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AVANT-PROPOS.

et pourtant rien n’était moins coquet que l’auteur, dont je pourrais conter en ce genre des
négligences divertissantes.
Je dois, à ce sujet, faire mention d’un artiste trop peu connu, qui fut comme son maître
de gravure. M. Lapret, un de ces hommes dont le moyen âge aurait fait à la fois unminia-
teur, un orfèvre, un architecte, un émailleur (et que sais-je encore?), selon l’opportunité,
s’offrit lui-même à cette tâche. Il avait vu quelques dessins de mon collaborateur parmi mes
papiers, vers la fin de 1840. et dit tout d’abord: «Cet homme devrait graver; on ne le
» copiera pas sans le traduire, et le public n’aura plus un véritable trait original. » Moi, qui
connaissais le récipiendaire (âgé d’ailleurs d’environ trente-neuf ans), j’objectai bien des
choses. On me répondit qu’avec pareille main une heure suffirait pour apprendre la partie
technique, et qu’un peu d’usage ferait le reste. J’eus besoin de plusieurs mois et d’une cer-
taine ruse pour faire comprendre au P. Arthur que c’était occasion à ne pas négliger. Je
commençais à désespérer de mon éloquence et de ma diplomatie (en quoi je ne prétends
pas être bien fort), lorsqu’un jour il arriva brusquement dans ma chambre avec son cha-
peau, demandant l’adresse de celui qui tenait la gravure pour affaire si simple. Deux heures
plus tard il rentrait, me disant qu’en effet ce n’était pas la mer à boire. Mais il lui fallut
encore plus de six semaines pour qu’il s’en occupât, quoique M. Lapret (qui connaissait les
artistes) lui eût fait cadeau d’une ou deux pointes pour qu’il se mît à l’œuvre sans délais.
Enfin, durant une soirée de la vigile de Noël, ayant fini son bréviaire et cherchant à quoi
il occuperait le reste de son loisir avant l’heure de minuit, il trouva dans un de ses
tiroirs deux petites plaques de cuivre qui lui donnèrent l’idée de faire décidément une
expérience. Après les avoir passées à la fumée, il prit sa pointe et composa immédia-
tement sur le cuivre deux chiffres des noms de Jésus et de Marie plus ou moins entourés
d’ornements. Mais, ne s’étant pas approvisionné d’eau-forte, et se souciant peu de
manipulations, il remit plus tard ses deux planches à un jeune chimiste qui n’était point
artiste du tout, et qui les lui brûla, comme on dit. Cet écueil dès le port n’était pas
fait pour encourager notre apprenti, déjà peu amateur d’une telle corvée; aussi près
d’un an se passa encore avant qu’il remît la main à cette œuvre malencontreuse. Plus tard
il se chargea lui-même de toute la besogne ; et si sa soutane en pâtit çà et là, le cuivre
s’en trouva mieux. Mais il préféra surtout l’acier, qui ne demande pas qu’on surveille
beaucoup la morsure.
La première fois qu’il attaqua ce métal, il se trouva encouragé fort heureusement par
l’avis d’un habile dessinateur lyonnais, qui lui avait servi comme de contre-maître pour
la publication des Vitraux de Bourges. Le P. A. Martin ne se fiait pas encore aux résultats de
ses tentatives, et venait de faire tirer une épreuve de sa planche, qui porte le n° XI dans le
premier volume de nos Mélanges (Ire série). « Que pensez-vous de ceci, dit-il à son visiteur, et
» quel prix fallait-il en payer? — Mais, repartit l’autre, je ne sais trop qui vous aura fait ce
 
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