et souvent même après un schisme qui leur
en procurait des deux côtés.
Ravenne, comme capitale et résidence des exarques, avait les moyens d'entretenir les monumens
des arts dont elle était redevable aux rois goths, et sur-tout au grand Théodoric. Mais cette ville et
le reste de l'exarchat furent contiuuellement le sujet et le théâtre de luttes sanglantes entre les Grecs
et les Lombards.
Nous verrous, dans le chapitre suivant, comment cet état permanent de guerre, qui dura depuis
la fin du VT siècle jusqu'à celle du VIIF, époque deda chute des Lombards, fournit aux papes l'oc-
casion d'agrandir leur domaine territorial, et les moyens de fonder une souveraineté réelle.
La période dont je viens de retracer sommairement les principaux évènemens, et que j'appellerai
Lombarde, est sans contredit, par rapport à l'état des lettres et des arts, la plus déplorable de toutes.
distractions, dont cependant les poètes et les romanciers ont faille partage de ce prince, aussi
beau que le jour, a dit l'Ariostc : mais alors les variations, les contrastes les plus bizarres, signa-
laient et les tems et les hommes.
Hachis en fournil un double exemple : il sort du cloître où il s'était retiré, et, sans en quitter le
costume, se met à la télé d'une armée pour disputer aux princes lombards le tronc vacant par la mort
de sou frère. Mais ce fut Didier, duc de Toscane, le plus puissant cl le plus adroit des compéti-
teurs, qui en prit possession : il avait des qualités propres à en relever l'éclat, s'il eût pu s'y main-
tenir plus long-tems. Les premières années de son règne furent employées à augmenter ses états, en
usant tour-à-tour de négociations, de menaces , et de mesures hostiles contre l'empereur d'Orient,
les papes, et même les rois de France; mais enfin, ne pouvant résister à la politique d'Adrien lrr,
unie à la force de Charlcmagne, que ce pontife habile sut décider à la conquête de l'Italie, Didier
succomba et perdit à la fois le sceptre et la liberté. Charlcmagne l'envoya, avec toute sa famille,
finir ses jours en France; et, resté maître de tous ses états, il en forma un établissement royal pour
un de ses fils, sauf les portions dont il disposa en faveur du S1 Siège. Ainsi finit, en yy/\, le royaume
des Lombards en Italie, après avoir duré deux cent six ans, à compter de l'an 568, qu'ils y entrèrent
sous la conduite d'AIhoin.
Si je pouvais m'écarter de l'unique but auquel je dois tendre, après avoir rappelé les principaux
traits de l'histoire civile des Lombards en Italie, je dirais comment une partie des maux qui déso-
lèrent cette contrée pendant leur domination, doit s'attribuer à la conduite des chefs qui, sous le
nom d'Exarques, en gouvernaient alors une portion sous l'autorité de l'empereur grec. Leurs pre-
miers efforts pour s'opposer à la conquête des Lombards, avaient sans doute été pour eux un devoir;
niais, quand une fois toute opposition fut devenue inutile, les moyens de résistance qu'ils employè-
rent, plus souvent pour servir leur ambition personnelle que par dévouement aux intérêts de l'em-
pire, furent peruicieux pour les peuples, continuellement froissés entre les deux puissances.
Ces exarques étaient de grands officiers, envoyés de Constautiuople par l'empereur grec pour gou-
verner l'Italie; usage qui datait de l'an 563, sept ans après la destruction de l'empire des Goths dans
cette contrée. L'invasion des Lombards y réduisit presque aussitôt les possessions.des Grecs aux
villes de Ravenne et de Padoue, avec une partie de la Ligurie, et les îles de Sicile, de Sardaigne, et
de Corse.
Rome et Naplcs ne furent plus bientôt que des espèces de républiques sous la protection de l'em-
pire; et l'état de Venise était déjà dans une situation incertaine, dont il sortit peu après pour devenir
une puissance considérable.
Nommés à la cour de Constantînople, le plus souvent par la faveur ou par l'intrigue, les exarques
d'ailleurs semblaient ne venir en Italie que pour s'y procurer des richesses, aliment de tous les vices
qui sont l'ordinaire apanage d'hommes ainsi choisis. Plusieurs, tels que Lénvigius en 615, et Eleu-
tbère en 619, y payèrent de leur vie les maux et les vexations dont ils accablaient les peuples.
La conduite de ces mêmes exarques à l'égard des papes, n'était pas moins odieuse : chargés de
donner, au nom de l'empereur, la confirmation nécessaire pour l'exaltation des nouveaux pontifes,
plus d'une fois ils ne l'accordèrent qu'à prix d'argent, et souvent même après un schisme qui leur
en procurait des deux côtés.
Ravenne, comme capitale et résidence des exarques, avait les moyens d'entretenir les monumens
des arts dont elle était redevable aux rois goths, et sur-tout au grand Théodoric. Mais cette ville et
le reste de l'exarchat furent contiuuellement le sujet et le théâtre de luttes sanglantes entre les Grecs
et les Lombards.
Nous verrous, dans le chapitre suivant, comment cet état permanent de guerre, qui dura depuis
la fin du VT siècle jusqu'à celle du VIIF, époque deda chute des Lombards, fournit aux papes l'oc-
casion d'agrandir leur domaine territorial, et les moyens de fonder une souveraineté réelle.
La période dont je viens de retracer sommairement les principaux évènemens, et que j'appellerai
Lombarde, est sans contredit, par rapport à l'état des lettres et des arts, la plus déplorable de toutes.