L'ECLIPSE, REVUE COMIQUE ILLUSTREE
19 Novembre 1876.
M \dame. — C'est vrai, il y a des maîtres comme
ça; c'est honteux!... Au moins, ici, vous n'aurez
pas à vous plaindre : c'est moi-même qui vous dé-
coupe vos portions à table.
La bonne, à part. — Oui, je te vois venir, ros -
sarde, toujours la souris du gigot et les enta-
mes !...
mi -Madame. — Et puis nous n'avons qu'un tout petit
ménage, comme je vous ai déjà dit ; la bonne a du
repos.
La bonne. — Combien qu'il y a de lits ?
Madame. — Trois seulement, ou plutôt deux, —
car celui de ma fille n'est qu'un lit d'enfant ; — il
n'y a que celui de mon mari et le mien.
La bonne,- ù elle- même. — Oh ! la la !... des rentiers
de carton et ils ne couchent pas ensemble pour sin-
ger les grands seigneurs !...
Monsieur, d'un air dégagé. — Et encore ! le plus
souvent il n'y a que celui de madame.
Madame. — Du reste l'appartement n'a que quatre
petites pièces : le salon...
La bonne, à elle-même. — Y a pas de tapis !
Madame, continuant. — La salle à manger et les
deux chambres à coucher — vous voyez que c'est
modeste. Le matin, vous commencez par le salon,
en vous levant à six heures ; j'aime assez les bonnes
matineuses. Vous aérez, vous tapez les meubles,
vous...
La bonne, avec inquiétude. — C'est pas moi qui
frotte ?...
Madame. — Les bonnes ont toujours, frotté. Nous
n'avons pas un gros ménage, ce n'est pas pénible, et
même un peu de mouvement c'est excellent pour la
santé. Du reste, c'est assez de mettre de la cire
tous les samedis et d'entretenir le poli avec la fla-
nelle les autres jours.
La bonne, à part. — Je t'entretiendrai ça joliment,
va, sale teigne !
Madame. — Ensuite, à huit heures, vous apprêtez
le café, après quoi vous conduisez ma fille à sa pen-
sion, à dix minutes d'ici, une promenade ; et vous
allez la reprendre à cinq heures.
La bonne, à elle-même. — Pour ce qui est de la
flâne, ça me va !
Madame. — Puis, nous déjeunons à onze heures.
Je pense que vous savez utiliser les restes de la
veille, comme case fait dans les bonnes maisons?...
Monsieur. — Oui, par exemple, l'aloyau froid se
mange à la mayonnaise, ou en émincés à la ravi-
gotte...
La bonne. — M'sieu peut être tranquille, je con-
nais ça !
Madame. — Nous dinons à six heures précises.
Dans l'intervalle des repas vous n'avez rien à faire
qu'à raccommoder le linge, et la petite lessive une ou
deux fois par semaine... Vous voyez que le service
est très-doux.
La bonne, à elle-même. — Oh ! oui, elle a rien à s'a-
muser, la bonne, ici !
Monsieur. — Avez-vous des parents à Paris?
La bonne, à part. — Qu'est-ce que ça te fait,
pignouf ! (Haut.) J'ai la marraine de mon frère.
Monsieur. — Ah! vous avez un frère?
La bonne. — Oui, m'sieu.
Monsieur. — Où ça?
La bonne. — Il est parti en Amérique.
Madame. — Et dès cousins ?
La bonne. — J'en ai pas seulement la moitié
d'un.
Monsieur, d'un air friand. — Et... des pompiers...
La bonne. — Ah! m'sieu veut rire!...
Madame. — De quel pays êtes-vous?
La bonne. — De Strasbourg.
Madame. — Strasbourg, en Alsace?
Monsieur, douloureusement. — Ah! juste ciel ! nos
malheureuses provinces! — Ainsi, vous êtes Alsa-
cienne?
La bonne. — De père et mère.
Madame. — Vous n'avez pas d'autres connaissances
à Paris?
LA RECHERCHE D'UNE PHRASE
Non! ce n'est pas encore cela. Si je mettais
19 Novembre 1876.
M \dame. — C'est vrai, il y a des maîtres comme
ça; c'est honteux!... Au moins, ici, vous n'aurez
pas à vous plaindre : c'est moi-même qui vous dé-
coupe vos portions à table.
