ÉTOFFES HISTORIÉES,
BYSANTINES ET AUTRES.
(PLANCHES ÏX-XVÏH ET XXXIt-XXXIV.)
Pour donner une idée bien exacte de ce que sont les tissus précieux représentés par nos
planches IX, X, XI, XII, XIII, XIY, XY, XYI, XYII, XYI1I et XXXII-XXXIY, il serait bon
d'avoir eu sous les yeux les originaux qui ont servi de modèles. Or, celui de nous qui les a des-
sinés dans divers trésors des églises d'Allemagne travaille encore actuellement à compléter
cette collection parmi les débris qu'ont pu sauver les sanctuaires de Castille, d'Aragon, d'An-
dalousie et autres royaumes de la péninsule espagnole. La Germanie nous avait offert des
produits incontestables de la fabrication bysantine; l'Espagne devait garder des restes de l'in-
dustrie arabe ; c'étaient deux éléments qu'il importait de réunir pour faire pénétrer une lumière
un peu vive dans un sujet où le moyen âge semblait ne nous avoir transmis que les expressions
singulièrement obscures d'une admiration malaisée à traduire en estimations passablement
précises. Nous trouvons bien en maint endroit la preuve de l'estime accordée jadis aux étoffes
fabriquées ou vendues par les Grecs et les Arabes établis autour de la Méditerranée ; déri-
vation assez évidente de l'industrie phénicienne, lydienne, persane, indienne * même si l'on
des métiers de Saïd (Sidon, seta) et de ia Phénicie, non
moins céièbre pour ses riches étoffes que pour sa teinture ?
Les Arabes, si grands amateurs de vêtements de soie, que l'Ai-
coran promet ie bonheur d'en porter à ceux qui trouveront
piace dans son paradis, furent iongtemps ies principaux four-
nisseurs du iuxe européen. Aussi ies inventaires des égii-
ses et des cours mentionnent-iis fréquemment ies drap.s
d'Afe.æaad?de (veia Ade^aadrirc, ou paam ate.vaadriat) et
ies seWca a/Wcaaa. On a prétendu, d'après queiques textes
qui ne sont pas sans appei, que ie roi Roger avait introduit en
Siciie ia fabrication des tissus de soie ; et pendant que ies
uns y voyaient une concurrence établie contre ies manufactures
bysantines ou asiatiques, tel autre a vouiu a p/iori que ia
broderie ou ie tissage'qui occupaient nombre de femmes
fussent surtout un beau semblant, pour faire passer un harem
du prince chrétien ( O phiiosophic de i'histoirc !). Si i'Espagne
peut s'attribuer ia propriété dupaaaas de spamsco, ii resterait
à prouver que ce ne fût pas une tapisserie de laine. Le fait est
que, dans un dialogue entre le iin et la brebis (Ap. Ed. DuMéri),
* Je n'ai à parier que des temps chrétiens, et même des
siècles postérieurs à l'établissement des barbares. Tout com-
mentaire sur Piine ou autre témoin du iuxe de i'antiquité est
donc en dehors de ces recherches, qui eiies-mêmes,d'ailieurs,
ne prétendent nuHement épuiser ia question.
Piusieurs noms attestent assez ciairement i'origine asiatique
de diverses étoffes pius ou moins riches. Le da??7as, comme
ia /eraatiue, est bien peu de chose au prix des brocarts d'or
et d'argent dont ia fabrication est si ancienne dans ia région
du Liban; mais c'est une indication géographique assez ciaire,
où il ne faut point tendre bien fort les engins étymologiques
comme on trouvera peut-être que je ie fais ailicurs. Le seada/
(ce??de, etc.), qui pourrait bien être le taffetas, n'aurait-ii pas
été primitivement livré au commerce des caravanes ou des
(lottes par lespeupics de l'Inde supérieure (.Siadù)? L'aarqp/a'?/-
yiau?, dont nous avons fait le mot or/*roi, rappelle, de même
que ies vestes atta/ica.*, ces splendidesdrapsd'or dont le secret
sembie avoir appartenu longtemps à l'Asic-Mineure. Serait-ce
trop alambiquer que de voir dans ie nom du satin une trace
BYSANTINES ET AUTRES.
