SOIXANTE-DEUXIÈME ANNÉE I»rix du Numéro : 25 centimes MERCREDI 25 JANVIER 1893
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PARIS
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DE I.A RÉDACTION ET DE I.’ADMINISTRATION
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Six mois..
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LE CHARIVARI
Les souscripteurs dont l’abonnement ex-
pire le 31 Janvier sont priés de le renou-
veler immédiatement s’ils ne veulent pas
éprouver d’interruption dans l’envoi du
journal. Nous rappelons que les mandats
télégraphiques ne sont pas reçus.
BULLETIN POLITIQUE
Comme les prévisions sont souvent déjouées !
Lorsque M. Dupuy fut nommé ministre de
l’instruction publique avec annexe dos cultes, il
y eut une minute d’inquiétude parmi ses amis.
— C’est un homme de valeur, disaient-ils, mais
un peu bien intransigeant sur tout ce qui con-
cerne le cléricalisme. Nous avons grand’peur
qu’il ne casse une série de vitres.
Et voilà que M. Dupuy, au lieu de rien casser,
fait besogne de vitrier.
Il remet des carreaux avec une sollicitude tou-
chante, afin que le clergé ne s’enrhume pas.
Jamais on n’avait vu un libre-penseur aussi zélé
pour les intérêts catholiques.
C’est presque une conversion.
M. Dupuy est capable de gravir, un de ces
jours, la butte Montmartre pour consacrer son
portefeuille au Sacré-Cœur.
Ainsi le,passé ne garantit jamais l’avenir, avec
l’espèce humaine, féconde en revirements.
Notre époque, sous ce rapport, nous comble de
singularités. Après nous avoir montré un pape
criant Vive la République, elle nous fait voir un
incroyant bénissant les évêques.
Les deux font agréablement la paire.
Il est toujours question d’un projet do loi baro-
que qui déclarerait inéligibles tous les membres
de la Chambre actuelle.
Ceux qui s’en préoccupent ont vraiment do la
candeur à revendre.
Qui votera cette loi? Ceux mêmes qu’elle doit
frapper 1
As-tu fini?....
Henri Monnier comptait, au nombre de ses
prodigieuses saynètes, une exquise fantaisie in-
titulée le Guillotiné par persuasion.
C’était de la drôlerie à la centième puissance.
Mais il n’y a pas, dans la réalité, de suicidés
par persuasion.
Jamais vous ne trouverez, dans les temps où
nous vivons, une majorité qui se ferme la porte
au nez, ou, si vous préférez une autre métaphore,
qui s’enterre toute vive.
Je crois qu’il fut imprudent aux royalistes d’ac-
cumuler les documentations rétrospectives au-
tour de l’anniversaire du 21 janvier.
C’était un mauvais tour—je le comprends bien \
4-
— qu’on voulait jouer à ^République. D’ailleurs,
partisan absolu de l’abolition de la pei ne de mort,
nous n’entendons pas qu’on la supprime pour
tous et qu’elle subsiste pour les rois.
Mais les zélés du monarchisme ont trop oublié
que le représentant actuel de leur monarchie est
le direct descendant de ce Philippe-Egalité qui
vota la décapitation de Louis XVI.
Evoquer ce souvenir terrible, n’est-ce pas
montrer que toute alliance est une monstruosité
outre ceux qui croient au droit divin et ceux qui
emboîtent le pas derrière l’orléanisme?
D’autant plus que ce premier coup porté aux
Bourbons n’amena pas la branche cadette à des
sentiments plus doux.
Bien que la Restauration eût passé l’éponge sur
ce sang et logé au Palais-Boyal le fils du bour-
reau de Louis le Seizième, m peu plus tard ce
fils fomenta la Révolution d,j Juillet et flanqua à
la porte ceux dont il avait accepté l’humiliant
pardon et les écrasants bienfaits.
Eh bien, vrai ! ce n’est pas malin de rappeler
tout ça, sous prétexte de faciliter la coalition ac-
tuelle.
Car ces réminiscences fâcheuses ne sont bon-
nes qu’à dégoûter de ladite coalition ceux qui
font passer les principes avant les expédients.
Si l’argent est le nerf do la guerre, cotte pauvre
Italie n’est pas on posture de guerroyer brillam-
ment.
Quelle dèche, mes enfants!
Les banques locales font entendre des craque-
ments qui présagent une terrible débâcle. On dé-
couvre un pot aux roses dans chaque coin et des
pots-de-vin dans une foule de poches.
Cela a coupé court, et tout net, aux folâtres
ironies que certains journaux d’outre-monts dé-
cochaient récemment à la France.
Il y a là-bas des poutres qui, en vérité, font
paraître nos pailles presque microscopiques.
On se livre, depuis quelques jours, à des ho-
sannah, parce que le prince Milan, après un fort
attrapage, se serait réconcilié avec sa femme.
Je suis charmé, au point de vue privé, de ce
raccommodement. Mais, au point de vue poli-
tique, il paraît dépourvu de portée.
