Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Hinweis: Ihre bisherige Sitzung ist abgelaufen. Sie arbeiten in einer neuen Sitzung weiter.
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 1)

DOI Artikel:
La Fizelier̀e, Albert de: Louis Boulanger
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16670#0247

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
Marchez, frères jumeaux, l'artiste avec l'apôtre!
L'un nous peint l'univers que nous explique l'autre;

Car, pour notre bonheur,
Chacun de vous, sur terre, a sa part qu'il réclame.
A toi, peintre, le monde! à toi, poète, lame!
A tous deux le Seigneur!

Mai 1830,

Ainsi il avait alors vingt-quatre ans, ce bienheureux artiste qui, trois ans plus tôt, déjà avait donné
Maqeppa, son premier chef-d'œuvre au Salon de 1827. Ce Ma~eppa est aujourd'hui au Musée de Rouen,
— et Boulanger n'a rien au Louvre! — C'est une des œuvres les plus caractéristiques de l'école nouvelle.
Avec la Naissance de Henri IV, d'Eugène Devéria, les Massacres de Scio, d'Eugène Delacroix, il formait
une sorte de trio français dans lequel semblait devoir renaître le triple génie de Véronèse, de Titien et
de Rubens. C'étaient là du moins les noms qu'on prononçait devant ces toiles étonnantes qui succé-
daient aux compositions froides et compassées de la maigre suite de David.

Aussitôt Victor Hugo prenait-il la plume, et après une terrifiante et sublime description du supplice
de Mazeppa, qui devait aboutir à son élection prochaine d'Hetmann de l'Ukraine, il trouvait cette belle
comparaison du peintre emporté sur la croupe de son génie, terrassé par le travail et recueillant la
gloire après le martyre.

Ainsi lorsqu'un mortel, sur qui son dieu s'étale,
S'est vu lier vivant sur ta croupe fatale,

' Génie, ardent coursier,

En vain il lutte, hélas ! tu bondis, tu l'emportes,
liors du monde réel dont tu brises les portes
Avec tes pieds d'acier!

Il crie épouvanté, tu poursuis implacable.
Pâle, épuisé, béant, sous ton vol qui l'accable

Il ploie avec effroi;
Chaque pas que tu fais semble creuser sa tombe.
Enfin le terme arrive... il court, il vole, il tombe.
Et se relève roi !

Combien faut-il de vers comme ceux-là, ajoutés à beaucoup de talent et à une ardeur invincible
de production, pour faire d'un pauvre jeune peintre de vingt-trois ans un favori de la fortune? Des mil-
liers ne suffiraient pas si un gouvernement, ami des arts, ne soutient pas ses efforts et ne sait pas
donner un but utile et profitable à sa fièvre d'inspiration.

Sainte-Beuve, moins enthousiaste que Victor Hugo, et sceptique par-dessus tout, l'a bien dit à Bou-
langer dans un livre qu'il intitulait, ô dérision! les Consolations :

Je ne peux m'empêcher de penser qu'au génie

La gloire est de nos jours malaisément unie;

Qu'à moins d'un grand effort suivi d'un grand bonheur,

L'artiste n'a plus droit d'attendre un long honneur.

........La part la meilleure,

Sur cette terre ingrate où l'humanité pleure,
Est encor d'admirer le beau, de le sentir,
De l'exprimer sans bruit, et, le soir, de sortir.

Ainsi fit Louis Boulanger. Il eut de rares occasions de savourer l'honneur d'immortaliser son
talent sur la pierre de nos édifices; il se renferma en lui-même, peignit par amour de son art, se laissa
trop souvent oublier et partit un jour, tandis qu'il était encore plein de force, de verve et de bonne
volonté.
 
Annotationen