OFFRES DU ROI DE PRUSSE
531
David, alléguant encore la santé de sa femme, la tranquillité et la considération dont
il jouissait à Bruxelles, déclina de nouveau les propositions qui lui étaient faites; mais le
prince de Hasfeld, ayant à cœur de satisfaire les désirs du Roi, envoya, comme négociateurs,
sa femme et ses filles. Ces dames se rencontrèrent à l’atelier avec la comtesse de L..., amie
particulière de Sa Majesté. Malgré d’aimables instances, la beauté n’eut pas plus de succès
que la diplomatie, et il ne resta à Mme l’ambassadrice qu’à prier la comtesse de L... de
rapporter au Roi le témoignage de leur bonne volonté et de l’impuissance de leurs efforts.
Enfin, quelques semaines après, le frère du Roi, voyageant sous le nom de prince de
Mansfeld, vint trouver David. Il le sollicita de partir, mettant sa voiture à sa disposition
pour se rendre à Berlin, lui demandant qu’aussitôt arrivé, il commençât son portrait,
comme celui qu’il exécutait en ce moment du général Gérard.
Malgré ces démarches si ssatteuses, David persista dans sa résolution et ne céda pas
aux prières du prince.
L’ambition seule aurait pu lui conseiller de quitter la Belgique, où il recevait de tous
côtés des marques d’estime et d’affection, et où la sympathie du Roi le couvrait contre les
vexations que les réfugiés éprouvaient de la surveillance inquiète de Wellington.
Étant allé au mois de juillet visiter Gand, la Société royale des Beaux-Arts et de
Littérature de cette ville, qui le comptait au nombre de ses membres, lui avait fait une
brillante réception. Elle lui avait donné une sérénade dont le dernier morceau, par une
attention délicate, était l’air :
« Où peut-on être mieux qu’au sein de sa famille ? »
Le lendemain, à un banquet qui avait suivi la distribution des prix, à laquelle il avait
assisté comme un des présidents, des toasts, accompagnés de couplets, avaient été portés en
son honneur. Enfin, après une visite dans l’atelier de De Cauwer, on l’avait prié, à la
Bibliothèque, d’écrire sur un registre son nom, « autour duquel, dit le journal, vingt
autres noms d’artistes ont formé une couronne : on eût dit le soleil entouré de ses rayons.»
Quelques jours après, la police ayant encore pris contre les bannis des mesures qui
auraient pu l’inquiéter, les artistes de Bruxelles, pour le rassurer, lui souhaitèrent chaleu-
reusement sa fête. A cette occasion, M. Wallez, de Gand, lui envoyait la pièce de vers
suivante, imprimée sur satin blanc.
A MONSIEUR DAVID
Quand, sur une terre chérie,
Au sein d’un glorieux repos,
Tu recevais de ta patrie
Le prix de tes brillants travaux ;
Quand, loin du bruit de la tempête,
Fiers de ton nom, de tes succès,
Tes enfants célébraient ta fête,
C’était la fête des Français.
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David, alléguant encore la santé de sa femme, la tranquillité et la considération dont
il jouissait à Bruxelles, déclina de nouveau les propositions qui lui étaient faites; mais le
prince de Hasfeld, ayant à cœur de satisfaire les désirs du Roi, envoya, comme négociateurs,
sa femme et ses filles. Ces dames se rencontrèrent à l’atelier avec la comtesse de L..., amie
particulière de Sa Majesté. Malgré d’aimables instances, la beauté n’eut pas plus de succès
que la diplomatie, et il ne resta à Mme l’ambassadrice qu’à prier la comtesse de L... de
rapporter au Roi le témoignage de leur bonne volonté et de l’impuissance de leurs efforts.
Enfin, quelques semaines après, le frère du Roi, voyageant sous le nom de prince de
Mansfeld, vint trouver David. Il le sollicita de partir, mettant sa voiture à sa disposition
pour se rendre à Berlin, lui demandant qu’aussitôt arrivé, il commençât son portrait,
comme celui qu’il exécutait en ce moment du général Gérard.
Malgré ces démarches si ssatteuses, David persista dans sa résolution et ne céda pas
aux prières du prince.
L’ambition seule aurait pu lui conseiller de quitter la Belgique, où il recevait de tous
côtés des marques d’estime et d’affection, et où la sympathie du Roi le couvrait contre les
vexations que les réfugiés éprouvaient de la surveillance inquiète de Wellington.
Étant allé au mois de juillet visiter Gand, la Société royale des Beaux-Arts et de
Littérature de cette ville, qui le comptait au nombre de ses membres, lui avait fait une
brillante réception. Elle lui avait donné une sérénade dont le dernier morceau, par une
attention délicate, était l’air :
« Où peut-on être mieux qu’au sein de sa famille ? »
Le lendemain, à un banquet qui avait suivi la distribution des prix, à laquelle il avait
assisté comme un des présidents, des toasts, accompagnés de couplets, avaient été portés en
son honneur. Enfin, après une visite dans l’atelier de De Cauwer, on l’avait prié, à la
Bibliothèque, d’écrire sur un registre son nom, « autour duquel, dit le journal, vingt
autres noms d’artistes ont formé une couronne : on eût dit le soleil entouré de ses rayons.»
Quelques jours après, la police ayant encore pris contre les bannis des mesures qui
auraient pu l’inquiéter, les artistes de Bruxelles, pour le rassurer, lui souhaitèrent chaleu-
reusement sa fête. A cette occasion, M. Wallez, de Gand, lui envoyait la pièce de vers
suivante, imprimée sur satin blanc.
A MONSIEUR DAVID
Quand, sur une terre chérie,
Au sein d’un glorieux repos,
Tu recevais de ta patrie
Le prix de tes brillants travaux ;
Quand, loin du bruit de la tempête,
Fiers de ton nom, de tes succès,
Tes enfants célébraient ta fête,
C’était la fête des Français.