SOIXANTE-DEUXIÈME ANNEE
Prix da ioméro : SS centime*
MERCREDI 1er NOVEMBRE 1893
abonnements
P AUI S
Trois mois. 18 fr-
Six mois. 36 —
Un an.... 72 —
(les mandats télégraphiques ne sont pas reçus)
Les abonnements 'parlent des w et 16 de chaque mdis
DIRECTION
l’olitique, Littéraire et Artistique
1MIS II RIS VÉRON
Ëéslactcui- en Chef
BUREAUX
DB LA REDACTION ET DB L'ADMINIS 1RATÏON
Rue de la Victoire 20
1
h^PhPI
jplp
ABONNEMENTS
DÈPAR ITiMBNTS
Trois mois..... 20 fr.
Six mois. 40 —
Un an. 80 —
(LES MANDATS TÉLÉGRAPHIQUES NE SONT PAS REÇiis)
L'abonnement d’un an donne droit à la prime grat uite
direction
Politique: Littéraire et Artistique
l’US 11 RIS VÉRON
KèiiuHcur en Chef
A Ni NONCES
SQÜLPHE EwIG, i'hrmirr mi i.a püBLiOirt
82, Rue Richelieu
LE CHARIVARI
---
Les ateliers étant fermés aujourd'hui Px no-
’ vembre, jour de la Toussaint, le Charivari ne
paraîtra pas demain jeudi.
raison funèbre en qualité de chef d’un cabine;
mortuaire.
Les trois concurrents parlent et contreparlent
avec un acharnement enragé en s’accusant
mutuellement d’être les auteurs de la crise que
traversent nos voisins d’outre-monts.
Mon Dieu, on peut les mettre d’accord en di-
sant que chacun d’eux a sa part de responsabili-
sé dans les bévues commises et le déficit accru.
LES MÉMOIRES DE PARIS
LXXXVII
BULLETIN POLITIQUE
C’est tout de même drôle, les polémiques qui se
sont engagées autour de cette question :
_Peut-on continuer à être président d’une
Chambre qui n’existe plus?
Scarron a parlé d’une ombre de valet qui
Avec l’ombre d’une brosse
Frotlait l’ombre d’un carrosse.
Agréable pendant que cette ombre présiden-
tielle d’une ombre de Parlement.
Le plus comique, c’est que d’aucuns ont prêté
au gouvernement l’intention de proposer une loi
pour régulariser ces chinoiseries.
Le brave Gorenflot, dans la Dame de Montso-
reau, reprise à la Porte-Saint-Martin, baptise un
dindon, avec l’intention de le métamorphoser en
carpe.
L’opération n’est pas plus cocasse que ne le se-
rait celle qui consisterait à dire î
— Désormais, un président défunt continuera
à être vivant.
Et voyez où cela pourrait entraîner!
Supposez une pareille loi votée et le président
posthume n’ayant pas été réélu. Voilà ce mon-
sieur à qui le suffrage universel aurait donné son
compte et qui prétendrait continuer à être la plus
haute émanation de ce suffrage-là !
Une telle thèse ne se soutient pas.
Le seul moyen de remédier aux inévitables in-
convénients de l’interrègne législatif, c’est de ne
pas le prolonger.
Que vouliez-vous qu’il fit cofitre trois ?
Mettez elle au lieu A'il, et le vers s’applique,
hélas 1 à cette pauvre Italie.
Elle a trois politiciens qui se disputent le droit
de mener le deuil de son crédit.
Primo : M. Giolitti, président du conseil
actuel.
Secundo : M. di Rudini, président antérieur.
Tertio : Il signor Crispi, qui voudrait absolu-
ment aller jusqu’au cimetière et y prononcer l’o-
A propos de déficit, il court des bruits fâcheux
sur les finances de la Ville de Paris.
On parle d’un excédent en dépenses s’élevant
à 7 millions.
Le prochain budget ne pourrait être équilibré
que par une disponibilité do 6,850,000 francs, et,
pour l’obtenir, on difféiVA^it • de trente-quatre
années l’amortissement de l’emprunt de 1869.
Seule façon de sortir momentanément d’embar-
ras, si l’on ne veut pas augmenter les contribu-
tions parisiennes de douze centimes addition-
nels.
Et pourtant, combien, parmi les membres du
Conseil municipal, ônt déblatéré jadis contre les
gaspillages 1
Quand ce sont eux qui délient les cordons de
la bourse, les gaspillages déviènnent d’iüdispën-
sables dépenses.
Une idée!
Si, pour aider à combler le vide, nos conseillers
abandonnaient leur traitement de six mille francs?
Abnégation touchante qui causerait ùne salu-
taire émotion.
Mais j’ai dans l’idée que ce remède au mal ne
sera même pas proposé par les docteurs de l’Hôtel
de Ville.
Comme M. Carnot dans son discours, le tsar,
en son télégramme de remerciements, a parlé
d’affirmer la paix générale.
Personne, en Europe, ne saurait donc donner
une autre signification aux touchantes manifes-
tations qui ont pris fin.
