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L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré — 9.1876

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https://doi.org/10.11588/diglit.6770#0086
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L'ECLIPSE

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DE L'ECLIPSE

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L ATTAOIE DU WAGON

Scène «le la vie dominicaine

Pendant quatre cents représentations — je prie les auteurs
de m'excuser si je fais erreur de quelques cents — le Tour
du Monde a promené son public dans les Montagnes Ro-
cheuses pour le faire assister à l'attaque d'un wagon par
une troupe de sauvages.

Vous n'avez certainement pas oublié ces Peaux-Rouges
s'élançant tout à coup vers les portières en brandissant
leurs casse-tètes, et tirant dehors, au milieu de cris féroces,
les infortunés voyageurs.

Je reviens rarement le soir de la campagne suburbaine,
un dimanche, sans me rappeler cette scène émouvante et
m'y croire acteur un moment.

A dix heures
l'attaque du train

Cette inscription serait, semble-t-il, tout aussi bien à sa
place dans les gares de Vincennes ou do Chatou que sur
l'affiche de la Porte-Saint-Martin.

Si les Tomahawks sont remplacés par de simples cannes
ou par de simples ombrelles aux mains des Visages-Pâles,
les cris des assaillants n'en restent pas moins terrifiants
pour ceux qui occupent déjà l'intérieur des wagons.

11 est aisé de pressentir que ces bandes d'hommes et de
femmes, mal assurés d'être ramenés chez eux après une
journée de fatigue, sont capables de se porter aux dernières
extrémités pour conquérir une place dans le train qui
passe.

La façon dont ces civilisés se ruent sur les wagons suffi-
rait certes à rendre blême un Peau-Rouge.

Le sifflet annonçant l'arrivée en gare n'a pas fini de reten-
tir que déjà des grappes d'individus se sont suspendus au
convoi en marche.

— Il y en a! il y en a! hurlent ces affolés.
Rassurez-vous, timides voyageuses qui faites ce trajet

pour la première fois, en ne signifie pas ici « des proies. »
En signifie seulement des places.

Mais ce n'est pas le tout qu'il y ait des places, encore faut-
il s'en rendre maître.

La moindre déconvenue est de se trouver au point d'arrêt,
grâce au mouvement du train, devant un wagon complet
quand on croyait en suivre à la course un vide.

Un wagon vide, quel rêve ! Est-ce qu'il y a ce jour-là des
wagons vides ? Tout au plus y en a-t-il qui le paraissent.

C'est autour de ces derniers que la lutte s'engage, achar-
née.

Tous voulant monter à la fois, il s'écoule forcément quel-
que temps avant que quiconque arrive à franchir seulement
le marchepied. On appelle les parents et les amis à la res-
cousse.

— A moi, Jules!

— Par ici, Aglaé !

— Tenez-moi bien ! (

— Ne lâche pas !

— Prenez donc garde ! vous allez faire mal à cet enfant !

Mais il s'agit bien d'entant, il s'agit bien de femme, il s'a-
git bien de qui que ce soit! Chacun ne • songe plus qu'à
trouver un coin où se caser. C'est peupour y arriver de n'a-
voir à étouffer que deux ou trois indifférents.

Il faut avoir assisté à ces petits assauts du dimanche soir
pour se faire une idée du degré d'égoïsme et de brutalité
sauvage où le plus inoffensif peut être porté quand il sent
que les jambes lui rentrent dans le corps et qu'une vision
fatale lui montro sa couche moelleuse distante encore de
plusieurs kilomètres.

Si l'assaut est donné vigoureusement au dehors, il n'est
pas soutenu avec moins d'ardeur au dedans. Lo cœur d'un
voyageur qui peut jouir de deux places en n'en ayant payé
qu'une seule est inaccessible à la plus vulgaire pitié.

La défense est terrible. A défaut d'huile bouillante et de
plomb fondu qui manquent, les quolibets et les grogne-
gents pleuvent sur les assaillants.

Chacun des assiégés s'efforce de faire foule dans la me-
sure de ses forces. Les enfants montent sur les banquettes,
les femmes opulentes portent la poitrine en avant pour
faire croiro que le wagon est plein ; celles qui sont moins
riches en avantages physiques développent la superficie de
leurs jupes et suppléent par des amoncellements de pa-
quets à l'insuffisance de l'espace occupé ; les possesseurs
de coins se cramponnent à la portière.

A travers les vitres fermées, les assaillants, se faisant de
leurs mains un abat-jour, comptent do l'œil, avec une joie
farouche, le nombre des places vacantes :

— Il y en a une! 1

— Il y en a deux !

— 11 y en a trois !

— Il n'y en a pas ! glapit le wagon tout entier pris de

rage. . . . > , |

La rage du désespoir, car la portière vient, de céder.
Quatre assaillants à la fois font irruption dans la boîte am-
bulante.

C'est alors que la lutte devient épique.

