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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 1)

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Yriarte, Charles: J.-F. Millet
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https://doi.org/10.11588/diglit.16670#0177

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1C0 L'ART.

en connaît plus de cent. Il ajouta ainsi à l'ensemble de sa production toute une branche considé-
rable de haute valeur et qui, pour notre part, nous a beaucoup plus impressionné que la plupart de
ses toiles.

On comprendra facilement que nous ne pouvons donner de cette partie de ses travaux qu'une
impression générale, celle qui se dégage de l'examen général ; mais si un iour, comme nous l'espé-
rons, on réunit ces dessins et pastels dans une exposition spéciale des travaux de François Millet,
nous ne craignons pas de dire qu'il y aura une véritable émotion dans le monde de ceux qui ont
au cœur l'amour profond des choses de l'art. Ce sont ces dessins importants qui arrêtaient dès
longtemps le regard d'Hippolyte Flandrin, qu'on aurait cru réfractaira à l'admiration des qualités
de Millet.

Dans cette galerie, qui ne serait complète que si les deux hommes qui possèdent la plupart de
ces œuvres s'entendaient pour les réunir un seul jour au profit du public, je n'en veux choisir que
quelques-unes, ses plus originales, celles qui sont tout à fait hors ligne.

Les Trois Meules, effet d'automne, grande composition d'un horizon vaste, avec tout un troupeau
sur le premier plan ; les ondes vivantes des animaux dont les dos pelés moutonnent les uns au-dessus
des autres sont admirablement rendues. Les meules, chez tant d'autres artistes, sont un tas de paille
inerte et sans modelé; chez lui c'est une masse cherchée, établie, avec son anatomie exacte, sa
construction tout à fait savante, basée sur une observation incessante des dépressions habituelles et
des défauts d'équilibre amenés par le souffle constant de l'aquilon venant du môme point. Le soleil
brille, mais il fait froid; la bergère, instinctivement, s'abrite entre les meules tout en s'offrant aux
pâles rayons qui la peuvent réchauffer. Elle veut profiter de ce dernier soleil et s'abriter contre ces
premiers vents. Les silhouettes de village à l'horizon sont étonnantes aussi de science de dessin,
tout y est, enfermé dans une ligne générale large et vraie.

Un Coucher de soleil sur une bruyère. Pour celui qui n'a point le sentiment de la nature et qui
n'observe point les effets de la lumière, c'est certainement un hiéroglyphe ou une mystification. Pour
l'initié, c'est un poème que cette lande nue qui, entre son premier plan et son horizon extrême,mesure
plusieurs lieues, sans autres épisodes et sans autres accidents que des mottes brunes sur lesquelles
pousse la bruyère violacée, déjà passée de ton. Quand le champ devient ciel, la ligne idéale qui
sépare la terre du nuage est un prodige d'observation, et la brume violette produite par les tons
de la bruyère aux plans extrêmes et qui rappelle aux yeux cette poussière rosée des arbres qui
vont bourgeonner au printemps indique chez Millet l'œil le plus sensible, et le peintre qui sait
le mieux rendre, à l'aide d'un procédé borné, un des effets les plus délicats du spectacle de la
nature.

La Rentrée du foin, grand pastel très-enlevé (exécuté, parait-il, avec une grande rapidité),
tellement fait qu'on se demande comment cette main qui semble pesante et .ce pinceau large ont
pu indiquer au premier plan les milliers de brindilles qui couvrent la terre et les filaments ténus
qui flottent dans l'air, s'échappant des fourches agiles. L'orage va venir, un nuage noir déchire
l'horizon enflammé par un rayon jaune; dans une heure le ciel se déchirera et la récolte sera
compromise. Dans la plupart de ces dessins il est impossible de se rendre compte du procédé
d'exécution, mais l'effet, au point de vue, est extrêmement satisfaisant, et le travail est poussé
très-loin.

Un Parc de moutons la nuit, effet très-observé et rendu de souvenir. Daubigny, dans une toile
très-connue, a abordé le sujet et l'a compris de la même façon. Dans un ciel noir, mais transparent
par reflet, la lune en son plein, la lune classique de Musset, le point sur un I, occupe le centre
du tableau; le vaste champ est enveloppé dans l'ombre; sur les sillons tracés par la charrue un
berger a planté son parc et rentre ses moutons; masses brunes confuses sur ces mottes brunes. Les
scintillements de l'astre, la justesse des formes dans leur indécision nécessaire, les silhouettes des
animaux pressés les uns contre les autres, dont aucun d'eux n'existe pour l'oeil qui se rapproche, et
qui sont tous si étonnamment justes quand on se place au point de vue, causent l'impression la
plus profonde, et accusent une science tout à fait accomplie des effets.

Je m'arrête, et je devrais insister sur la Veillée, la Falaise, l'Entrée de la Forêt à Barbhon, effet
 
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