La Russie déclare qu’elle veut la paix. La
France l’avait dit avant elle par la voix de son
premier citoyen.
Ces fêtes, que certains journaux étrangers
avaient â l’avance représentées comme un péril
européen, sont donc faites pour rassurer.
C’est un dernier mot sur lequel il n’y a plus â
revenir.
Aujourd’hui mercredi, fête de la Toussaint et
commencement des visites aux trépassés.
A la place de M. d’Haussonville, j’aurais choisi
cette date pour déposer une couronne oratoire
sur la tombe de la monarchie.
Mais on ne pense pas à tout!
La bacillomanie continue à faire des siennes.
On n’osera bientôt plus toucher un billet de
banque, la monnaie de papier ayant été procla-
mée microbienne. Pauvre Italie! Quel coup pour
toi!
Bientôt, aussi, toutes les opérations de la vie
i courante seront panachées de désinfections mul-
I tiples.
Ne raconfe-t-on pas déjà qu’un coiffeur du
quartier Latin, pour plaire à sa clientèle médi-
cale, fait macéer ses ciseaux, rasoirs et peignés
dans un bain de sublimé corrosif?
J’entrevois d’ici l’ère adorable où l’antisëptiè
fonctionnera dans tous les restaurants.
Avec le potage, on vous apportera ùn bàin dè
sublimé où vous plongerez votre couteau, votre
cuillère et votre fourchette.
Bientôt, même, cette habitude d’hygiène for-
cée pénétrera dans les dîners privés.
Devant chaque couvert sera placé un récipient
entouré de fleurs, afin d’ornementer la chose. Eh
ce récipient, invités et invitées procéderont
comme il est ci-dessus indiqué. Gela sera char-
mant et fournira matière â de délicieuses con-
versations, à d’exquis flirtagës, n’est-cè pas?
«\L-»
Et pourquoi s’en tiendrait-on aux repas?
Le microbe jieut tout aussi bien se glisser dans
les soirées.
L’heure sonnera où, lorsque vous inviterez une
danseuse à valser ou mazurker, elle vous répon-
dra avec un angélique sourire :
— Volontiers, monsieur; mais à condition que
vous irez d’abord vous désinfecter ies mains à la
petite fontaine que vous voyez là-bas.
Aux tables de jeu, même cérémonie. On sou-
mettra, avant d’entamer un whist, les cartes à
une fumigation antiseptique.
je ne répondrais pas que Painour lui-même,
plus fort que la mort, prétendait-on jadis, ne sera
pas accessible à la paniqué bacillaire.
O Roméo ! ô Juliette ! ô Daphnis ! S Ghloé !
qu’elle sera poétique, la tendresse panachée de
dialogues amoureux sur ce modèle :
— Adèle, je t’aime !
— Moi aussi, Julien.
— Adèle, sois â moi !
— Je veux bien, mon adoré. Mais, avant
d’échanger les baisers de la fin, fais-moi le plai-
sir d’aller, dans le cabinet de toilette, te rincer la
bouche avec delà liqueur de Van Swieten coupée
d’çau 1
Pierre Véron.
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LE CHARIVARI
---
Les ateliers étant fermés aujourd'hui Px no-
’ vembre, jour de la Toussaint, le Charivari ne
paraîtra pas demain jeudi.
raison funèbre en qualité de chef d’un cabine;
mortuaire.
Les trois concurrents parlent et contreparlent
avec un acharnement enragé en s’accusant
mutuellement d’être les auteurs de la crise que
traversent nos voisins d’outre-monts.
Mon Dieu, on peut les mettre d’accord en di-
sant que chacun d’eux a sa part de responsabili-
sé dans les bévues commises et le déficit accru.
LES MÉMOIRES DE PARIS
LXXXVII
BULLETIN POLITIQUE
C’est tout de même drôle, les polémiques qui se
sont engagées autour de cette question :
_Peut-on continuer à être président d’une
Chambre qui n’existe plus?
Scarron a parlé d’une ombre de valet qui
Avec l’ombre d’une brosse
Frotlait l’ombre d’un carrosse.
Agréable pendant que cette ombre présiden-
tielle d’une ombre de Parlement.
Le plus comique, c’est que d’aucuns ont prêté
au gouvernement l’intention de proposer une loi
pour régulariser ces chinoiseries.
Le brave Gorenflot, dans la Dame de Montso-
reau, reprise à la Porte-Saint-Martin, baptise un
dindon, avec l’intention de le métamorphoser en
carpe.
L’opération n’est pas plus cocasse que ne le se-
rait celle qui consisterait à dire î
— Désormais, un président défunt continuera
à être vivant.
Et voyez où cela pourrait entraîner!
Supposez une pareille loi votée et le président
posthume n’ayant pas été réélu. Voilà ce mon-
sieur à qui le suffrage universel aurait donné son
compte et qui prétendrait continuer à être la plus
haute émanation de ce suffrage-là !
Une telle thèse ne se soutient pas.