(PLANCHES ÏX-XVÏH ET XXXIt-XXXIV.)
Pour donner une idée bien exacte de ce que sont les tissus précieux représentés par nos
planches IX, X, XI, XII, XIII, XIY, XY, XYI, XYII, XYI1I et XXXII-XXXIY, il serait bon
d'avoir eu sous les yeux les originaux qui ont servi de modèles. Or, celui de nous qui les a des-
sinés dans divers trésors des églises d'Allemagne travaille encore actuellement à compléter
cette collection parmi les débris qu'ont pu sauver les sanctuaires de Castille, d'Aragon, d'An-
dalousie et autres royaumes de la péninsule espagnole. La Germanie nous avait offert des
produits incontestables de la fabrication bysantine; l'Espagne devait garder des restes de l'in-
dustrie arabe ; c'étaient deux éléments qu'il importait de réunir pour faire pénétrer une lumière
un peu vive dans un sujet où le moyen âge semblait ne nous avoir transmis que les expressions
singulièrement obscures d'une admiration malaisée à traduire en estimations passablement
précises. Nous trouvons bien en maint endroit la preuve de l'estime accordée jadis aux étoffes
fabriquées ou vendues par les Grecs et les Arabes établis autour de la Méditerranée ; déri-
vation assez évidente de l'industrie phénicienne, lydienne, persane, indienne * même si l'on
des métiers de Saïd (Sidon, seta) et de ia Phénicie, non
moins céièbre pour ses riches étoffes que pour sa teinture ?
Les Arabes, si grands amateurs de vêtements de soie, que l'Ai-
coran promet ie bonheur d'en porter à ceux qui trouveront
piace dans son paradis, furent iongtemps ies principaux four-
nisseurs du iuxe européen. Aussi ies inventaires des égii-
ses et des cours mentionnent-iis fréquemment ies drap.s
d'Afe.æaad?de (veia Ade^aadrirc, ou paam ate.vaadriat) et
ies seWca a/Wcaaa. On a prétendu, d'après queiques textes
qui ne sont pas sans appei, que ie roi Roger avait introduit en
Siciie ia fabrication des tissus de soie ; et pendant que ies
uns y voyaient une concurrence établie contre ies manufactures
bysantines ou asiatiques, tel autre a vouiu a p/iori que ia
broderie ou ie tissage'qui occupaient nombre de femmes
fussent surtout un beau semblant, pour faire passer un harem
du prince chrétien ( O phiiosophic de i'histoirc !). Si i'Espagne
peut s'attribuer ia propriété dupaaaas de spamsco, ii resterait
à prouver que ce ne fût pas une tapisserie de laine. Le fait est
que, dans un dialogue entre le iin et la brebis (Ap. Ed. DuMéri),
* Je n'ai à parier que des temps chrétiens, et même des
siècles postérieurs à l'établissement des barbares. Tout com-
mentaire sur Piine ou autre témoin du iuxe de i'antiquité est
donc en dehors de ces recherches, qui eiies-mêmes,d'ailieurs,
ne prétendent nuHement épuiser ia question.
Piusieurs noms attestent assez ciairement i'origine asiatique
de diverses étoffes pius ou moins riches. Le da??7as, comme
ia /eraatiue, est bien peu de chose au prix des brocarts d'or
et d'argent dont ia fabrication est si ancienne dans ia région
du Liban; mais c'est une indication géographique assez ciaire,
où il ne faut point tendre bien fort les engins étymologiques
comme on trouvera peut-être que je ie fais ailicurs. Le seada/
(ce??de, etc.), qui pourrait bien être le taffetas, n'aurait-ii pas
été primitivement livré au commerce des caravanes ou des
(lottes par lespeupics de l'Inde supérieure (.Siadù)? L'aarqp/a'?/-
yiau?, dont nous avons fait le mot or/*roi, rappelle, de même
que ies vestes atta/ica.*, ces splendidesdrapsd'or dont le secret
sembie avoir appartenu longtemps à l'Asic-Mineure. Serait-ce
trop alambiquer que de voir dans ie nom du satin une trace