La bonne, à part. — Oui, je te vois venir, ros -
sarde, toujours la souris du gigot et les enta-
mes !...
mi -Madame. — Et puis nous n'avons qu'un tout petit
ménage, comme je vous ai déjà dit ; la bonne a du
repos.
La bonne. — Combien qu'il y a de lits ?
Madame. — Trois seulement, ou plutôt deux, —
car celui de ma fille n'est qu'un lit d'enfant ; — il
n'y a que celui de mon mari et le mien.
La bonne,- ù elle- même. — Oh ! la la !... des rentiers
de carton et ils ne couchent pas ensemble pour sin-
ger les grands seigneurs !...
Monsieur, d'un air dégagé. — Et encore ! le plus
souvent il n'y a que celui de madame.
Madame. — Du reste l'appartement n'a que quatre
petites pièces : le salon...
La bonne, à elle-même. — Y a pas de tapis !
Madame, continuant. — La salle à manger et les
deux chambres à coucher — vous voyez que c'est
modeste. Le matin, vous commencez par le salon,
en vous levant à six heures ; j'aime assez les bonnes
matineuses. Vous aérez, vous tapez les meubles,
vous...
La bonne, avec inquiétude. — C'est pas moi qui
frotte ?...
Madame. — Les bonnes ont toujours, frotté. Nous
n'avons pas un gros ménage, ce n'est pas pénible, et
même un peu de mouvement c'est excellent pour la
santé. Du reste, c'est assez de mettre de la cire
tous les samedis et d'entretenir le poli avec la fla-
nelle les autres jours.
La bonne, à part. — Je t'entretiendrai ça joliment,
va, sale teigne !
Madame. — Ensuite, à huit heures, vous apprêtez
le café, après quoi vous conduisez ma fille à sa pen-
sion, à dix minutes d'ici, une promenade ; et vous
allez la reprendre à cinq heures.
La bonne, à elle-même. — Pour ce qui est de la
flâne, ça me va !
Madame. — Puis, nous déjeunons à onze heures.
Je pense que vous savez utiliser les restes de la
veille, comme case fait dans les bonnes maisons?...
Monsieur. — Oui, par exemple, l'aloyau froid se
mange à la mayonnaise, ou en émincés à la ravi-
gotte...
La bonne. — M'sieu peut être tranquille, je con-
nais ça !
Madame. — Nous dinons à six heures précises.
Dans l'intervalle des repas vous n'avez rien à faire
qu'à raccommoder le linge, et la petite lessive une ou
deux fois par semaine... Vous voyez que le service
est très-doux.
La bonne, à elle-même. — Oh ! oui, elle a rien à s'a-
muser, la bonne, ici !
Monsieur. — Avez-vous des parents à Paris?
La bonne, à part. — Qu'est-ce que ça te fait,
pignouf ! (Haut.) J'ai la marraine de mon frère.
Monsieur. — Ah! vous avez un frère?
La bonne. — Oui, m'sieu.
Monsieur. — Où ça?
La bonne. — Il est parti en Amérique.
Madame. — Et dès cousins ?
La bonne. — J'en ai pas seulement la moitié
d'un.
Monsieur, d'un air friand. — Et... des pompiers...
La bonne. — Ah! m'sieu veut rire!...
Madame. — De quel pays êtes-vous?
La bonne. — De Strasbourg.
Madame. — Strasbourg, en Alsace?
Monsieur, douloureusement. — Ah! juste ciel ! nos
malheureuses provinces! — Ainsi, vous êtes Alsa-
cienne?
La bonne. — De père et mère.
Madame. — Vous n'avez pas d'autres connaissances
à Paris?
LA RECHERCHE D'UNE PHRASE
Non! ce n'est pas encore cela. Si je mettais
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
La recherche d'une phrase
Weitere Titel/Paralleltitel
Serientitel
L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
S 25 / T 6
Objektbeschreibung
Objektbeschreibung
Bildunterschrift:
"Non! ce n'est pas encore cela"
"Si je mettais...."
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)