L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré (10.1877)

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L'ÉCLIPSÉ, REVUE COMIQUE ILLUSTRÉE

1« Avril 1877.

LA SEMAINE COMIQUE

— Tu sais, bobonno, qu'on va renouveler la moitié des conseillers

généraux.

— Si ça pouvait être la moitié du haut, quelle chance ! ça te ferait une
autre tête.

— Tirez donc, c'est à vous.

— Pas avant que la loi sur le duel soit votée.

— Madame la baronne compte me faire passer l'été dans cette pelisse?

— Pensez donc, Baptiste ! le grand air, ça tue les bêtes qui sont dedans.

LA JOURNÉE D'UNE COCOTTE

DÉCOR : Une chambre à coucher tendue de soie bleue et
rose, qui jette des teintes de nacre sur le meuble en vernis
blanc.

Il est midi. L'ange repose dans son grand lit à bal-
daquin, élevé par une marche d'autel au-dessus du
niveau du parquet. La chambre est dans un de ces
beaux désordres qui sont un effet de l'art — de la
gymnastique.

Tout est en l'air : gazes, dentelles,
Mêlent leurs blanches cascatelles

Tout en lambeaux ;
Gants déchires, mouchoir, coiffure,
Pendent accrochés d'aventure

Sur les flambeaux.

Un chapeau, léger comme un souffle,
Gît à côté d'une pantoufle

De soie et d'or;
Et Doll, incomparable chienne,
Sur sa veste tunisienne,

Gémit et dort.

Dans ce capharnaùm étrange,
Katinette a l'air d'un archange,

Marbre vivant;
Elle gît là, blanche statue,
De son piédestal abattue

Par un passant.

C'est Katinette, peu m'importe
Qu'elle ouvre à deux battants sa porte

A ses amis;
Son cercle est célèbre à la ronde,
Et tous les gens du meilleur monde

Y sont admis.

Il ne m'en faut pas davantage;
Elle aura le temps d'être sage

Un peu plus tard ;
Pour moi, je trouve les Vestales
Plus tristes que les deux morales

De D. Nisard.

Chacun sait bien que Katinette

Ne craint pas qu'on la compromette :

On peut l'aimer;
Son logis n'est pas solitaire,
Et ce n'est point un sanctuaire :

On peut fumer.

Katinette s'éveille, allonge un bras serpentin et
donne un coup de sonnette.

M"8 Armande, femme de chambre, entre et lui
présente des lettres.