Le seul moyen de remédier aux inévitables in-
convénients de l’interrègne législatif, c’est de ne
pas le prolonger.
Que vouliez-vous qu’il fit cofitre trois ?
Mettez elle au lieu A'il, et le vers s’applique,
hélas 1 à cette pauvre Italie.
Elle a trois politiciens qui se disputent le droit
de mener le deuil de son crédit.
Primo : M. Giolitti, président du conseil
actuel.
Secundo : M. di Rudini, président antérieur.
Tertio : Il signor Crispi, qui voudrait absolu-
ment aller jusqu’au cimetière et y prononcer l’o-
A propos de déficit, il court des bruits fâcheux
sur les finances de la Ville de Paris.
On parle d’un excédent en dépenses s’élevant
à 7 millions.
Le prochain budget ne pourrait être équilibré
que par une disponibilité do 6,850,000 francs, et,
pour l’obtenir, on difféiVA^it • de trente-quatre
années l’amortissement de l’emprunt de 1869.
Seule façon de sortir momentanément d’embar-
ras, si l’on ne veut pas augmenter les contribu-
tions parisiennes de douze centimes addition-
nels.
Et pourtant, combien, parmi les membres du
Conseil municipal, ônt déblatéré jadis contre les
gaspillages 1
Quand ce sont eux qui délient les cordons de
la bourse, les gaspillages déviènnent d’iüdispën-
sables dépenses.
Une idée!
Si, pour aider à combler le vide, nos conseillers
abandonnaient leur traitement de six mille francs?
Abnégation touchante qui causerait ùne salu-
taire émotion.
Mais j’ai dans l’idée que ce remède au mal ne
sera même pas proposé par les docteurs de l’Hôtel
de Ville.
Comme M. Carnot dans son discours, le tsar,
en son télégramme de remerciements, a parlé
d’affirmer la paix générale.
Personne, en Europe, ne saurait donc donner
une autre signification aux touchantes manifes-
tations qui ont pris fin.
La Russie déclare qu’elle veut la paix. La
France l’avait dit avant elle par la voix de son
premier citoyen.
Ces fêtes, que certains journaux étrangers
avaient â l’avance représentées comme un péril
européen, sont donc faites pour rassurer.
C’est un dernier mot sur lequel il n’y a plus â
revenir.
Aujourd’hui mercredi, fête de la Toussaint et
commencement des visites aux trépassés.
A la place de M. d’Haussonville, j’aurais choisi
cette date pour déposer une couronne oratoire
sur la tombe de la monarchie.
Mais on ne pense pas à tout!
La bacillomanie continue à faire des siennes.
On n’osera bientôt plus toucher un billet de
banque, la monnaie de papier ayant été procla-
mée microbienne. Pauvre Italie! Quel coup pour
toi!
Bientôt, aussi, toutes les opérations de la vie
i courante seront panachées de désinfections mul-
I tiples.
Ne raconfe-t-on pas déjà qu’un coiffeur du
quartier Latin, pour plaire à sa clientèle médi-
cale, fait macéer ses ciseaux, rasoirs et peignés
dans un bain de sublimé corrosif?
J’entrevois d’ici l’ère adorable où l’antisëptiè
fonctionnera dans tous les restaurants.
Avec le potage, on vous apportera ùn bàin dè
sublimé où vous plongerez votre couteau, votre
cuillère et votre fourchette.
Bientôt, même, cette habitude d’hygiène for-
cée pénétrera dans les dîners privés.
Devant chaque couvert sera placé un récipient
entouré de fleurs, afin d’ornementer la chose. Eh
ce récipient, invités et invitées procéderont
comme il est ci-dessus indiqué. Gela sera char-
mant et fournira matière â de délicieuses con-
versations, à d’exquis flirtagës, n’est-cè pas?
«\L-»
Et pourquoi s’en tiendrait-on aux repas?
Le microbe jieut tout aussi bien se glisser dans
les soirées.
L’heure sonnera où, lorsque vous inviterez une
danseuse à valser ou mazurker, elle vous répon-
dra avec un angélique sourire :
— Volontiers, monsieur; mais à condition que
vous irez d’abord vous désinfecter ies mains à la
petite fontaine que vous voyez là-bas.
Aux tables de jeu, même cérémonie. On sou-
mettra, avant d’entamer un whist, les cartes à
une fumigation antiseptique.
je ne répondrais pas que Painour lui-même,
plus fort que la mort, prétendait-on jadis, ne sera
pas accessible à la paniqué bacillaire.
O Roméo ! ô Juliette ! ô Daphnis ! S Ghloé !
qu’elle sera poétique, la tendresse panachée de
dialogues amoureux sur ce modèle :
— Adèle, je t’aime !
— Moi aussi, Julien.
— Adèle, sois â moi !
— Je veux bien, mon adoré. Mais, avant
d’échanger les baisers de la fin, fais-moi le plai-
sir d’aller, dans le cabinet de toilette, te rincer la
bouche avec delà liqueur de Van Swieten coupée
d’çau 1
Pierre Véron.