L’ART DÉCORATIF
Et que dire des pigeons, qui ont bien
leur rôle à Venise et leur caractère, quand
on n’en abuse pas, qu’on ne les fait pas
roucouler sur toutes les épaules, ainsi qu’il
en est dans les aquarelles-souvenirs que
l’on débite aux étrangers.
Il s’est établi à Venise toute une habi-
déjà à imprimer à la scène une impression-
nante originalité. La gondole elle-même, re-
couverte du fel^e noir, ne prend-elle pas,
d’ailleurs, la forme d’un catafalque, et ne
dirait-on pas que ce sont de perpétuels
convois funèbres qui s’espacent sur l’eau ?
Mais pour les barques funéraires, la con-
BELLANGER-ADHÉMAR
Dans le canal de la Giudecca
tude de peinture des scènes animées des
rues et des places, dont on peut établir
peut-être la filiation avec les tableux intimes
et l’art un peu menu de Longhi. Giacomo
Favretto, puis M. Ettore Tito ont institué
une tradition ; et leurs tableaux de vie po-
pulaire, où il est toujours aisé de tomber
un peu trop dans le sujet de genre, feront
encore école dans le milieu des peintres vé-
nitiens.
Il ne faut pas oublier dans les spectacles
de la rue les cérémonies publiques qui gar-
dent volontiers à Venise un caractère tra-
ditionnel fort intéressant. Les cortèges d’en-
terrements sont fort curieux à voir : la seule
condition de ce transport par eau suffirait
struction se rehausse de broderies et de
sculptures d’argent, d’une emphase méridio-
nale. Pour les funérailles des premières
classes, c’est tout un monument flottant qui
s’érige, avec des figures symboliques, la
Mort maniant sa faux, le Temps avec son
sablier, des guirlandes et des candélabres.
Je me rappelle un grand enterrement
déroulant son cortège sur la place S. Gio-
vanni e Paolo ; des confréries d’hommes,
revêtant la longue simarre antique, et por-
tant ces quadruples cierges soudés en fais-
ceau et brûlant de leurs quatre mèches, qui
figurent depuis des temps immémoriaux dans
les cérémonies religieuses de Venise. Re-
portez-vous à cette Procession sur la place
58
Et que dire des pigeons, qui ont bien
leur rôle à Venise et leur caractère, quand
on n’en abuse pas, qu’on ne les fait pas
roucouler sur toutes les épaules, ainsi qu’il
en est dans les aquarelles-souvenirs que
l’on débite aux étrangers.
Il s’est établi à Venise toute une habi-
déjà à imprimer à la scène une impression-
nante originalité. La gondole elle-même, re-
couverte du fel^e noir, ne prend-elle pas,
d’ailleurs, la forme d’un catafalque, et ne
dirait-on pas que ce sont de perpétuels
convois funèbres qui s’espacent sur l’eau ?
Mais pour les barques funéraires, la con-
BELLANGER-ADHÉMAR
Dans le canal de la Giudecca
tude de peinture des scènes animées des
rues et des places, dont on peut établir
peut-être la filiation avec les tableux intimes
et l’art un peu menu de Longhi. Giacomo
Favretto, puis M. Ettore Tito ont institué
une tradition ; et leurs tableaux de vie po-
pulaire, où il est toujours aisé de tomber
un peu trop dans le sujet de genre, feront
encore école dans le milieu des peintres vé-
nitiens.
Il ne faut pas oublier dans les spectacles
de la rue les cérémonies publiques qui gar-
dent volontiers à Venise un caractère tra-
ditionnel fort intéressant. Les cortèges d’en-
terrements sont fort curieux à voir : la seule
condition de ce transport par eau suffirait
struction se rehausse de broderies et de
sculptures d’argent, d’une emphase méridio-
nale. Pour les funérailles des premières
classes, c’est tout un monument flottant qui
s’érige, avec des figures symboliques, la
Mort maniant sa faux, le Temps avec son
sablier, des guirlandes et des candélabres.
Je me rappelle un grand enterrement
déroulant son cortège sur la place S. Gio-
vanni e Paolo ; des confréries d’hommes,
revêtant la longue simarre antique, et por-
tant ces quadruples cierges soudés en fais-
ceau et brûlant de leurs quatre mèches, qui
figurent depuis des temps immémoriaux dans
les cérémonies religieuses de Venise. Re-
portez-vous à cette Procession sur la place
58