Chemin de
table (dentelle)
M"« B. et H. MORISSET
Aux yeux de l’avenir, nos Intimistes plai-
deront pour nos vertus trop cachées ;
et le critique qui les verra pensera beaucoup
de bien de cette époque surchauffée, éperdue
de vitesse... Mais, en ces petits cadres discrets,
que d'intérieurs vides ! L’intimité même nous
trahit, en décrivant la tristesse solitaire des
choses.
Ce qui fait l’originalité du trop modeste
et sincère artiste dont le nom s’encadre ici
dans le charme ingénieux de l’œuvre fami-
liale, c’est qu’il ne se borne jamais à fixer
sur la toile la poésie muette d’un mobilier
triste ou d’un fauteuil : ces intérieurs contem-
porains, il les anime, il incarne leurs chers
vieux souvenirs en de jeunes figures vivantes
qui les prolongent de leur sourire, il remplit
le simple décor d’un groupe d’acteurs gra-
cieux qui ne posent point ; Morisset est le
poète du home paisible. Autre caractère d’o-
riginalité : Morisset fut un intimiste avant
Y intimisme. Intimiste d’abord, et naturel-
lement, par vocation, par éducation : né
quelques mois avant la guerre qui fera
l’année terrible, ce Parisien ne connut jamais
d’autre atmosphère que la famille, auprès
d’un père peintre et de deux jeunes sœurs qui
devinrent aussi des artistes, de par le seul
instinct de leurs petits doigts de fées. Élève
de son père, il trouve chez lui l’intime et
naturelle fusion de l’art et de la vie, où les
veillées sous la lampe studieuse continuent
les exemples de l’atelier clair; il respire
cette atmosphère artiste et familiale : il en
a conservé le loyal parfum.
Comme les gens heureux — et jeunes,
Dessin
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