Les divisions persisteront en Serbie, et ce bai-
ser Lamourette n’y peut rien changer.
Pierre Véron.
LE QUATRAIN D’HIER
Le khédive, agacé, ne la trouve pas drôle.
A la vieille Albion qui veut le bafouer
Ce prince dit : « J'admets qu'on me souffle mon rôle;
Mais me souffler n’est point, par Allah ! me jouer. »
SIFFLET.
HISTOIRE DE BRIGAND
La Tribuna annonce que le baron (!...
ancien député, a été arrêté à Païenne. Il est
accusé d’être le receleur des brigands de
Santo et Mauro. — Cette nouvelle a produit
une profonde impression dans le monde
aristocratique, où le baron G... était très
répandu.
La salle des ancêtres au château du baron. Il
lait nuit. Le baron est derrière une table. Devant
lui, sur des bancs, une quinzaine d hommes dont
la tenue laisse à désirer ef dont les mines sont, en
général, patibulaires. — Les fenêtres ouvertes
laissent voir le ciel étoilé. Le parfum des roses
arrive jusque dans la salle.
Le baron. — Illustrissimi signori, l’exercice
1892 se solde par des bénéfices importants. A
l’actif, je trouve un bon nombre d’opérations fai-
tes sur des diligences, sur quelques villas, enfin
sur la propriété tant immobilière que mobi-
lière.
Les frais généraux, dans une entreprise comme
la nôtre, n’existent pas. Nous ne sommes pas dé-
vorés par une armée deparasites, d’employés de
tout grade et de tout rang. D’écritures, il n’y en
a pas; tout, entre nous, repose sur la base d’une
confiance réciproque. Vous m’apportez de l’ar-
gent : je le place, je le fais valoir; l’année écou-
lée, je mets à votre disposition les revenus à trois
pour cent.
{Une pause.)
Quelques voix. — Très bien 1 Très bien !
Le baron.— On trouve peut-être que ce revenu
do trois pour cent est bien minime. Les valeurs de
père de famille, les valeurs sérieuses no rappor-
tent pas davantage. Sans doute, si je voulais spé-
culer avec vos fonds, il me serait aisé de vous
donner des dividendes plus imposants. Mais le
dépôt que j’ai entre les mains, que je tiens de
votre confiance, est un dépôt sacré. Je ne me crois
pas le droit do l’aventurer sur des valeurs équi-
voques. (Bienl Très bien 1 C’est cela!)
C’est en procédant toujours de cette façon que
nous arriverons à des résultats satisfaisants pour
tous.
Ainsi, je dois annoncer à l’assemblée que notre
caisse do retraites pour la vieillesse fonctionnera
celte année même.
Le dur métier que vous faites vous expose à
des abus de tout genre. Il faut que ceux qui par-
viennent à la quarantaine puissent se retirer
avec un petit avoir, se donner les satisfactions
de l’âge mûr et s’assurer une vieillesse confor-
table. (Bravo 1 Très bien! Evviva il baronet)
Voilà donc accomplie une des réformes qui
étaient attendues avec le plus d’impatience.
Quant aux parts de fondateur, elles se sont ac-
i crues, cette année, dans une certaine proportion.
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journal. Nous rappelons que les mandats
télégraphiques ne sont pas reçus.
BULLETIN POLITIQUE
Comme les prévisions sont souvent déjouées !
Lorsque M. Dupuy fut nommé ministre de
l’instruction publique avec annexe dos cultes, il
y eut une minute d’inquiétude parmi ses amis.
— C’est un homme de valeur, disaient-ils, mais
un peu bien intransigeant sur tout ce qui con-
cerne le cléricalisme. Nous avons grand’peur
qu’il ne casse une série de vitres.
Et voilà que M. Dupuy, au lieu de rien casser,
fait besogne de vitrier.
Il remet des carreaux avec une sollicitude tou-
chante, afin que le clergé ne s’enrhume pas.
Jamais on n’avait vu un libre-penseur aussi zélé
pour les intérêts catholiques.
C’est presque une conversion.
M. Dupuy est capable de gravir, un de ces
jours, la butte Montmartre pour consacrer son
portefeuille au Sacré-Cœur.
Ainsi le,passé ne garantit jamais l’avenir, avec
l’espèce humaine, féconde en revirements.
Notre époque, sous ce rapport, nous comble de
singularités. Après nous avoir montré un pape
criant Vive la République, elle nous fait voir un
incroyant bénissant les évêques.
Les deux font agréablement la paire.
Il est toujours question d’un projet do loi baro-
que qui déclarerait inéligibles tous les membres
de la Chambre actuelle.
Ceux qui s’en préoccupent ont vraiment do la
candeur à revendre.
Qui votera cette loi? Ceux mêmes qu’elle doit
frapper 1
As-tu fini?....
Henri Monnier comptait, au nombre de ses
prodigieuses saynètes, une exquise fantaisie in-
titulée le Guillotiné par persuasion.
C’était de la drôlerie à la centième puissance.
Mais il n’y a pas, dans la réalité, de suicidés
par persuasion.