Un des nouveaux venus, porteur d'un panier de champi-
gnons cueillis par lui dans la journée, tombe assis sur les
genoux d'une vielle dame qui suffoque, pendant que ses
trois compagnons se disputent les deux seules places va-
cantes ; un monsieur se lève pour mettre le holà, et voit
aussitôt son coin pris par un intrus qui engage encore avec
aplomb quelques autres à monter. La mêlée devient géné-
rale, et lorsque deux ou trois assaillants ont été jetés bas
avec les plantes grimpantes qu'ils rapportaient dans leurs
mouchoirs, on s'aperçoit que chaque banquette, réservée
par une administration prévoyante à cinq voyageurs, en
contient six.

Une nouvelle expulsion,.qui ne saurait avoir lieu sans
l'aide des employés de la Compagnie, provoque des cris de
détresse et de fureur. Le dernier assaillant, résolu à s'as-
seoir par terre, ne peut être arraché qu'à force de bras, au
milieu d'un inénarrable trépignement de châles et de
bouquets. Ah! la victoire aura coûté cher.

Les voyageurs contusionnés font entendre des plaintes
amères ; ceux que le hasard a séparés se cherchent sans se
retrouver.

— Où es-tu, Ernestine? gémit une voix désespérée.

Et les facétieux — il y en a partout — de réclamer à
grands cris :

— Ernestine ! Ernestine !
Cependant la cloche donne le signal.

— On part ! Allons, vite,on part!

Il n'y a plus à appeler. 11 faut laisser Ernestine là où elle
est et dans la compagnie que le sort lui a donnée. Sombre

angoisse !

Les derniers battements de portières qu'on ferme répon-
dent d'une extrémité à l'autre du train, et le convoi re-
prend pesamment sa marche, tandis que, de l'impériale,
un cor de chasse gouailleur couvre les réclamations des
infortunés restés sur le quai, comme l'orgue étouffait les
cris du malheureux Fualdès.

Bientôt les hôtes du wagon, dont cette lutte homérique a
épuisé les dernières forces, laissent pencher dans tous les
sens leurs têtes engourdies.

Sous la lumière tremblante de la lampe, on ne démêle
bientôt plus qu'un enchevêtrement confus de membres fa-
tigués et de choses poudreuses, profil étrange traversé de
bottes de fleurs aux arômes suffoquants, dont les pointes,
en se balançant, viennent çà et là chatouiller la narine
d'un dormeur.

Seule, près d'un carreau baissé, comme il convient que
partout un grain de poésie vienne dominer la matière et la
fasse oublier, une jeune fille droite, éveillée perce d'un
regard profond l'obscurité douce de la nuit, et ses yeux
grands ouverts semblent reconstruire, à la trépidation mo-
notone de la voiture, quelque rêve aimable ébauché sous,
les feuillages verts.

PAUL PARFAIT

CHOSES ET AUTRES

Deux échos des élections, puisqu'il y en a toujours.

Un de nos confrères des plus aimables et (tes plus sym-
pathiques était candidat dans une circonscription de la
Gironde, dont il est aujourd'hui député, ce qui me dispense
de dire, ajouterait M. Prudhomme, ou un académicien, qu'il
a été élu.

Il doit cette élection, du reste, bien plus à sa belle pres-
tance, à sa parole chaude et facile et à sa constitution
vigoureuse — qui lui a permis d'aller visiter les cent trois
communes de sa circonscription et de converser directement
avec tous ses électeurs, — bien plus qu'à Ses opinions, il
est carrément bonapartiste ; que voulez-vous, on n'est pas
parfait.

Dans une de ces tournées, il alla voir un des gros bonnets
de l'endroit, qu'il essaya d'endoctriner.
Celui-ci l'écouta patiemment, puis tout à coup :

— Il y a une chose que je désirerais, lui dit-il.

— Et quoi donc? répondit l'autre, prêt, en vrai candidat,
à tout promettre, au besoin la lune si on la demandait.

— Vous possédez certainement la photographie du prince
impérial, je voudrais bien l'avoir.

Enchanté, le candidat, tout en déclarant qu'il n'avait qu'un
seul exemplaire, le dernier naturellement, donna la photo-
graphie, en disant à l'électeur influent :

— Je n'ai plus besoin de vous demander maintenant où
sont vos sympathies?

— Pardon, fit l'autre en empochant le petit carton, je ne
suis pas bonapartiste du tout, mais Tna femme est une col-
lectionneuse enragée, elle a dé|A les photographies de

Chambord, du comte de Paris, de ». Thiers, du maréchal
Mac-Mahon, il lui manquait celle du prince impérial,

Tète du candidat, qui, d'ailleurs, raconte l'histoire lui-
même et en rit tout le premier.

Dans un département voisin un jeune candidat républi-
cain se trouvait en concurrence avec le député sortant, con-
servateur de très-belle eau.

