Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
270

CHAPITRE V

sans doute, par quelle cause secrète je me trouve enveloppé dans des mesures de sûreté
générale, dont ma conduite, depuis le 9 thermidor, aurait dû me garantir.
» Cependant il eût été facile de distinguer ma cause de celles des représentants du
peuple qui ont encouru la haine et l’indignation publiques.
» J’ai été, à la vérité, membre du Comité de sûreté générale ; mais tout le monde sait
que je n’y ai rempli aucune fonction; que je n’y allais que rarement: que vingt fois j’ai
offert ma démission: que je n’y ai jamais fait aucun rapport; que je n’ai accepté aucune
mission; qu’enfin j’y étais d’une nullité absolue et seulement placé pour faire nombre. On
sait aussi que j'étais en même temps membre du Comité d’instruction publique, et que les
fonctions de ce Comité, beaucoup plus analogues à mes connaissances et à mes goûts, absor-
baient tout mon temps, puisque j’étais tout à la fois chargé de la surveillance des travaux
du Jardin national et de l’organisation des fêtes décrétées à différentes époques par la
Convention. Il y a donc, en ma faveur, une sorte & alibi continuel sur les faits qui peuvent
être à la charge de l’ancien Comité de sûreté générale, et il serait d’autant plus injuste de
me comprendre dans la solidarité qu’on semble vouloir faire peser sur tous les membres,
qu’il est démontré que je n’ai pu y prendre aucune part, n’assistant presque jamais aux
délibérations.
» On m’a accusé d’avoir abusé de l’autorité pour me venger de mes ennemis ; je crois
que ceux qui m’accusent de ce fait auraient été très capables de faire ce qu’ils m’imputent,
s’ils avaient été à ma place. Mais je déclare que l’accusation est absolument calomnieuse,
et n’est d’ailleurs prouvée par aucune pièce, ni même appuyée sur aucune imputation
directe ou positive. Loin d’avoir abusé de l’autorité, je ne me suis jamais douté que j’aie eu
de l’autorité; et ce qui paraîtra bien étrange et peut-être même incroyable à ceux qui ne
m’ont jugé que sur la réputation que mes ennemis ont su me faire, c’est que je n’ai jamais
accusé ou dénoncé personne, et que je n’ai eu aucune part directe aux nombreuses arres-
tations qui ont eu lieu sous le régime révolutionnaire. C’est un fait certain et dont la preuve
résulte des imputations mêmes qui me sont faites par mes ennemis et dont j’offre ici la
réponse.
» Ainsi, avant le 9 thermidor, j’ai pu, sans être coupable, marcher dans la ligne révo-
lutionnaire tracée par l’opinion dominante à cette époque, et lorsque j’ai été appelé devant
les trois Comités réunis pour y rendre compte de ma conduite, j’ai démontré que l’erreur
dans laquelle j’avais été entretenu sur les vues secrètes de Robespierre et de ses complices,
était l’ouvrage de la Convention elle-même abusée par le faux éclat de leur patriotisme.
Aussi mon innocence fut reconnue et je recouvrai la liberté, qui ne m’avait été ravie
que par les effets de l’injuste prévention dont je viens d’assigner le principe.
» Depuis cette époque, qui a dessillé mes yeux, j’ai mis dans ma conduite une réserve
et une circonspection poussées jusqu’à la timidité. Instruit par une funeste expérience à me
défier des apparences du patriotisme, de la franchise et de la bonne foi, j’ai rompu toute
liaison avec les hommes que je fréquentais avant ma détention. Je me suis tenu renfermé
chez moi pour m’occuper du rétablissement de ma santé altérée par les cruels événements
dont je venais de subir l’épreuve, et pendant tout l’intervalle que j’y ai employé, je n’ai
 
Annotationen