Jamais vous ne trouverez, dans les temps où
nous vivons, une majorité qui se ferme la porte
au nez, ou, si vous préférez une autre métaphore,
qui s’enterre toute vive.
Je crois qu’il fut imprudent aux royalistes d’ac-
cumuler les documentations rétrospectives au-
tour de l’anniversaire du 21 janvier.
C’était un mauvais tour—je le comprends bien \
4-
— qu’on voulait jouer à ^République. D’ailleurs,
partisan absolu de l’abolition de la pei ne de mort,
nous n’entendons pas qu’on la supprime pour
tous et qu’elle subsiste pour les rois.
Mais les zélés du monarchisme ont trop oublié
que le représentant actuel de leur monarchie est
le direct descendant de ce Philippe-Egalité qui
vota la décapitation de Louis XVI.
Evoquer ce souvenir terrible, n’est-ce pas
montrer que toute alliance est une monstruosité
outre ceux qui croient au droit divin et ceux qui
emboîtent le pas derrière l’orléanisme?
D’autant plus que ce premier coup porté aux
Bourbons n’amena pas la branche cadette à des
sentiments plus doux.
Bien que la Restauration eût passé l’éponge sur
ce sang et logé au Palais-Boyal le fils du bour-
reau de Louis le Seizième, m peu plus tard ce
fils fomenta la Révolution d,j Juillet et flanqua à
la porte ceux dont il avait accepté l’humiliant
pardon et les écrasants bienfaits.
Eh bien, vrai ! ce n’est pas malin de rappeler
tout ça, sous prétexte de faciliter la coalition ac-
tuelle.
Car ces réminiscences fâcheuses ne sont bon-
nes qu’à dégoûter de ladite coalition ceux qui
font passer les principes avant les expédients.
Si l’argent est le nerf do la guerre, cotte pauvre
Italie n’est pas on posture de guerroyer brillam-
ment.
Quelle dèche, mes enfants!
Les banques locales font entendre des craque-
ments qui présagent une terrible débâcle. On dé-
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Cela a coupé court, et tout net, aux folâtres
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Il y a là-bas des poutres qui, en vérité, font
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On se livre, depuis quelques jours, à des ho-
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Je suis charmé, au point de vue privé, de ce
raccommodement. Mais, au point de vue poli-
tique, il paraît dépourvu de portée.
Les divisions persisteront en Serbie, et ce bai-
ser Lamourette n’y peut rien changer.
Pierre Véron.
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Le khédive, agacé, ne la trouve pas drôle.
A la vieille Albion qui veut le bafouer
Ce prince dit : « J'admets qu'on me souffle mon rôle;
Mais me souffler n’est point, par Allah ! me jouer. »
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HISTOIRE DE BRIGAND
La Tribuna annonce que le baron (!...
ancien député, a été arrêté à Païenne. Il est
accusé d’être le receleur des brigands de
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aristocratique, où le baron G... était très
répandu.
La salle des ancêtres au château du baron. Il
lait nuit. Le baron est derrière une table. Devant
lui, sur des bancs, une quinzaine d hommes dont
la tenue laisse à désirer ef dont les mines sont, en
général, patibulaires. — Les fenêtres ouvertes
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Le baron. — Illustrissimi signori, l’exercice
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l’actif, je trouve un bon nombre d’opérations fai-
tes sur des diligences, sur quelques villas, enfin
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Les frais généraux, dans une entreprise comme
la nôtre, n’existent pas. Nous ne sommes pas dé-
vorés par une armée deparasites, d’employés de
tout grade et de tout rang. D’écritures, il n’y en
a pas; tout, entre nous, repose sur la base d’une
confiance réciproque. Vous m’apportez de l’ar-
gent : je le place, je le fais valoir; l’année écou-
lée, je mets à votre disposition les revenus à trois
pour cent.
{Une pause.)
Quelques voix. — Très bien 1 Très bien !
Le baron.— On trouve peut-être que ce revenu
do trois pour cent est bien minime. Les valeurs de
père de famille, les valeurs sérieuses no rappor-
tent pas davantage. Sans doute, si je voulais spé-
culer avec vos fonds, il me serait aisé de vous
donner des dividendes plus imposants. Mais le
dépôt que j’ai entre les mains, que je tiens de
votre confiance, est un dépôt sacré. Je ne me crois
pas le droit do l’aventurer sur des valeurs équi-
voques. (Bienl Très bien 1 C’est cela!)
C’est en procédant toujours de cette façon que
nous arriverons à des résultats satisfaisants pour
tous.
Ainsi, je dois annoncer à l’assemblée que notre
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celte année même.
Le dur métier que vous faites vous expose à
des abus de tout genre. Il faut que ceux qui par-
viennent à la quarantaine puissent se retirer
avec un petit avoir, se donner les satisfactions
de l’âge mûr et s’assurer une vieillesse confor-
table. (Bravo 1 Très bien! Evviva il baronet)
Voilà donc accomplie une des réformes qui
étaient attendues avec le plus d’impatience.
Quant aux parts de fondateur, elles se sont ac-
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