Malheureusement le républicain était à peu près entière-
ment étranger au département, et c'était un argument in-
voqué à chaque instant par.les partisans de l'adversaire ;
celui-ci était professeur de faculté, n'ayant du reste aucun
autre intérêt dans le département où il ne possédait pas un
pouce de terre.

Un soir, dans une réunion publique, un orateur conserva-
teur recommença la scie.

— .D'ailleurs, dit-il, le candidat républicain nous est étran-
ger, il n'a pas même une seule propriété dans le départe-
ment.

Un paysan se leva :

— Je vous demande pardon, s'écria-t-il, il en a beaucoup.

— où? lesquelles? demanda triomphalement l'orateur.

— Oh ! répondit le paysan, il a acheté toutes celles de
son concurrent !

La crémation revient sur l'eau, il y a des commissions
nommées et des rapports commencés.

Je ne sais pas ce qu'il adviendra de l'affaire ; mais je con-
nais déjà des échotiers qui préparent des mots.

Le jour où, au lieu de porter les morts en terre, on les
incinérera pour les placer dans de petites urnes qui feront
l'ornement des monuments et même des appartements,
voici le genre de nouvelles à la main qui fleuriront dans
les prétendues feuilles spirituelles.

M. X... a perdu sa belle-mère qu'il n'a jamais aimée,
même avant son mariage.

Sa femme, la tendresse filiale incarnée, a voulu conserver
les restes de la défunte chez elle ; celle-ci repose dans une
jolie urne de marbre sur la cheminée du salon.

M. X... n'y voit pas d'inconvénient, cela lui rappelle régu-
lièrement un joli débarras.

L'autre soir, le mari était assis devant la cheminée, tison-
nantie feu,etpensant à cent autres choses qu'à sa feue belle-
mère. En se relevant il fit un faux mouvement, toucha
l'urne qui lui tomba sur la tête et lui fit une forte bosse au
front.

— Tu vois, dit-il à sa femme, je te l'ai toujours soutenu,
il n'y a pas moyen de vivre avec ta mère... même après sa
mort !

*

L'histoire morale de l'humanité a été si bien établie sur
la chute de la femme, que les trois quarts des romanciers
et des auteurs dramatiques ne sortent pas de là.

Presque toujours leur héroïne est créée pour faire saisir
les inconvénients du mariage et en faire porter le poids au
mari.

M.Marius Roux a renversé la thèse : son itomme adultère,
qui a paru chezDentu, peut en remontrer à une demi-dou-
zaine d'évadées du mariage. Tudieu ! quels coups de canif
assaisonnés de circonstances aggravantes !

Quand je dis canif, je suis modeste, j'aurais dû mettre
poignard, coutelas ou sabre de cavalerie.

L'Homme adultère fait vivement ressortir les dangers de •
l'éducation cléricale. L'auteur, du même coup, s'est mis à
dos les dévots et concilié le suffrage de toutes les femmes.

Très-fort, M. Marius Roux...

Et son roman aussi !

Il vient de mourir un ingénieur de grand talent, M. Thomé
de (iamond; sa réputation était bien au-dessous de son
mérite.

11 avait fait les premiers plans ou projets de tous les tra-
vaux gigantesques exécutés ou en exécution dans le monde :
l'isthme de Suez, le tunnel de la Manche, le tunnel du Saint-
Gothard, dont d'autres, plus heureux, furent chargés.

— Que voulez-vous, disait un de ses confrères qui assis-
tait au convoi, 11 n'était pas né pour percer.

Un capitaliste avait depuis quelque temps l'intention
d'acheter un journal qui ne passe pas pour avoir un public
bien nombreux.

On discutait devant lui les chances de vitalité de la
feuille.

— Ça ne va pas, dit quelqu'un qui paraissait au courant
de la chose.

— Cependant, répliqua le banquier, le journal tire...

— Certainement, répliqua l'autre, il tire même à sa fin.

Calino a eu une seule bonne idée, et encore elle a donné
naissance à une... calinotade.

Calino s'est fait assurer, et il est mort.

Sa veuve désolée touchant l'autre jour les 50.000 francs,
somme stipulée en cas de décès :

— Pauvre chéri I dit-elle en considérant les cinquante
billets de mille, si du moins il avait pu jouir de cette for-
tune !

Un neveu, de caractère assez léger, sortait l'autre jour
de chez un oncle qu'il avait toujours beaucoup négligé. Il
était venu le Voir parce que le vieux bonhomme était au
plus mal et qu'il avait été question de dispositions testa- !
mentaires.

Sur l'escalier, il rencontra le médecin ; celui-ci remarqua
l'air enhtiyé du neveu.

— Est-ce qu'il ne vous a rien laissé? demanda le docteur.

— Oh ! si !

— Ah! et quoi? '":>•'•..-•

— U m'a laissé entendre qu'il me déshérite.

GEORGES STENNE. -
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