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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 1)

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Leroi, Paul: Le fils de Gavarni
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https://doi.org/10.11588/diglit.16670#0026

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pures gloires de ce temps, créateur nulle fois supérieur1 à son maître, dont la tyrannie, subie
avec dévotion, a notablement enrayé l'essor du disciple.

Cette digression est loin d'être hors de propos; on ne saurait trop répéter qu'il n'y a de durable
aujourd'hui que l'art vivant, l'art qui vit de la vie de son époque; ce n'est point dans un siècle aussi
en gestation que le nôtre, qui voit tant de croyances emportées à tous les vents, que l'on peut sans folie
rêver de remonter le courant et de ressusciter l'art du passé; —le passé! objet éternel des respects,
de l'admiration et de l'étude de tous les artistes dignes de ce nom, dans chacune de ses manifestations
vraiment glorieuses et non conventionnelles; le passé, ce doit être pour eux tous un sujet de con-
stante émulation, de noble ambition sans bornes surtout; il s'agit non de l'imiter, non de l'égaler,
mais de réussir à le dépasser. Que ce soit démence d'y songer, c'est possible pour les esprits étroits,
pour les organisations vulgaires. Ceux qui auront l'âme assez haute pour tenter la sublime aventure,
seront soutenus par cette certitude que l'avenir porte le triomphateur nouveau dans ses flancs et
que ce peut être l'un d'eux. Quant aux vaillants qui succomberont dans la lutte, ils n'ignorent pas que
toute victoire coûte d'héroïques soldats; ils féconderont par leur défaite même le sol sacré sur lequel
ils auront combattu le bon combat. Et n'est-ce donc rien que d'être rangés parmi les précurseurs?

Nul n'a plus que moi le culte de l'art de la Grèce; mais je suis de ceux qui se découvrent avec
la plus profonde admiration et devant la frise du Parthénon, cette prodigieuse merveille du passé, et
devant la Patrie ai danger de François Rude, cet immortel chef-d'œuvre qui nous ouvre la voie de
l'avenir. On ne refait point l'art de la Grèce; on le pastiche, et c'est pitié. Que l'exemple de la Hol-
lande nous éclaire enfin ! 11 a suffi à son école d'être originale pour conquérir une place d'honneur;
elle n'a cependant pas produit l'ombre d'un tableau d'histoire; elle s'est bornée à laisser des œuvres
de premier ordre dans chacun des genres qu'elle a traités; les traditions, elle les a ignorées, elles ne
se sont pas même réfugiées chez elle dans l'art décoratif, leur naturel asile. Qu'on veuille y réfléchir,
les transformations sociales, résultat nécessaire des révolutions politiques, nous ont placés dans des con-
ditions qui ont des analogies bien plus réelles qu'on ne semble le croire avec la situation spéciale
d'où sortit la grande école de cet énergique petit pays. Les larges établissements princiers, les immenses
palais, les résidences fastueuses, toutes ces exceptions du présent qui étaient des faits tout simples
et si nombreux dans le passé, ont disparu pour faire place à des demeures de bien moindre impor-
tance; le home moderne n'a rien de commun avec les vastes hôtels d'autrefois ; les petits appartements
de Louis XV ont été une intuition de l'avenir; on aime à se sentir chez soi; de là, la nécessité absolue
de l'art intime, celui qui fait en quelque sorte partie intrinsèque de notre être, celui au milieu duquel
nous nous mouvons, s'il est permis de s'exprimer ainsi, celui dont nous ne pouvons nous passer, —
car ce siècle si décrié a vu se vulgariser la passion de l'Art, comme aucun de ceux qui l'ont précédé.
Un seul modèle est possible, une seule voie sensée : faire ce que firent jadis les maîtres, grands et
petits, de la Néerlande, mais le faire autrement : être nous, comme ils ont été eux. Terburg et Metsu
ont créé des chefs-d'œuvre en peignant fidèlement leurs dignes contemporains. J'ai la prétention
d'être fanatique des Hollandais; je n'en suis pas moins convaincu que les élégances raffinées qui
s'étalent sous nos yeux, sont pour un artiste une tres-préférable source d'inspiration. On crie sot-
tement contre le costume et les mœurs modernes. Phrases toutes faites, banalités ressassées,
vieux clichés, — pas autre chose. C'est à ce préjugé facile que s'est attaqué M. Pierre Gavarni
avec un succès dont les sévères études, auxquelles il se livre avec acharnement, pour se perfection-
ner dans la partie matérielle de son art, permettent d'augurer brillamment pour l'avenir. Le dessina-

— M. Ingres n'a jamais touché, même de très-loin, au but qu'il avait ù atteindre. Qu'on ne s'y trompe pas, un tableau n'existe point par
quelques qualités isolées, mais par son ensemble; l'ensemble, M. Ingres ne s'en est jamais douté. J'ai dit qu'un grand nombre de ses
portraits dessinés d'après nature méritaient les plus légitimes éloges; en dehors de ses dessins d'après nature, et encore s'agit-il de figures
jsolées, M. .Ingres n'a jamais su créer un dessin avouable; — voir son dessin pour le diplôme des médailles de l'Exposition universelle
de 1855. A ceux qui me trouveraient trop sévère quand je n'admets qu'un très-petit nombre de ses portraits peints, je n'ai qu'à répondre
en les renvoyant, entre tant d'autres, au Parerait du duc d'Orléans et en leur demandant s'ils connaissent la Galerie des Offices à Florence.
Dans les salles où sont réunis les portraits des maîtres, et où il y en a tant de beaux et tant d'exécrables, ceux de M. Ingres et de ses
disciples figurent entre les mauvais parmi les pires; ces messieurs ne peuvent pas être soupçonnés d'égoïsme; ils se sont eux-mêmes mas-
sacrés.

[. Il suffit, pour s'en convaincre, d'entrer à Saint-Vincent-de-Paul.
 
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